Édito édito

L’Honneur des écrivains


Sous l’Occupation nazie, en 1943, les éditions de Minuit publièrent et distribuèrent sous le manteau un recueil intitulé L’Honneur des poètes, regroupant les poèmes de plusieurs écrivains engagés épris de liberté, comme Paul Éluard, Pierre Seghers, Jean Lescure, Eugène Guillevic, Francis Ponge, Louis Aragon ou Robert Desnos – qui fut déporté par l’occupant et mourut dans un camp de concentration.

Aujourd’hui, quelque 380 écrivains du Royaume-Uni et d’Irlande, dont Jonathan Coe, Zadie Smith, Ian McEwan et Irvine Welsh, appellent à qualifier de « génocide » la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza.

Cette tribune courageuse fait suite à une pétition similaire publiée dans Libération le 26 mai par quelque 300 écrivains francophones, dont les prix Nobel de littérature Patrick Modiano, J. M. G. Le Clézio et Annie Ernaux, où l’on peut lire le passage suivant : « Tout comme il était urgent de qualifier les crimes commis contre des civils le 7 octobre 2023 de crimes de guerre et contre l’humanité, il faut aujourd’hui nommer le génocide… Plus que jamais, exigeons que soient imposées des sanctions à l’État d’Israël, demandons un cessez-le-feu immédiat – qui garantisse la sécurité et la justice pour les Palestiniens, la libération des otages israéliens, celle des milliers de prisonniers palestiniens détenus arbitrairement dans les prisons israéliennes, et qui mette un terme, sans délai, à ce génocide… »

Cette double initiative mérite d’être saluée parce qu’elle représente une prise de conscience – certes tardive – de l’ampleur de la catastrophe subie par Gaza dont la population, soumise à des bombardements incessants, est affamée et assoiffée par l’assiégeant israélien, et un cri de colère face à l’impunité d’un État qui, comme l’affirme l’écrivain Jean Hatzfeld, a renoncé « au devoir d’éthique » qui incombe « aux descendants de la Shoah ». Elle nous rappelle aussi qu’il existe bien une « responsabilité de l’écrivain » selon la formule de Sartre et que l’intellectuel se doit d’être une sentinelle qui sonne le tocsin, lorsque l’humanité est en danger et que les valeurs humaines sont en jeu. Réclamer que cette boucherie cesse n’est pas un acte « antisémite », et appeler les démocraties à infliger des sanctions au boucher ne signifie nullement cautionner l’innommable massacre de civils lâchement commis par le Hamas le 7 octobre 2023.

« Israël exagère ! », répétait à Malraux le général de Gaulle qui décréta un embargo sur les armes destinées à l’État hébreu à la suite de l’attaque israélienne contre des avions civils survenue en 1968 sur le tarmac de l’aéroport international de Beyrouth. Cette « exagération » est désormais un euphémisme. Israël n’exagère pas : il génocide.

Sous l’Occupation nazie, en 1943, les éditions de Minuit publièrent et distribuèrent sous le manteau un recueil intitulé L’Honneur des poètes, regroupant les poèmes de plusieurs écrivains engagés épris de liberté, comme Paul Éluard, Pierre Seghers, Jean Lescure, Eugène Guillevic, Francis Ponge, Louis Aragon ou Robert Desnos – qui fut déporté par l’occupant et mourut dans un camp de concentration.Aujourd’hui, quelque 380 écrivains du Royaume-Uni et d’Irlande, dont Jonathan Coe, Zadie Smith, Ian McEwan et Irvine Welsh, appellent à qualifier de « génocide » la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza.Cette tribune courageuse fait suite à une pétition similaire publiée dans Libération le 26 mai par quelque 300 écrivains francophones, dont les prix Nobel de littérature Patrick Modiano, J. M. G....
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