
Des combattants syriens anti-gouvernementaux applaudissent alors qu'ils conduisent un véhicule militaire dans les rues de la ville de Hama, dans le centre-ouest, le 5 décembre 2024. Photo AFP
Le chef des rebelles islamistes en Syrie a affirmé que l'« objectif » de leur offensive fulgurante dans le pays était de « renverser » le régime du président Bachar el-Assad.
« Lorsque nous parlons d'objectifs, le but de la révolution, c'est de renverser ce régime. Nous avons le droit d'utiliser tous les moyens nécessaires pour atteindre cet objectif », a déclaré Abou Mohammad al-Jolani, qui dirige le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Cham (HTC), à CNN, dans une interview publiée vendredi. « Je pense que dès que ce régime tombera, la question sera résolue et il n'y aura plus besoin que des forces étrangères restent en Syrie », a-t-il assuré, estimant que le pays « mérite un système de gouvernance institutionnel, et non un système où un seul dirigeant prend des décisions arbitraires ».
Le régime Assad « est mort »
Le chef islamiste a ajouté que son projet est « plus large », il s'agit de « reconstruire la Syrie » et son groupe, Hay'at Tahrir al-Cham « n'est qu'une partie de ce dialogue, et elle peut se dissoudre à tout moment. Ce n'est pas un but en soi, mais un moyen d'accomplir une tâche : affronter ce régime. » Il a encore affirmé que le régime Assad est « mort », malgré des tentatives des Iraniens et des Russes de « lui acheter du temps ».
Alors que les rebelles ont désormais pris Hama et avancent sur Homs, le chef des rebelles islamistes a refusé de se montrer « trop optimiste pendant les combats. » « Je préfère être prudent et vigilant, pour éviter la complaisance, et faire en sorte de ne pas subir nous-mêmes des pertes en pensant que nous sommes en sécurité », a-t-il ajouté au micro de CNN, estimant que l'avancée rapide des rebelles a été permise par « l'évolution » de la révolution « d'un état de chaos à un certain ordre civil et institutionnel, ainsi que par les opérations militaires ».
Respect des minorités
Concernant l'imposition de « strictes règles islamiques » dans les zones sous son contrôle et les craintes que provoquent HTC, Jolani a affirmé que « les personnes qui craignent la gouvernance islamique en ont soit vu des mises en œuvre incorrectes, soit ne la comprennent pas correctement ». « On parle d’un projet en lien avec les traditions et la nature même de la région. » Revenant également sur la question du respect des minorités, il a déclaré que « personne n’a le droit d’éliminer un autre groupe ». « Les différentes confessions ont cohabité dans cette région pendant des centaines d’années, et personne n’a le droit de les éliminer. Il doit y avoir un cadre légal qui protège et assure la sécurité de tous, pas un système qui ne protège qu’une secte, comme le régime Assad l’a fait » avec les alaouites.
Abou Mohammad al-Jolani a en outre critiqué la classification de HTC comme « groupe terroriste », estimant qu'elle est « autant politique qu’erronée ». « Je définis un terroriste comme quelqu’un qui intentionnellement tue des civils, nuit à des civils, ou déplace sa population. Le régime lui-même est coupable de telles actions. »
Désaccords avec l'EI
Concernant sa transformation et celle de HTC, il a déclaré que « chaque personne dans sa vie passe par des phases et différentes expériences », qui lui font prendre conscience de plus de choses. « Il est nécessaire de s’adapter à la réalité : quelqu’un accroché à ses principes et idées sans faire preuve de flexibilité ne peut diriger de manière efficace des sociétés ou surmonter des conflits comme celui en Syrie », a-t-il affirmé. Revenant encore sur son histoire et son implication au sein d'el-Qaëda pendant la guerre d'Irak, où il a combattu contre les forces américaines, le chef rebelle a affirmé qu'il s'était rendu en Irak « pour défendre le peuple irakien ». « Lorsque je suis rentré en Syrie, je ne voulais pas apporter avec moi ce qu'il s'était passé là-bas et c'est pourquoi il y a eu des désaccords entre nous et l'État islamique », a-t-il précisé.
Retour des déplacés et démantèlement des camps
Il a ajouté que l'offensive actuelle en Syrie est « importante pour le monde entier », ce qui l'a poussé à donner cet entretien à CNN. « Il y aura des répercussions positives globales, parce que sous le régime actuel la Syrie est devenue une source d’inquiétude et de problèmes pour tous ».
« Stabiliser la Syrie va permettre le retour de nombreuses personnes » dans le pays, ainsi qu'un démantèlement progressif des camps de déplacés, selon lui. « Avec la réhabilitation des territoires libérés, les personnes vont retourner à leurs foyers, de nombreux réfugiés en Turquie vont probablement revenir, ainsi qu’un nombre significatif de réfugiés au Liban et en Jordanie. Même les réfugiés en Europe pourraient bien revenir pour reconstruire leur pays », a-t-il lancé.
Tous mes vœux pour un nouveau pouvoir en Syrie protégeant toutes les minorités. La sympathie du monde entier ( ou presque) lui serait assurée.
23 h 24, le 06 décembre 2024