Un homme armé dans le parking de l'hôpital gouvernemental Abdallah el-Rassi à Halba, dans le Akkar au Liban-Nord, le 23 mars 2025. Photo transmise à notre correspondant Michel Hallak
Un groupe d'individus a agressé un médecin et ouvert le feu dimanche sur l'hôpital gouvernemental Abdallah el-Rassi à Halba, dans le Akkar au Liban-Nord, sans faire de victimes a priori, selon des informations du corps médical et de patients parvenus à notre correspondant local, Michel Hallak.
L'agression a visé, à l'intérieur de l'établissement, un chirurgien qui a refusé d'opérer un patient en l'absence de radiographie, insistant sur le respect des procédures médicales. Les agresseurs, dont l'identité n'a toujours pas été révélée, ont ensuite ouvert le feu sur plusieurs étages de l'hôpital, y compris en direction du bloc opératoire. L'état du médecin agressé reste pour l'heure inconnu.
En soirée, la famille Hajj a diffusé un communiqué relayé par notre correspondant, dans lequel elle indique que « la direction de l’hôpital a refusé d’admettre la blessée (l’épouse de l’oncle maternel des tireurs), qui baignait dans son sang après avoir été victime d’un incident, sauf après le paiement d’une somme d’argent ».
« La peur pour la vie de la blessée, l’état de nervosité et l’incapacité de certains membres de notre famille à supporter l’idée de perdre un être cher pour des raisons purement financières les ont poussés à agir ainsi », poursuit la famille, tout en « condamnant cet acte inconsidéré ». « Nous ne sommes ni des partisans du port d’armes ni de l’usage des armes à feu », précise-t-elle, ajoutant que « toute erreur mérite une sanction et que la loi est au-dessus de tous ».
Condamnation du ministère libanais de la Santé
Commentant cette agression, le ministère de la Santé a indiqué que les services de sécurité sont intervenus « rapidement » pour contenir la fusillade. Il a condamné « dans les termes les plus forts les attaques violentes contre un hôpital public et l'un de ses médecins », dans un communiqué transmis à notre correspondant. Le ministère a par la suite exigé que des peines maximales soient « imposées aux agresseurs », afin de garantir que de telles violations ne se reproduisent pas et de réaffirmer son « rejet de toute agression ou violation du caractère sacré des hôpitaux et des établissements de santé, en toutes circonstances ».
Le personnel médical, sanitaire et administratif de l'hôpital al-Habtoor à Harar, dans le Akkar, a de son côté organisé un sit-in de solidarité en soutien à leurs collègues, pour condamner l'attaque « odieuse » contre l'hôpital gouvernemental voisin, qui constitue une « menace directe pour la vie des patients et du personnel de l'établissement ». Dans une déclaration commune, le corps médical de l'hôpital al-Habtoor a, entre autres, insisté sur la nécessité d'assurer une protection permanente des hôpitaux afin qu'ils puissent accomplir leur mission humanitaire à l'abri de toute menace ou pression. Le texte rappelle également que les hôpitaux doivent demeurer des « refuges sûrs pour les patients ».
En 2021, après une série d'agressions de médecins et personnel médical dans différentes régions du Liban, notamment liées à la crise socio-économique, le Parlement libanais avait adopté une loi visant à protéger les médecins. Ce texte prévoit des peines allant jusqu'à six mois de prison ferme et le paiement d'une amende pour toute personne reconnue coupable d'avoir perpétré une telle agression.
Tournée de Nawaf Salam mardi au Liban-Nord
L'agression dans l'hôpital Abdallah el-Rassi fait suite à un autre incident survenu plus tôt dans la journée de dimanche concernant un problème de priorité de passage à Mouhammara, à l'entrée sud du Akkar, entre des groupes de jeunes hommes originaires de Bebnine et Mouhammara, selon notre correspondant ayant rassemblé les témoignages des personnes présentes durant les faits. La querelle a rapidement dégénéré en une bagarre musclée, suivie de tirs qui ont touché une voiture transportant une famille. Deux personnes ont été blessées, une femme et un enfant, qui ont tous deux été transférés d'urgence à l'hôpital gouvernemental Abdallah el-Rassi. L'état de la première était jugé critique.
Le Liban-Nord est régulièrement témoin d'affrontements ou de violences, notamment liés aux nouveaux développements en Syrie depuis la chute du régime Assad ou à des disputes familiales. Face à ces tensions, le nouveau ministre libanais de l'Intérieur, les forces de sécurité et les autorités locales ont mis en place un énième plan de sécurité pour la ville, coïncidant avec le début du mois de ramadan, sans toutefois parvenir à empêcher les fusillades mortelles.
Le Premier ministre libanais, Nawaf Salam, doit dans ce contexte présider demain mardi deux réunions sécuritaires, à Tripoli et dans le Akkar, lors d'une tournée au Liban-Nord.
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