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Actualités - ANALYSE

Le procès politique du pouvoir se poursuit


Le pouvoir issu de Taëf, qui en a jugé plus d’un, est maintenant lui-même au banc des accusés et se trouve contesté même par les loyalistes! Résumant l’opinion courante, un ancien ministre développe le réquisitoire suivant:
— «Le Liban se retrouve aujourd’hui confronté à de sérieuses difficultés politiques, sécuritaires, économiques, sociales et financières. Pour y faire face, il faudrait un pouvoir expérimenté, d’une claire transparence, solidement uni, jouissant d’une vraie confiance populaire. Car l’une des causes principales de la crise reste justement le manque de crédibilité des gens en place, leur incurie politique, leur incapacité à décider en toute indépendance, tous éléments qui ont contribué à élargir le trou du Trésor en faisant flamber le volume de la dette publique. Jamais au cours de ces dernières années il n’y a eu de gouvernement fort, homogène, bien soudé, capable d’appliquer la loi à tous sans exception. Les équipes qui se sont succédé à la barre ont toutes été friables, peu soucieuses de solidarité interne minimale, sévissant volontiers contre les faibles et fermant les yeux sur les abus des forts, s’attirant par là les défis de rebelles subversifs, comme on le voit aujourd’hui à Baalbeck-Hermel. Une provocation qui se répète et qui enfle, finissant au bout du compte par représenter une menace pour la patrie, pour le citoyen et pour l’Etat. La sécurité redevient ainsi précaire et le fil du détonateur peut prendre feu à tout moment, le mouvement pouvant déborder la Békaa pour se répandre dans d’autres régions, toujours au nom des «affamés». A ce rythme, l’Etat risque de se miniaturiser comme dans les années quatre-vingt et de ne plus contrôler grand-chose dans le pays».

Dépenses

Passant au volet économique, l’ancien ministre poursuit:
— «Affaibli, le pouvoir a trouvé moyen d’aggraver lui-même la crise en vivant largement au-dessus de ses moyens, en se livrant à des dépenses somptuaires, en gaspillant les fonds publics souvent sur des projets superflus aux dépens du nécessaire, en laissant la corruption gangréner l’Administration comme ses propres rouages politiques et cela loin de tout contrôle, ce qui implique une complicité passive de la part de la Chambre. Comme résultat un déficit budgétaire record et une dette publique qui s’accroît constamment, mettant le pays au bord de la ruine. Et comme le pouvoir n’a pas d’autorité réelle, comme il ne bénéficie pas non plus de la confiance publique, il n’a même pas pu améliorer des taux de perception des taxes, impôts et quittances, qui restent très inférieurs et n’apportent pas au Trésor suffisamment de ressources pour se renflouer un peu. Le comble, c’est que les dirigeants prétendent colmater les brèches en faisant flamber les impôts indirects, qui n’ont pas besoin de perception. Non seulement ils veulent faire assumer les pertes dont ils sont responsables par les contribuables-consommateurs mais ils se rendent aussi coupables d’une injustice criante, ces impôts indirects pénalisant bien évidemment beaucoup plus lourdement les économiquements faibles que les nantis. Il y a donc un fort rejet populaire des mesures envisagées et déjà le tollé a empêché l’application de la surtaxe énorme sur le prix de l’essence initialement prévue par le ministère des Finances».

L’impossible changement

«Dès lors, enchaîne l’ancien ministre, le déficit politique empêchant le traitement du déficit budgétaire, il faut nécessairement changer de pouvoir. C’est ce que la rue mais aussi de larges franges de la caste politique attendent, souhaitent ou demandent. Il est impératif pour sortir de l’impasse, de la nasse, de doter le Liban d’un véritable Etat de droit et des institutions, condition sine qua non pour rétablir cette confiance sans laquelle un pays n’est pas gouvernable, voire n’est pas viable. Dans la situation actuelle par exemple, s’il y avait un Etat fiable, les Libanais consentiraient volontiers à faire des sacrifices, à accepter toute augmentation d’impôts pour réduire le déficit budgétaire et le volume de la dette publique, car ils sauraient que leurs sous ne vont pas être détournés en chemin, que leur effort sera payant. De même un tel Etat, propre, intègre, pourrait très certainement obtenir une assistance, une coopération beaucoup plus consistantes, aussi bien des autres Etats que de la part de nos riches émigrés ou du capital arabe. La crise serait progressivement résorbée et le redressement économique prendrait enfin son essor. Ce n’est pas possible, faut-il le répéter, à l’ombre d’un pouvoir qui manque autant de transparence et du sens de l’Etat que l’actuel. Il faut donc comprendre que le début de tout salut doit commencer par le changement des structures et du personnel en place».
Plus facile à dire qu’à faire, on s’en doute, la décision n’étant en réalité pas du ressort local et les décideurs semblant pour l’heure à mille lieues de changer quoi que cela soit ou qui que cela soit. Il reste que peut-être l’an prochain, à l’occasion des présidentielles... Certes, l’échéance est encore lointaine, mais on peut toujours espérer. Ou rêver.

E.K.
Le pouvoir issu de Taëf, qui en a jugé plus d’un, est maintenant lui-même au banc des accusés et se trouve contesté même par les loyalistes! Résumant l’opinion courante, un ancien ministre développe le réquisitoire suivant:— «Le Liban se retrouve aujourd’hui confronté à de sérieuses difficultés politiques, sécuritaires, économiques, sociales et financières....