Mais revenons aux médias. Leur premier rôle est d’informer, c’est-à-dire d’évoquer les faits, seulement les faits, tous les faits. Le commentaire, ensuite, est libre et facultatif. Les émissions en cause ont-elles falsifié les faits, menti éhontément. Je ne sache pas que Pierre Daher de la LBC ait ordonné à ses journalistes de Al Chater Yehki d’inciter les époux à prendre des maîtresses, les femmes à goûter aux délices du saphisme, ou les jeunes hommes à se détourner des amours procréatrices. Jean Claude Boulos, quant à lui, n’est pas un pornographe, on le saurait depuis longtemps.
Une autorité parmi les autorités reproche à ces émissions, si prudentes pourtant, de ne pas apporter de «solutions scientifiques» aux problèmes soulevés. Les sciences humaines restant, malgré leurs progrès, indécidables, faut-il demander à l’astrophysique une solution scientifique aux aléas de la libido pour satisfaire les pharisiens de nos ministères?
La société libanaise ne doit pas être isolée, quant à ses réticences, si l’on se souvient que les légalisations de l’avortement, celles du divorce et celles de l’abolition de la peine de mort ont coûté, à l’Occident tout entier, des convulsions sociales et politiques dont les traces profondes sont encore perceptibles aujourd’hui. Mais comparaison n’est pas raison. L’une des meilleures façons de s’attaquer aux mentalités, seules en cause, avec les responsables de leur façonnement, est de le faire, dans un monde aussi post-gütembergien que le nôtre, à travers une médiatisation, notamment télévisuelle, à la fois intelligente et sensée. Il n’est même pas dit que tous les religieux se mettront en travers d’une telle entreprise de tolérance des mœurs.
En 1895, l’un des plus grands écrivains anglais exécuta deux ans de travaux forcés. Il s’agit d’Oscar Wilde à la fin de l’époque victorienne. Il est vrai que ce fut sur dénonciation publique du père, marquis, de son jeune amant majeur, Alfred Douglas.
Dans notre pays où le théâtre, fût-ce celui de Schéhadé, est assimilé, sur le plan juridique, au domaine des «loisirs», comme le strip-tease et les bordels, si Jalal Khoury ne subit pas d’inspection médicale pour maladies vénériennes, c’est qu’il est célèbre et que l’on connaît son village natal. Il échappe à la stricte application du droit. Par privilège.
Cette digression pour dire qu’il est grand temps de sortir de la confusion qu’entretiennent le mélange des genres dans tous les domaines, des aberrations de la morale sociale, enfin du bal des ignares qui nous ont en charge.
Non que ces vertueuses indignations officielles ne dépassent pas les limites d’une tempête dans un verre d’eau. Sauf à souhaiter que se déchaîne toute la presse qui compte contre les baillons qu’on cherche à lui imposer pour mieux faire régresser les citoyens de ce pays.
Amal NACCACHE
P.S.: Quand ça va mal chez soi, il n’est pas inutile de se réjouir du malheur des autres. On compte ainsi aux Etats-Unis, selon l’assez sérieux «Washington Post», 400.000 morts par homicide depuis 1980, armes à feu et armes blanches confondues. 400.000 habitants tués par leurs semblables, en temps de paix. Etant donné l’immensité de l’Amérique du Nord, cela donnerait matière à extrapolation au niveau planétaire, si elle ne devançait, et de très loin, la majorité des pays européens et ceux du Tiers Monde. Les autorités, pas plus que les experts d’outre-Atlantique, n’avancent, de leur propre aveu, une explication satisfaisante. «Changer la société pour changer l’homme ou changer l’homme pour changer la société?» On en revient à l’éternel dilemme.
Dis, petit, pourquoi tu pinces la Sri-Lankaise?
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