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Lifestyle - Patrimoine

Au couvent de Saydeh, un musée révèle des trésors de l'histoire byzantine au Liban

La collection muséale offre une vision de l’art chrétien orthodoxe et témoigne de la vie quotidienne des moniales.

Au couvent de Saydeh, un musée révèle des trésors de l'histoire byzantine au Liban

L’ancienne cellule de la première supérieure du couvent, mère Catherine Karkabi, conservée à l’identique avec son mobilier et ses icônes. Photo DR

Créé à l’initiative de Liliane Chammas et de l’ami des arts et des lettres Robert Alfred Matta, magnifiquement aménagé par l’architecte d’intérieur et scénographe au goût raffiné Jean-Louis Mainguy, un étonnant musée est installé au cœur des cellules des religieuses du monastère orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (église el-Saydé), en contrebas de la place Sassine. Autrefois appelé « La maison des vierges qui ne dorment jamais », car elles se relayaient dans la prière 24 heures sur 24, il prendra son nom actuel (Couvent orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation, Saydé), en 1935.

Un étonnant musée est installé au cœur des cellules des religieuses du monastère orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (église el-Saydé). Photo DR

L’histoire du couvent qui ne compte aujourd’hui que cinq religieuses remonte à 1909. La première mère supérieure des lieux était Catherine Karkabi, qui en 1888, avait choisi de vivre une vie de prière et de contemplation tournée vers Dieu, dans son domicile à Khandak el-Ghamik à Beyrouth. S’étaient jointes à elle d’autres jeunes filles et jeunes femmes, dont Saada Abourrous, épouse d’un bâtisseur du nom de Dimitri Andraos Gholam. L’homme souffrait de douleurs intenses et paralysantes au bras qui le contraignaient au chômage. Son épouse l’emmène voir Catherine Karkabi qui lui enduit le bras d’huile en lui demandant de réciter des prières à la Sainte Vierge. Quelques jours plus tard, voilà le bras de Dimitri guéri. Il décide de rendre grâce à la Vierge en construisant un couvent qui abritera Catherine Karkabi et son « groupe de prière ». Il choisit d’abord de le bâtir à Sioufi où se trouvait uniquement une scierie de bois, « mais la nuit la région était peuplée de meutes de loups », raconte le père Élias Farah qui mène la visite guidée des lieux organisée il y a quelques jours par l’Agenda culturel. Dimitri Andraos Gholam opte alors pour le flanc nord de la colline, à son emplacement actuel. En ce temps-là, la région était un vaste espace vert où poussaient des oliviers, des figuiers et des fleurs. Au fil des ans, de généreux donateurs orthodoxes ont veillé au développement et à l’agrandissement du couvent jusqu’à prendre sa forme actuelle. 

Des collections jalousement préservées

Le musée, auquel on accède de plain-pied par l’église, rassemble plus de 200 objets liturgiques, « témoins d’une vie de ferveur ; très sincèrement j’ai vécu la chose comme une prière », relate Jean-Louis Mainguy. Pour constituer la collection, il dit avoir « cherché dans les fonds des tiroirs et des armoires et découvert au fur et à mesure les trésors jalousement préservés par les religieuses ». Comme ce précieux incunable de la fin du XIVe-début XVe siècle, ou cet Évangile datant de 1735 et portant le cachet d’Anne de Russie, « la nièce de l’empereur Pierre le Grand », tient à souligner père Élias Farah, ajoutant que les liens qui existaient entre la mission russe au Liban et le couvent orthodoxe étaient importants, et les présents offerts par la Russie inestimables. Le trésor agencé avec un esprit créatif par Jean-Louis Mainguy se compose de coupes et de patènes richement décorées, de dizaines d’icônes appartenant à l’École de Jérusalem. Certaines datant de la fin du XVIIIe siècle, d’autres du XIXe. À cela s’ajoutent les manuscrits bibliques, le diaire que tenaient les mères supérieures où sont consignés les événements du couvent et leur relation avec le monde extérieur, notamment avec la Sublime Porte. Six croix pectorales en or serties de pierres précieuses sont venues compléter ce trésor. Elles ont été données par les évêques aux mères supérieures qui se sont succédé. Sous leur portrait en pied, leur nom est accolé à la marque honorifique de « Hajjé », signifiant qu’elles ont accompli le pèlerinage en Terre sainte. Présentés également des œufs d’autruche porteurs d’un fort symbolisme dans la chrétienté. « Fixés au sommet des toits des églises orthodoxes ou suspendus au-dessus des portes, les œufs d’autruche ont une fonction protectrice. Tout comme l'autruche surveille ses œufs, ceux-ci protègent la maison de Dieu », explique le père Farah. Veillant sur l’ensemble de la collection, les portraits du couple fondateur, Dimitri et Saada Abourrous.

Sous les portraits des mères supérieures, leur nom est accolé à la marque honorifique de « Hajjé », désignant qu’elles ont accompli le pèlerinage en Terre sainte. Photo DR

Pour clôturer ce parcours, une pause dans l’ancienne cellule de la première supérieure du couvent, mère Catherine Karkabi, conservée à l’identique avec son mobilier et ses icônes. Décédée en 1915, un cliché de mère Catherine représente sa dépouille mortelle en position assise, afin de symboliser la promesse du Christ faite aux apôtres qu’ils siégeront sur le trône pour juger les douze tribus d’Israël lors du jugement dernier. Elle tient dans sa main un chapelet en or aux graines incomplètes. « Trois ont été vendues lors de la grande famine, en 1914 », relève le père Élias Farah.

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Après l’inéluctable passage d’un siècle, la partie rez-de-jardin, avec ses arcades, sa cuisine voûtée et l’ancien atelier des religieuses Pelagi, qui peignaient des icônes, se trouve aujourd'hui dans un état de vétusté avancée. La restauration des lieux sera le prochain chantier à entreprendre. « Mais cela va être un peu lourd du point de vue financement », observe Jean-Louis Mainguy. Un projet à poursuivre, donc.

Ouvert le jeudi de 16h à 18h. Entrée libre. Pour organiser et réserver des visites de groupe, contacter le 03/211330.

Créé à l’initiative de Liliane Chammas et de l’ami des arts et des lettres Robert Alfred Matta, magnifiquement aménagé par l’architecte d’intérieur et scénographe au goût raffiné Jean-Louis Mainguy, un étonnant musée est installé au cœur des cellules des religieuses du monastère orthodoxe de Notre-Dame de la Présentation (église el-Saydé), en contrebas de la place...

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