Après l’incendie survenu dans la décharge de Bourj Hammoud-Jdeidé le 12 septembre, un collectif composé de douze avocats a présenté le 15 septembre devant le Conseil des droits de l’homme – organe intergouvernemental des Nations unies – une plainte contre l’État libanais pour « crimes environnementaux contre le peuple libanais ».
Dans leur plainte, les avocats ont indiqué que ce site côtier de déchets situé au nord de Beyrouth se trouve dans « une zone densément peuplée et renfermant un grand nombre d’usines et de réservoirs de carburant ». Selon les plaignants, l’incendie a généré « des fumées toxiques provenant de substances dangereuses, tels du méthane et des dioxines, produites par la combustion de matières organiques et non organiques, comme le plastique ». « D’où une grave catastrophe environnementale », ont-ils relevé, ajoutant que « d’énormes quantités d’ordures non traitées et non triées ont été accumulées (dans la décharge) » dans un contexte de « négligence intentionnelle et persistante ».
Créée en 2016, la décharge de Bourj Hammoud-Jdeidé contient des déchets dont le traitement et le tri avaient été confié par l’État à une entreprise privée, à la suite d'un appel d’offres. Prévue pour quatre ans, sa durée de vie avait été prorogée jusqu’en 2026. L’enquête n’a pas encore montré si l'incendie de jeudi dernier est d’origine criminelle ou accidentelle.
Les douze avocats ont assorti leur plainte de documents, dont des rapports de Human Rights Watch (HRW) et de Greenpeace. Au lendemain de la catastrophe, la responsable de campagne de Greenpeace au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA) Farah Hattab avait affirmé que l'incendie « conduit à une dégradation environnementale et constitue de graves menaces sanitaires », estimant que « le Liban ne peut plus compter sur des solutions provisoires, mais sur des solutions efficaces, urgentes et durables, pour régler la crise des déchets (…) ». HRW avait pour sa part mis en garde, dès 2019, contre la saturation de la décharge de Bourj-Hammoud-Jdeidé, mettant l’accent sur des maladies contractées par des habitants de la région, dont la multiplication peut être causée par « l’absence d’application d’une stratégie gouvernementale de gestion des déchets ».
Accentuer la pression
Interrogé par L’Orient-Le Jour, Me Pascal Daher, docteur en droit public, qui a été chargé de présenter la plainte, affirme que ses confrères et lui-même ont bien qualité à s’adresser à l’instance onusienne. « L’environnement durable fait partie des droits de l’homme », indique-t-il, soulignant que « toute atteinte à ce droit peut faire l’objet d’une plainte d’un citoyen d’un État signataire de la Convention internationale des droits de l’homme (1977), en vertu d’un pouvoir de l’accepter, confié au Conseil des droits de l’homme par l’Assemblée générale des Nations unies ».
Me Daher précise toutefois que le Conseil n’est pas « une juridiction », mais « un organe voué à contrôler le respect des droits humains ». Il indique avoir complété, sur le site des Nations unies, toute la procédure requise pour la requête. Et de souligner que, selon la règle, celle-ci devrait être incessamment transférée à une commission qui serait chargée de l’examiner, de mener une enquête, contacter les plaignants pour plus d’informations et s’adresser à l’État pour lui demander de répondre aux requérants via la commission onusienne. En se basant sur les résultats de son action, le Conseil des droits de l’homme aura à fournir à l’État libanais ainsi qu’à l’Assemblée générale et au secrétaire général de l’ONU des « recommandations ». Me Daher affirme qu’avec ses confrères, il a demandé à l’instance internationale d’exhorter l’État à « fermer la décharge de Bourj Hammoud et à prendre des mesures de nature à faire cesser la pollution des eaux souterraines et de la mer Méditerranée, conformément à la Convention de Barcelone (1976) à laquelle le Liban a adhéré ». « Ces recommandations permettront de faire pression au Liban sur les hommes politiques, les législateurs et les tribunaux », espère l’avocat plaignant.
Les avocats ont tout à fait raison. Les feux de décharge dégagent des dioxines et des furanes qui sont hautement toxiques et causent des cancers. Ces gaz peuvent etre portés à plusieurs kilomètres et atteindre Beyrouth. Bien entendu la clique au pouvoir n'en a cure. La question des déchets est pour elle un moyen comme un autre de s'enrichir
09 h 39, le 17 septembre 2024