Premier pas vers une solution négociée au Zaïre

A BORD DE L’OUTENIQUA, 4 Mai (AFP). — Le président zaïrois Mobutu Sese Seko et le chef rebelle Laurent-Désiré Kabila ont fait dimanche un premier pas vers une solution négociée à sept mois de guerre civile au Zaïre, à l’issue de leur premier face-à-face à bord du navire sud-africain Outeniqua, ancré dans le port congolais de Pointe-Noire.
Au cours de leur entretien, qui a duré une heure et demie sous la présidence du chef de l’Etat sud-africain Nelson Mandela, ils sont convenus de se revoir dans un délai de dix jours.
Selon l’envoyé spécial des Nations Unies (ONU) et de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) Mohamed Sahnoun, qui lisait à la presse un communiqué conjoint, le chef rebelle a ordonné à ses troupes de cesser leur progression sur tous les fronts, et le maréchal Mobutu a proposé de ne pas se représenter lors d’élections au Zaïre et de remettre le pouvoir à un président élu.
Lors d’une conférence de presse à bord du navire, qui a réuni dans une ambiance maussade les protagonistes de la rencontre, M. Sahnoun a précisé que le président zaïrois a proposé un cessez-le-feu et la mise en place d’une autorité de transition pour organiser des élections. MM. Mobutu et Kabila ont pour leur part gardé le silence.
Selon le communiqué conjoint, qui fait état des positions des deux parties, la proposition de Kabila est que l’Alliance prenne le pouvoir comme autorité de transition et que Mobutu remette le pouvoir à cette autorité. «La fin des hostilités serait la conséquence de ce processus», précise le texte.
Le président Mandela, interrogé pour savoir si l’ordre de Kabila équivalait à un cessez-le-feu, a d’ailleurs répondu: «Pas du tout. Le président Kabila a donné l’ordre à ses troupes d’arrêter d’avancer plusieurs jours avant la rencontre, comme un geste de bonne volonté. Il n’a pas utilisé le terme de cessez-le-feu», a déclaré le président sud-africain.Le maréchal Mobutu n’a de son côté assorti d’aucune date sa proposition de nommer une autorité de transition chargée d’organiser des élections. Le secrétaire général de l’OUA Salim Ahmed Salim, a qualifié dimanche soir d’«avancée positive» la décision de M. Mobutu de ne pas se porter candidat à sa propre succession, après 32 ans de pouvoir. La France, tout en se félicitant des résultats de la rencontre, a réclamé un «arrêt effectif des hostilités».
Il est en effet difficile de savoir quel sera le comportement des Forces armées zaïroises (FAZ) à Kinshasa, et celui des troupes rebelles, désormais très proches de la capitale.
Celles-ci ont quitté samedi matin Kikwit, à 500 km à l’est, conquise cette semaine, et se dirigeaient sur Kinshasa en passant par Kengé, désertée il y a deux jours par les soldats gouvernementaux. Dimanche, il était impossible d’obtenir des informations précises sur leurs positions.
A l’autre bout du pays, près de Kisangani, environ 100 réfugiés sont morts écrasés et étouffés dimanche soir à bord du train qui devait les ramener du camp de Biaro, quelque 40 km plus au sud, selon le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR). Ils étaient apparemment trop nombreux à vouloir monter dans le convoi.
Selon des témoignages concordants, les quelque 85.000 réfugiés de la région ayant fui leurs camps en avril ont été attaqués par des soldats tutsis de l’Alliance rebelle. «Il y a eu beaucoup, beaucoup de morts. Il y a des trous remplis de cadavres», a accusé un infirmier. Quelque 5.000 réfugiés rwandais hutus ont été rapatriés depuis mercredi.
Trois envoyés de l’ONU chargés d’une enquête sur d’éventuels massacres commis contre les civils par les rebelles dans l’est du Zaïre se trouvaient dimanche à Kigali, et devraient se rendre notamment près de Kisangani.