Tout d’abord, une virée du côté de l’histoire. Mgr Toubia Aoun, archevêque maronite (1845-1871) édifie, dans une première phase, un presbytère où il résidera. Les arcades de ce presbytère deviendront plus tard «souk el-Moutran» encore appelé «Souk el M’labass», car on y vendait des dragées. Non loin de là, sur une autre parcelle du wakf, on trouvait «Souk Abou el-Nasr». Dans une deuxième phase, le successeur de Mgr Aoun, Mgr Debs, fera donc construire la cathédrale sur le modèle de Sainte-Marie Majeure de Rome. Les travaux d’architecture, confiés en 1884 à l’Italien Joseph Majiori, sont terminés en 1894. La cathédrale pouvait accueillir plus de 800 personnes assises et le double de fidèles debout. Le coût de cette œuvre s’élève à 2 millions... de piastres.
«Les deux principaux donateurs ont été Michel Effendi Eddé et Antoun Bey Malhamé, les grands-pères paternel et maternel du ministre Michel Eddé», raconte l’archiprêtre de la cathédrale le R.P. Louis Hélou. Il signale que «le plafond plat, d’une hauteur de 18 mètres, était constitué de caissons en carton mâché, rouge à dorures. La charpente de la cathédrale était soutenue par des colonnes de pierre de Deir el-Kalaa et de Chemlan. L’autel reposait sur quatre colonnes en bois recouvertes d’une peinture imitant le marbre, et il était surmonté d’un baldaquin. Parmi les œuvres d’art qu’on pouvait y admirer, une toile de Delacroix représentant Saint-Georges. Des tableaux de saints réalisés par des peintres libanais comme Mourani et Dib»...
Dans les années 50, l’édifice subit une rénovation qui modifie largement l’architecture intérieure aux dépens de l’acoustique. Au cours de la guerre, les obus et le vandalisme font rage. Le marbre du parquet, les cadres et les fenêtres sont arrachés. Le toit en tuile d’ardoise rouge et les poutres de bois qui le soutenaient à l’intérieur ont complètement disparu; la voûte au-dessus de l’autel est défoncée; les ornements, les peintures et les accessoires de différentes périodes sont pillés.
En 1994, dans le dépouillement total des lieux, Mgr Khalil Abinader célèbre une messe au cours de laquelle il annonce la création de deux comités. L’un, présidé par le ministre Eddé, collectera les fonds nécessaires à la reconstruction. L’autre, technique, présidé par l’architecte Pierre el-Khoury, a pour objectif de réhabiliter l’architecture initiale en effaçant les traces des modifications opérées dans les années 50. «Un apport précieux a été apporté par des plans et des photos anciennes retrouvées dans les archives de l’archevêché et chez des particuliers», explique l’architecte el-Khoury. Les plans faciliteront la reconstitution de la cathédrale séculaire dans ses matériaux traditionnels comme la pierre ramlé, les moulures des fenêtres, les frontons, les corniches en pierre dure sculptée; les colonnes en pierre libanaise rose et beige; le porche et le sol en marbre blanc; les tribunes avec leurs balustrades s’alignant sous les arcades. Par ailleurs, les voûtes où sont entreposés aujourd’hui les objets archéologiques du centre-ville et qui jadis fut «Souk el-Moutran», seront aménagées en salle de conférence. Notons que la nef centrale est cruciforme. Dans le fond, trois absides dont deux latérales percées de fenêtres seront rouvertes (elles avaient été obstruées lors des travaux des années 50) sur un jardin.
«Les travaux sont entrepris par étapes suivant les donations» indique encore M. Pierre el-Khoury et de souligner que «la cathédrale reste l’édifice religieux chrétien le plus important par ses volumes au Liban».
M.M.
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