Hassan Merheb a-t-il été réellement empêché de prononcer son prêche du vendredi par Dar el-Fatwa ? Ce n'est pas le cas, selon l'instance sunnite. « Il a simplement été transféré auprès d’une autre mosquée, la mosquée des Martyrs, toujours à Tarik Jdidé, dans le cadre d’une procédure habituelle de transfert prise par la plus haute autorité religieuse sunnite du Liban à l’égard de ses imams », déclare à L’Orient-Le Jour une source proche de Dar el-Fatwa. Toujours selon cette source, le cheikh Merheb n’a pas été sanctionné, juste transféré.
Un ancien cheikh de Dar el-Fatwa a estimé de son côté que l'instance religieuse a pris une mesure temporaire concernant Hassan Merheb, qui ne devrait « pas aller plus loin » et le religieux devrait probablement reprendre dès la semaine prochaine ses prêches. Selon lui, il s'agit d'une mesure prise pour contenter la communauté sunnite, très critique envers ce cheikh.
« Chef de la rue sunnite »
Connu pour ses positions politiques véhémentes, le religieux, suivi par plus de 44 500 abonnés sur le réseau X, avait récemment attaqué verbalement le parti des Forces libanaises et son chef, Samir Geagea, lors de l'un de ses prêches. Cette attaque contre le parti chrétien, qui se positionne ouvertement contre l’arsenal du Hezbollah et la guerre menée par le parti chiite au Liban-Sud contre Israël, serait à l’origine de la mesure prise par Dar el-Fatwa, expliquait la chaîne al-Jadeed mardi soir. Dans une émission de la chaîne diffusée la veille, le cheikh avait accusé le chef des FL de chercher à entraîner la communauté sunnite dans sa « lutte » contre les chiites, alors que les différentes communautés devraient « s'unir contre l'ennemi israélien ». Il avait reproché au chef des FL de vouloir se poser en « chef de la rue sunnite » et indiqué avoir reçu des « menaces » anonymes, provenant, selon lui, de partisans de M. Geagea.
« Ils complotèrent... »
L'Orient-Le Jour a tenté de contacter le cheikh Merheb, sans succès. Sur le réseau X, il a uniquement publié mardi un verset du Coran, tiré de la sourate 8 « al-Anfal » (le butin) : « Et (rappelle-toi) le moment où les mécréants complotaient contre toi pour t’emprisonner ou t’assassiner ou te bannir. Ils complotèrent, mais Allah fit échouer leur complot, et Allah est le meilleur en stratagèmes. »
Des propos, parmi d'autres, qui ont provoqué une série de commentaires sur les réseaux sociaux. Si certains reprochaient au religieux d'avoir critiqué Samir Geagea, d'autres lui ont au contraire exprimé leur solidarité. Une source au sein du parti chrétien a de son côté indiqué à L'Orient-Le Jour « respecter Dar el-Fatwa », et ne pas vouloir commenter les propos de Hassan Merheb « qui est connu pour ses positions pro-Hezbollah ».
Ce n'est pas la première fois que les propos du cheikh Merheb créent la controverse. En mai 2022, il s’était lancé dans une violente diatribe contre trois nouveaux élus sunnites issus de la contestation du 17 octobre, Halimé Kaakour, Ibrahim Mneimné et Waddah Sadek, qui avaient marqué leur approbation sur l’instauration du mariage civil, toujours pas autorisé au Liban. Le religieux avait même appelé « les croyants à leur cracher à la figure » si ces députés ne revenaient pas sur leurs positions concernant le mariage civil.
Chassez le naturel, ils reviennent au galop. La guerre des années 70 nous a montré à quel point tous ces gens sont patriotes. Il suffit qu’un des leurs déclare la guerre à leur pays pour qu’ils se rangent derrière lui en oubliant leur patrie et le pays qui leur a tout donné. Ils recommenceront sans vergogne, et les drames vécus ne leur ont pas servi de leçon.
12 h 21, le 30 mai 2024