Albanie : les manifestations se poursuivent

TIRANA, 28 Février (AFP). — Le Parti démocratique (PD) au pouvoir à Tirana a confirmé la candidature de Sali Berisha à un deuxième mandat présidentiel de cinq ans, tandis que se poursuivaient en Albanie des manifestations antigouvernementales.
Quatre-vingt cinq membres du Conseil national (direction élargie) du PD ont voté pour la candidature de M. Berisha et cinq se sont abstenus, ont indiqué à l’AFP des membres de cette instance qui compte 104 membres et dont 90 ont assisté à la réunion.
M. Berisha, 52 ans, a été élu chef de l’Etat le 9 avril 1992 par le Parlement et son mandat expire le 9 mars prochain.
L’opposition, réunie au sein du Forum pour la démocratie, s’est prononcée dans un communiqué contre la candidature de M. Berisha, estimant qu’il avait «violé d’une manière systématique la Constitution et le principe de la séparation des pouvoirs (…) et instauré un diktat présidentiel» en contrôlant la police et les médias.
A Vlora (sud), plus de 20.000 personnes ont manifesté contre le gouvernement, pour le 23e jour consécutif, après une veillée devant l’Université où une quarantaine d’étudiants observent une grève de la faim depuis une semaine.

Ecoles fermées

Les manifestants ont défilé en scandant des slogans hostiles au président Berisha et à son gouvernement, jugés responsables de la faillite de la société financière spéculative Gjallica qui a ruiné des milliers de familles.
Quelque 6.000 habitants de Vlora, dont beaucoup étaient armés de fusils et de pistolets, avaient passé la nuit devant l’Université à la suite d’une rumeur selon laquelle des policiers seraient arrivés de Tirana pour évacuer de force les grévistes de la faim.
«A bas Berisha», «Vlora nous appartient» criaient les manifestants en tirant des coups de feu en l’air. Assis devant des feux allumés sur la place de l’Université, les manifestants ont chanté des refrains patriotiques et fait brûler des cierges, en l’absence de toute force de police.
Les étudiants réclament le remboursement des épargnants ruinés, la démission du gouvernement et la mise en place d’un gouvernement technique capable de résoudre la crise économique.
Dix-sept des étudiants qui avaient entamé ce jeûne de protestation ont dû l’interrompre ces derniers jours et sept d’entre eux sont toujours hospitalisés, a indiqué le directeur de l’hôpital local, Servet Kojdeli.
En outre, tous les magasins et les écoles de Vlora étaient fermés. A l’entrée de la ville, un barrage routier avait été dressé par plusieurs centaines de manifestants qui inspectaient les véhicules en provenance de Tirana.
Dans la capitale, une manifestation, convoquée par le Parti socialiste (PS, ex-communiste), a été interdite par la police. La quasi-totalité des 11.000 étudiants de Tirana étaient en grève. Ils ont tenté de manifester leur soutien aux grévistes de la faim de Vlora, mais la police les a dispersés sans brutalités.
Des petits groupes d’étudiants auxquels s’étaient joints des lycéens ont défilé dans la ville en scandant «Vlora, Vlora» et «A bas le gouvernement» et en menaçant d’entamer à leur tour une grève de la faim si le gouvernement ne démissionnait pas.
Les jeunes réclament aussi la «dépolitisation» de la télévision d’Etat, qu’ils accusent de partialité dans la couverture de la crise qui secoue l’Albanie depuis un mois et demi à la suite de la faillite de plusieurs sociétés financières.
En signe de solidarité avec les habitants de Vlora, plusieurs centaines de personnes ont bloqué jeudi la route reliant Gjirokaster (sud) à Tirana, à hauteur de Memaliajt (185 kilomètres au sud de Tirana).