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Actualités - ANALYSE

Taëf encore et toujours sur la sellette

«Le processus de Taëf, souligne un opposant intégré au système, est allé droit dans le mur. Il faut en ramasser les morceaux pour tenter de reconstituer une formule cohérente, qui sorte le pays de la crise aiguë, politique aussi bien que socio-économique, dans laquelle il se débat».

«Tout ou presque, affirme ce loyaliste désenchanté, est de la faute des leaders, des dirigeants comme des chefs de file de différents courants ou formations: ils multiplient depuis le début les dérapages, sans que nul ne leur réclame jamais des comptes. Ce n’est pas l’esprit de châtiment qui nous inspire cette remarque mais la banale constatation que faute de sanctions les fautes se sont accumulées sans qu’on ne tente de corriger la trajectoire. Plus exactement, et c’est encore pire, à chaque dérive de l’un, il y a bien des criailleries de l’autre, mais cela ne va jamais loin et cela finit toujours par des réconciliations, après une phase pas très ragoûtante de déballage de linge sale en public. Autrement dit les règlements de comptes épisodiques au lieu de servir de premier remède ne font qu’empirer le mal».

Stratégie désastreuse

Pour sa part un membre du bloc parlementaire «de la libération et du développement», que dirige M. Nabih Berry, ouvre le feu — visiblement sur ordre — sur «la stratégie désastreuse de M. Rafic Hariri qui mène le pays à la ruine, l’appauvrit, plonge les Libanais dans le désespoir et fait forcément l’affaire de l’opposition qui ne cesse de s’élargir».
En face dans le camp haririen la défense se réduit à cet argument: «Il faut voir dans le blocage du processus régional l’origine de tous les maux que subit le pays, dont la production se trouve en grande partie paralysée». A partir de ce mince plaidoyer on ajoute que «les réalités étant ce qu’elles sont, il ne faut pas se mettre des œillères, surtout à des fins bassement politiques, et il est nécessaire d’insuffler au pays une bouffée, un ballon d’oxygène. L’emprunt d’un milliard de dollars et l’amélioration des ressources du Trésor par un relèvement des impôts ou des taxes sont donc absolument impératifs. Ces mesures devraient permettre au Liban de tenir jusqu’à ce que la situation régionale se décrispe, la reprise du processus de paix devant faciliter la relance de notre économie. Tous ceux qui multiplient les objections et les entraves se rendent responsables de l’aggravation de la crise...»
Bien entendu l’opposition riposte en soulignant que «le milliard de dollars on ne saura pas comment il aura été dépensé et il faut qu’on nous dise d’abord où sont allés les 500 millions de $ alloués il n’y a pas si longtemps soi-disant pour le retour des déplacés... Le gouvernement prétend qu’il veut promouvoir le développement du Hermel et du Akkar, ainsi que le retour des réfugiés».
«Mais le but véritable du pouvoir, poursuit cette source, est de masquer le trou béant autant que géant qu’il a causé dans les finances publiques, pour se blanchir devant la Banque mondiale qui lui demande des comptes. Ceci faisant, il va gagner du temps et les Libanais vont perdre le peu qu’il leur reste: il leur faudra aussi bien assumer la nouvelle dette d’un milliard de dollars que le gouvernement va contracter et payer leur essence 5.000 L.L. de plus, ce qui signifie que tous les prix vont flamber...»

Imposer son autorité

Apportant son grain de sel, un député note que «le pouvoir affiche ses divisions mais cela ne l’empêche pas d’être responsable, solidairement, de tout ce qui arrive. Au lieu de se chamailler, les dirigeants et les ministres feraient mieux d’appliquer tout simplement la loi comme elle doit être, c’est-à-dire à tous, dans toutes les régions. Le pays y gagnerait sur tous les plans et le Trésor y trouverait son compte car la perception fiscale serait enfin véritablement assurée, ce qui n’est pas du tout le cas aujourd’hui, de l’aveu même des dirigeants. L’Etat doit, pour rentrer dans ses fonds, commencer par imposer son autorité. En pratique, cela veut dire qu’il faut mettre au pas de façon exemplaire tous les éléments subversifs qui appellent à la fronde, à l’insubordination civile, au non-paiement des impôts et des quittances. En deux mots, si on veut rendre service à Siniora qui se plaint toujours de manquer de fonds (et de crédit...) il faut d’abord neutraliser Toufayli et mettre un terme aux abus comme aux privilèges illicites dont bénéficient des franges déterminées de la population. Le système des deux poids deux mesures déséquilibre forcément la balance des comptes... Il faut comprendre cependant, conclut cette source, qu’avec le Taëf tel qu’il est appliqué on ne peut rien faire de valable, de positif et qu’il devient urgent de trouver autre chose».
Un pieux souhait qui a tout l’air d’être utopique. A cette nuance près que, sans aller jusqu’à travailler pour une réforme en profondeur, les gens de Taëf s’en plaignent eux-mêmes de plus en plus...

Ph. A-A.
«Le processus de Taëf, souligne un opposant intégré au système, est allé droit dans le mur. Il faut en ramasser les morceaux pour tenter de reconstituer une formule cohérente, qui sorte le pays de la crise aiguë, politique aussi bien que socio-économique, dans laquelle il se débat».«Tout ou presque, affirme ce loyaliste désenchanté, est de la faute des leaders, des...