Après seize mois de captivité dans la bande de Gaza, il trouve la force de courir comme un enfant vers ses filles pour des retrouvailles entre rires et larmes à l'hôpital Ichilov de Tel-Aviv. Et de faire de l'humour.
"Aba, chaïm chéli ("Papa, ma vie")... c'est vraiment toi ?" demande une de ses filles, les yeux écarquillés. "Je n'arrive pas à croire que tu es là".
"Oui, je suis là", répond Ohad Ben Ami. "Vous avez vu ? Je suis parti XXL et je reviens Medium", ajoute-t-il, en desserrant ses bras de l'étreinte collective pour montrer son ventre amaigri et sa silhouette transformée par la captivité.
Les retrouvailles se déroulent loin des regards des médias: seules filtreront les images diffusées par le gouvernement israélien.
Elles contrastent avec celles tournées le matin à Deir el-Balah, dans le centre de la bande de Gaza. Ohad Ben Ami, 56 ans, otage israélo-allemand, le visage grave et émacié, courte barbe blanche, avait été exhibé sur une estrade par des combattants du Hamas.
A ses côtés, deux autres otages aussi pâles que lui, Eli Sharabi, 52 ans, et Or Levy, 34 ans, tous libérés dans le cadre d'un nouvel échange de prisonniers entre Israël et le Hamas.
Le quinquagénaire a d'abord retrouvé sa femme, Raz Ben Ami, sur une base militaire.
Débarrassé de son tee-shirt de captif barré de l'inscription "prisonnier du Hamas", rasé de près, il est déjà revenu à la vie lorsqu'il franchit, sourire émerveillé et incrédule, la porte de la salle où l'attendent ses trois filles et sa mère.
On passe des rires aux larmes à tout moment. De la mêlée fuse un "quel beau gosse tu es !"
Puis vient le temps de rattraper toutes ces heures et ces jours perdus. L'otage de retour apprend que l'une de ses filles fait son service militaire. "Je suis fier de toi", lui répète-t-il.
- "Besoin de réponses" -
"J'ai besoin de rattraper tout ce qu'on a manqué en cuisine" en captivité sourit-il. Plus grave, il évoque "le tunnel" dans lequel il était enfermé.
"J'ai des millions de choses en suspens et j'ai besoin de réponses. Beaucoup, beaucoup de réponses. Et je sais que certaines seront très dures à entendre" mais "je dois savoir ce qui s'est passé ce jour-là".
Physiquement aussi, il lui faudra se battre pour retrouver un état de santé décent.
"Ohad est revenu dans un état de détresse nutritionnelle et a perdu beaucoup de masse corporelle" mais "son esprit a du ressort et il est source d'inspiration", a déclaré à la presse Gil Fire, directeur adjoint de l'hôpital Ichilov.
Lui et sa femme ont été enlevés le 7 octobre 2023 au kibboutz Beeri, en lisière de la bande de Gaza, lors de l'attaque du Hamas ayant déclenché la guerre.
Deux de leurs filles qui étaient avec eux ce jour-là ont réchappé à l'attaque. Mme Ben Ami avait été libérée le 29 novembre 2023 pendant la première trêve de la guerre.
Eli Sharabi, du même kibboutz, n'a pas eu cette chance. Sa femme et ses deux filles ont été tuées dans l'attaque et il semble très vraisemblable qu'il l'ignorait au moment de sa libération.
Portant un drapeau israélien comme une cape, il a été accueilli dans une scène de pleurs à l'hôpital Sheba de Ramat Gan par ses deux soeurs et son frère, la tête couverte d'un "talith", le châle de prière juif, selon les images diffusées par le gouvernement.
Les retrouvailles d'Or Levy, manifestement éprouvé, avec sa famille ont été elles aussi sobres, marquées par quelques youyous, de longues accolades et des pleurs.
Parti danser avec sa femme Einav Levy au festival Nova, lieu du pire massacre commis le 7 octobre 2023, il a été pris en otage alors qu'elle était tuée.
myl-mj/dla/sg
© Agence France-Presse
"Aba, chaïm chéli ("Papa, ma vie")... c'est vraiment toi ?" demande une de ses filles, les yeux écarquillés. "Je n'arrive pas à...
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