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L'Assemblée débute l'examen d'une loi sur l'aide à mourir

Le texte sur la fin de vie sera étudiée à l’Assemblée nationale à partir de lundi. Photo STEPHANE DE SAKUTIN/AFP

"Boîte de Pandore" pour les uns, loi nécessaire pour abréger la souffrance des malades pour d'autres: les députés français entament lundi l'étude d'un texte sur la fin de vie qui entend ouvrir la possibilité pour certains patients d'une "aide à mourir".

La grande réforme sociétale voulue par Emmanuel Macron pour son deuxième quinquennat, sur une thématique tristement familière à un grand nombre d'électeurs, s'annonce comme un marathon passionnel qui pourrait rapprocher la France d'autres pays voisins européens, où cette aide est autorisée.

Le gouvernement a écarté toute procédure accélérée de la loi. L'examen du texte pourrait durer jusqu'à l'été 2025, voire plus. Il divise tant le pays, même si la majorité des Français se dit largement favorable à la loi, que le coeur de l'hémicyle. "Moi, j'ai aidé ma mère à mourir, elle s'est suicidée et j'étais présente. Qui serais-je pour lui interdire ce geste?", s'interrogeait en avril la députée écologiste Sandrine Rousseau. "La question n'est pas tant le rapport à la mort, que le rapport à la souffrance dans cette mort." La parlementaire a expliqué que sa mère, atteinte d'un cancer en phase terminale, avait choisi de mettre fin à ses jours en prenant des médicaments.

A droite, le député Philippe Juvin, anesthésiste-réanimateur de profession, est opposé à l'évolution de la loi actuelle, qui ne permet actuellement que la sédation profonde pour les agonisants. Il confie avoir "pratiqué" cette dernière sur son père. "Je n'ai pas tué mon père, je l'ai aidé. La différence est fondamentale", a-t-il justifié.

Le texte "relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie", promesse de campagne souvent repoussée du candidat Macron, devrait obtenir le soutien de la majeure partie de la gauche et du camp présidentiel. Mais certains députés de gauche, du centre ou de la majorité ont fait connaître leur opposition personnelle à la loi, à l'instar d'élus de droite ou d'extrême droite. Tel le communiste André Chassaigne, dont le frère, souffrant d'un cancer du pancréas, a mis fin à ses jours après de années de chimiothérapie, mais qui ne souhaite pas soutenir un texte qui autoriserait à "donner la mort".

'Equilibre'

"Cela ouvre la porte à des avancées successives qui pourraient, à terme, pousser des personnes qui culpabilisent de vieillir ou de coûter cher à leurs enfants à vouloir en finir", argumente-t-il lundi dans Le Figaro. Une position faisant écho à celle de nombreux dignitaires religieux en France qui, interrogés par l'AFP en mars, redoutaient que ne soit ouverte une "boîte de Pandore" élargissant les critères d'accès au suicide assisté et l'euthanasie.

Les débats mêleront donc l'intime à la technicité juridique. Les parlementaires s'opposent d'ores et déjà sur le critère d'éligibilité à la loi, dont l'exécutif voulait qu'elle soit accessible aux seuls majeurs atteints d'une "affection grave et incurable engageant son pronostic vital à court ou moyen terme", aptes à manifester leur volonté de manière libre et éclairée et présentant une souffrance réfractaire aux traitements ou insupportable.

Les députés ont supprimé en commission spéciale la mention du "pronostic vital engagé à court ou moyen terme", lui préférant la notion d'affection "en phase avancée ou terminale" qui, parce qu'elle élargit le nombre de bénéficiaires, menace "l'équilibre" du texte, selon le gouvernement. "L'aide à mourir" rapprocherait la France de voisins européens où le suicide assisté - quand un patient prend lui-même un produit prescrit pour donner la mort - ou l'euthanasie (lorsque la mort est provoquée par un soignant à la demande d'un malade) sont permis. Pays-Bas et Belgique furent en 2002 les deux premiers pays européens à autoriser l'euthanasie. Le Luxembourg a dépénalisé euthanasie et suicide assisté en 2009.

Plus récemment, l'Espagne a adopté en 2021 une loi permettant euthanasie et suicide médicalement assisté pour toute personne ayant "une maladie grave et incurable" ou des douleurs "chroniques la plaçant dans une situation d'incapacité" et qui souhaite s'éviter "une souffrance intolérable". En 2023, une loi encadrant "la mort médicalement assistée" a été promulguée au Portugal.

La Suisse interdit l'euthanasie active directe mais autorise le suicide assisté, aidé par des organisations d'accompagnement, dont des bénévoles fournissent au patient la substance mortelle, que celui-ci ingère ensuite, sans intervention extérieure.

"Boîte de Pandore" pour les uns, loi nécessaire pour abréger la souffrance des malades pour d'autres: les députés français entament lundi l'étude d'un texte sur la fin de vie qui entend ouvrir la possibilité pour certains patients d'une "aide à mourir".La grande réforme sociétale voulue par Emmanuel Macron pour son deuxième quinquennat, sur une thématique...