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Moyen-Orient - FOCUS

Washington sanctionne deux factions armées proturques en Syrie

Les États-Unis ont engagé des sanctions contre deux groupes armés soutenus par Ankara, accusés de graves violations des droits de l’homme à Afrine.

Washington sanctionne deux factions armées proturques en Syrie

Des combattants soutenus par la Turquie dans la province d'Alep, en Syrie, le 29 décembre 2018. Photo AFP

Le département américain du Trésor a sanctionné jeudi deux milices soutenues par la Turquie ainsi que leurs chefs opérant dans le Nord-Est syrien, notamment dans la ville de Afrine à majorité kurde. La raison évoquée : ces groupes « ont exacerbé les souffrances causées par des années de guerre civile dans le nord de la Syrie et entravé le redressement de la région en se livrant à de graves violations des droits humains contre les populations vulnérables ». Dans le viseur, se trouvent la brigade Suleiman Shah et la division Hamza, qui ont combattu par le passé sous la bannière de l’Armée nationale syrienne, connue au préalable comme l’Armée syrienne libre. De nombreuses factions armées soutenues par Ankara sont en outre pointées du doigt par Washington pour le recrutement continu de combattants, dont certains sont d’anciens membres du groupe État islamique (EI).


Exactions et abus

En juillet 2022, une enquête menée par le Syrian Justice Accountability Centre (SJAC) avait révélé les pratiques criminelles qui permettent au chef de la brigade Suleiman Shah, Mohammad Hussein el-Jassem, aussi appelé Abou Amcha, de générer des revenus supérieurs à 30 millions de dollars par an. Selon l’organisation, en plus de subir des exactions telles que viols, harcèlements ou enlèvements, des habitants de Afrine auraient été forcés par la milice proturque d’abandonner leurs maisons ou de payer d’importantes rançons pour la restitution de leurs biens ou de membres de leur famille.

Un stratagème qui aurait généré des dizaines de millions de dollars par an en paiements de rançons, atteignant chacune entre 1 000 et 25 000 dollars. Selon le SJAC, le chef de milice détiendrait ainsi 65 millions de dollars dans des banques turques. Des révélations qui avaient alors poussé l’organisation à demander au Bureau américain de contrôle des avoirs étrangers du Trésor de sanctionner Abou Amcha. Chose faite ce jeudi, les autorités américaines ayant même ciblé aussi le frère d’Abou Amcha, Walid Hussein el-Jassem. Ce dernier est accusé d’avoir coordonné des enlèvements, des agressions et des rançons en tant que haut responsable de la brigade. En 2020, il aurait en outre tué un prisonnier kurde qui n’était pas en mesure de payer une rançon.

Le Trésor a également placé l’entreprise al-Safir Oto sous sanction. Appartenant à Abou Amcha, ce concessionnaire automobile, basé à Istanbul et dans le sud de la Turquie, lui fournirait un débouché pour investir ses revenus. Abou Amcha et sa brigade s’appuient notamment sur le soutien d’Ankara pour accéder au marché turc. Entre autres, rapporte le SJAC, une juteuse exploitation des terres confisquées à des habitants kurdes de Afrine permet au chef de milice de vendre via des intermédiaires des olives à la coopérative agricole Türkiye Tarım Kredi Kooperatifleri (ACC), placée sous l’autorité du ministère turc de l’Agriculture, selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). L’ACC raffine ensuite l’huile puis la revend aux exportateurs turcs, avant d’être écoulée dans le monde entier sous étiquette turque.

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Anciens combattants de l’EI

Également visée par les sanctions du Trésor, la division Hamza est accusée d’enlèvements, de vols de biens et d’actes de torture. Le groupe gérerait des centres de détention où les victimes sont détenues contre rançon et souvent agressées sexuellement par des combattants. Le Trésor a entre autres placé sur sa liste de sanctions Sayf Boulad Abou Bakr, commandant de la division.

Le 3 août, un rapport publié sur l’opération américaine anti-EI a réitéré les inquiétudes de Washington concernant le « recrutement et le paiement continus de combattants, dont certains étaient d’anciens membres de l’EI », par la plupart des groupes soutenus par Ankara en Syrie. En juillet 2021, l’administration de Joe Biden avait ainsi sanctionné la faction armée syrienne Ahrar ach-Charkiya, citant l’exécution par le groupe, en 2019, de la politicienne kurde Hevrin Khalaf et son recrutement présumé d’anciens membres de l’EI.

Impliquée dans le conflit syrien, la Turquie a soutenu des groupes rebelles contre les forces gouvernementales de Bachar el-Assad, tout en ayant pour objectif de contrer l’autonomisation des zones kurdes. En octobre 2019, l’opération « Source de paix » est lancée par Ankara dans le Nord-Ouest syrien avec l’objectif notamment de créer à sa frontière une zone tampon avec les régions dominées par les forces kurdes soutenues par les Américains dans leur lutte contre l’EI. L’offensive turque déplace des milliers de combattants et habitants kurdes syriens, poussant l’administration de Donald Trump à prendre des mesures commerciales de rétorsion contre la Turquie à cause de son attitude « dangereuse et destructrice ». Ankara continue de soutenir des factions armées syriennes dans le nord du pays en dépit des critiques internationales suscitées par les violations des droits de l’homme et exactions régulièrement commises par leurs combattants contre les populations locales.

Le département américain du Trésor a sanctionné jeudi deux milices soutenues par la Turquie ainsi que leurs chefs opérant dans le Nord-Est syrien, notamment dans la ville de Afrine à majorité kurde. La raison évoquée : ces groupes « ont exacerbé les souffrances causées par des années de guerre civile dans le nord de la Syrie et entravé le redressement de la région en se livrant à...

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Merci d'avoir fait la lumière sur ces milices. M.Z

ZEDANE Mounir

12 h 32, le 19 août 2023

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Commentaires (1)

  • Merci d'avoir fait la lumière sur ces milices. M.Z

    ZEDANE Mounir

    12 h 32, le 19 août 2023

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