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Actualités - OPINION

Courrier Rafic Ali Ahmad : bel et bon...

Je suis redevable à Rafic Ali Ahmad d’une expérience culturelle inattendue.
Hier soir, mon mari et moi sortions dans une tentative de plus d’assister à un spectacle en arabe, cette fois «Zawarib» avec Rafic Ali Ahmad.
De ce dernier je ne connaissais que l’aspect, aperçu à la télé quelques minutes. Pour la malchance de mon conjoint, qui a une vaste culture arabe, je fais partie de ces francophones endurcis pour qui l’arabe est resté une seconde langue incompréhensible dès qu’on dépasse le niveau élémentaire utilisé pour s’acheter des tomates ou faire réparer un robinet. Pour moi donc, le théâtre en langue arabe lorsqu’il est sérieux, c’est du charabia et quand le langage est assez simple, la vulgarité et la sottise en sont ahurissantes. J’accompagnai donc mon mari, toute farcie de mes préjugés: «ou j’comprends rien ou ça va être bête à pleurer». «Mais, ajoutai-je, cette fois c’est un moindre mal: ton Rafic Ali Ahmad, au moins il est beau. Si je ne comprends pas ce qu’il dit, j’aurais quand même passé une heure à admirer un bel homme», très amusée par la mine dégoûtée que prend mon cher époux (pour qui les canons des mérites masculins s’arrêtent à John Wayne), lorsqu’est mentionné le physique d’un homme à barbiche, détail, d’après lui, à connotation malpropre dans le meilleur des cas.
C’est ainsi que nous nous sommes rendus au théâtre «al-Madina» tous soupçons largués, moi pour les choix de spectacles douteux de mon mari, lui pour le goût non moins douteux de sa digne épouse quinquagénaire pour les bellâtres barbus.
Mais voilà, «Zawarib» m’a désarmée et a eu raison de mes préjugés: avec un arabe tout simple, prononcé clairement, la voix chaude et fluide de Rafic Ali Ahmad m’a atteinte et émue. Pendant 80 mn, cet artiste accompli a tenu seul la scène et n ’a cessé de se dépenser pour exprimer, à travers les imprécations d’un vieux «zabbal» beyrouthin, un éventail d’émotions face à des sujets tels que le conflit de générations, l’injustice sociale, l’amoralité, le choc de la modernisation, les pathétiques complexes sociaux. A tous moments, son jeu reste teinté d’humour pudique, de nostalgie tout en tendresse.
La mise en scène, le scénario, la «libanisation» du texte, j’ai tout admiré... en arabe.
Alors, si comme moi, vous avez des préjugés, allez voir «Zawarib»: en 80 mn et en un seul acte, vous serez réconciliés avec le théâtre en arabe.
Et si encore comme moi, mesdames, vous trouvez Rafic Ali Ahmad bel homme, ne taquinez pas inutilement votre chevalier servant, car une fois au spectacle vous n’aurez d’yeux et d’oreilles que pour le talent de l’artiste.

Tilda BSAT
Je suis redevable à Rafic Ali Ahmad d’une expérience culturelle inattendue.Hier soir, mon mari et moi sortions dans une tentative de plus d’assister à un spectacle en arabe, cette fois «Zawarib» avec Rafic Ali Ahmad.De ce dernier je ne connaissais que l’aspect, aperçu à la télé quelques minutes. Pour la malchance de mon conjoint, qui a une vaste culture arabe, je fais...