PARIS, 20 Février (AFP). — La communauté internationale a rendu hommage au patriarche chinois Deng Xiaoping, décédé mercredi à Pékin à l’âge de 92 ans, pour son rôle dans l’ouverture et la modernisation de la Chine, alors que quelques voix se sont élevées pour dénoncer le régime totalitaire et les violations des droits de l’homme en Chine.
Le président américain Bill Clinton a salué en M. Deng «une figure extraordinaire sur la scène internationale».
Selon un haut responsable américain ayant requis l’anonymat, la mort de Deng Xiaoping aura peu de conséquences sur les relations entre la Chine et les Etats-Unis.
Le chef de la diplomatie britannique Malcolm Rifkind, tout en suggérant que la Chine pourrait «connaître une courte période d’incertitude, le temps qu’émerge une nouvelle direction», a formulé l’espoir qu’«une fois celle-ci consolidée, les réformes politiques et économiques reprendraient».
Il a en particulier rappelé «la contribution de Deng à la cruciale» phase des négociations qui a abouti à la déclaration conjointe sino-britannique sur Hong Kong, ouvrant la voie à la rétrocession de la colonie à la Chine.
Le président français Jacques Chirac a pour sa part rendu hommage à celui qui «restera dans les mémoires comme l’une des plus grandes figures de l’histoire de la Chine». «Il s’est imposé par son pragmatisme et sa vision de l’avenir qui lui ont permis d’engager votre pays de façon irréversible sur la voie de l’ouverture et des réformes», écrit-il dans un message adressé au président chinois Jiang Zemin.
Architecte de la
modernisation

Le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, a estimé que la communauté internationale se souviendra de lui comme du «principal architecte» de la modernisation de la Chine et de réformes économiques spectaculaires.

Le premier ministre canadien Jean Chrétien a lui aussi souligné l’«orientation nouvelle» donnée par Deng à son pays, «qui n’est pas complètement satisfaisante pour le monde occidental, mais qui a ouvert la Chine vers le monde».

Le gouvernement portugais a souligné le rôle joué par M. Deng «dans le développement des relations constructives entre la Chine et le Portugal, notamment dans la question de Macao», l’enclave portugaise qui doit retourner fin 1999 sous la souveraineté de Pékin.

Le gouverneur de Hong Kong, Chris Patten, a exprimé ses regrets après le décès de Deng Xiaoping, lui rendant hommage pour avoir jeté les bases de la prospérité de la colonie britannique qui sera rétrocédée à la Chine le 1er juillet prochain.

L’ancien président soviétique Mikhaël Gorbatchev a rendu hommage mercredi à Deng Xiaoping, «le père des réformes chinoises» qui a réussi à ne pas être «pétrifié par les dogmes». «Il a ouvert une nouvelle ère dans le développement de ce vaste pays», a-t-il estimé.

L’ancien président américain Jimmy Carter a fait part de sa «tristesse» devant la mort de Deng Xiaoping, estimant qu’il était un «négociateur respectable». «La Chine, les Etats-Unis et le reste du monde ont profité de la prévoyance de Deng, et nous lui devons de la gratitude», a souligné notamment Jimmy Carter qui l’avait reçu à la Maison-Blanche en 1979, alors que la Chine et les Etats-Unis procédaient à la normalisation de leurs relations.

Des voix discordantes

Le premier ministre japonais Ryutaro Hashimoto a souligné le rôle important joué par Deng Xiaoping dans le développement des relations d’amitié entre la Chine et le Japon. «De bonnes relations entre la Chine et le Japon sont importantes pour la région Asie-Pacifique et le monde», a ajouté M. Hashimoto.

Le président de la Corée du Sud, Kim Young-Sam, a adressé jeudi un message de condoléances à son homologue chinois Jiang Zemin dans lequel il indique que Deng «n’a pas été seulement un éminent dirigeant qui a apporté beaucoup de changements et d’espoir, mais un dirigeant historique qui a ouvert un nouveau chapitre dans l’histoire mondiale».

Quelques réactions discordantes sont néanmoins venues troubler l’hommage de la communauté internationale à Deng.

Les autorités de Taïwan, l’île nationaliste que la Chine considère comme une province rebelle, ont annoncé qu’elles surveillaient de près les mouvements de l’armée chinoise, et lancé un «appel au calme» à la population.

Le dissident Harry Wu, citoyen américain depuis 1994, a estimé que Deng Xiaoping était «un boucher» qui a ordonné l’arrestation de dizaines d’opposants et qui se servait de l’argent des pays occidentaux pour mieux asseoir le régime totalitaire en Chine.

L’association de défense des droits de l’homme en Chine, Human Rights in China, a appelé les autorités chinoises à prendre un nouveau départ et «à corriger les erreurs du passé» à l’occasion de la mort de Deng Xiaoping en graciant les milliers de prisonniers politiques.