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Société - Crise au Liban

"J'ai épargné mon salaire et au final on me l'a pris" : manifestation de déposants devant la BDL

Après un sit-in devant la banque centrale, les manifestants s'en sont pris aux façades de banques environnantes. 

Un manifestant hurlant de colère devant la BDL lors d'un sit-in, le 24 mars 2023. Photo Mohammad Yassine

Des membres du collectif "Le Cri des déposants" ont organisé vendredi une manifestation devant la Banque du Liban (BDL) dans le quartier de Hamra, à Beyrouth, "pour dénoncer les mesures injustes de la BDL envers les épargnants". 

Depuis le début de la crise en 2019, les banques libanaises imposent des restrictions draconiennes et illégales en l'absence d'une loi sur le contrôle des capitaux, sur les retraits et transferts. Depuis, la BDL a mis en place une série de mesures pour les déposants, leur permettant de retirer au compte-gouttes leurs économies des banques, à divers taux bien moins élevés que celui du marché parallèle. Mais ces mesures sont sévèrement critiquées par les organisations de défense des déposants qui réclament la restitution de tous les dépôts. 


Un manifestant devant la BDL, le 24 mars 2023. Photo Mohammad Yassine

Des dizaines de manifestants étaient présents devant la banque centrale vers 11h, au milieu d'un déploiement de l'armée et de la police, selon notre journaliste sur place Lyana Alameddine. 

"Riad Salamé est un voleur", scandaient certains manifestants, en référence au gouverneur de la BDL, accusé d'avoir précipité la crise économique qui sévit dans le pays et qui est visé par des procédures judiciaires au Liban et dans plusieurs pays européens. 

Taux de change flottant
Un peu plus loin, certains protestataires brûlaient des pneus devant l'entrée de la banque centrale, pendant que d'autres lançaient des pétards et des bouteilles vers le bâtiment. 

"Toute ma vie j’ai épargné mon salaire et au final on me l'a pris", déplore Alice Rizkallah, une enseignante de 60 ans venue manifester. De son côté, Richard Abou Jaoudé, un consultant dans le domaine de la finance, appelle pour sa part "à récupérer l'intégralité des dépôts des épargnants et à adopter un taux de change flottant".


Des militaires et des manifestantes devant une banque du quartier de Hamra, le 24 mars 2023. Photo Mohammad Yassine

Zeina Rida, une mère de famille de 52 ans, explique, elle, avoir épargné "pour préparer sa retraite". "Cet argent bloqué dans les banques devait nous aider à survivre pendant nos vieux jours, mais à la place on n'arrive même pas à joindre les deux bouts", lance-t-elle.

"Pas de confiance dans les banques jusqu'à la restitution totale des dépôts", pouvait-on encore lire sur une banderole tenue par deux manifestantes, alors que des protestataires ont taggé des slogans et lancé des projectiles sur la façade d'un établissement bancaire tout proche. 

Devantures saccagées
Les manifestants se sont ensuite déplacés vers d'autres banques situées dans le secteur de Hamra, saccageant certaines devantures. La police et l'armée étaient déployées sur les lieux, empêchant l'accès aux établissements bancaires, sans toutefois intervenir contre les protestataires. Devant un des établissements qui se faisaient saccager, une femme pleure en criant : "Injustice!". "Reste forte", lui lance une autre manifestante.

Ekram, une ancienne employée de banque, assiste à la scène. "J'ai vécu trente ans au Canada et déposé tout ce que j'ai gagné dans les banques libanaises. Maintenant, je dois mendier pour récupérer cet argent", s'indigne-t-elle. "Je suis contre la violence mais nous ne savons plus quoi faire", ajoute-t-elle. 

Entrée de force
Parallèlement à la manifestation ciblant la BDL et les banques, un déposant, Pascal Rassi, et son épouse ont tenté d'entrer de force dans la maison du président du Conseil d'administration de la banque BLC, Nadim Kassar, à Jnah au sud de Beyrouth, a indiqué à L'Orient Today Rami Ollaik, avocat et fondateur du collectif Mouttahidoun ("Unis"), une organisation de défense des droits des déposants.

Selon M. Ollaik, le couple a tenté de s'introduire au domicile de M. Kassar pour protester contre les mesures illégales prises par la banque, notamment le blocage de leur dépôt, qui s'élèverait à environ 100.000 dollars. Le couple a déclaré avoir besoin de ce dépôt pour régler des frais médicaux urgents. Ils se sont approchés pacifiquement de la maison du PDG de la BLC avant de se retrouver face-à-face avec des agents de sécurité qui les ont obligés à quitter les lieux. M. Rassi avait déjà essayé de récupérer une partie de son épargne en décembre, dans une agence de la BLC à Antélias, dans le Metn, mais sans succès.

Les restrictions bancaires ont suscité la colère des déposants, dont certains n'ont pas hésité à réclamer leurs épargnes par la force ces derniers mois. Ces dernières semaines, Mouttahidoun a appelé les déposants à diriger leur colère et leurs revendications vers les propriétaires des banques et non les agences et les employés du secteur.

En plus de trois ans de crise économique au Liban, la monnaie nationale s'est dépréciée de plus de 98 % de sa valeur par rapport à l'ancien taux officiel. Mardi matin, la livre a atteint une dépréciation record de 143.000 LL sur le marché parallèle contre un billet vert. Le taux officiel de la livre est de 15.000 LL contre le dollar, après avoir été maintenu pendant 25 ans à 1.500 LL. 

Jeudi, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé que le Liban vit "un moment très dangereux", déplorant la lenteur de la mise en oeuvre des réformes par les responsables politiques.

Mercredi, une manifestation dans le centre-ville de Beyrouth, tenue à l'appel de collectifs d'anciens militaires, de déposants et de certains députés contestataires, avait dégénéré, les forces de sécurité ayant tiré des gaz lacrymogènes sur la foule pour la disperser. Cette mobilisation s'était déroulée en parallèle d'une réunion des commissions conjointes du Parlement dans la matinée.

Des membres du collectif "Le Cri des déposants" ont organisé vendredi une manifestation devant la Banque du Liban (BDL) dans le quartier de Hamra, à Beyrouth, "pour dénoncer les mesures injustes de la BDL envers les épargnants". Depuis le début de la crise en 2019, les banques libanaises imposent des restrictions draconiennes et illégales en l'absence d'une loi sur le contrôle des...

commentaires (6)

Pour ceux qui ont peur de manifester leur ras le bol à cause des vendus armés dans notre pays je leur dis, que valent les 11000 missiles et les voyous qui vont avec contre la volonté de 4 millions de citoyens qui n’en peuvent plus de cette injustice qui ne fait qu’accroître au fil des jours pour les tuer à petit feu, car c’est de cela dont il s’agit. Les manifestations ne mettront pas fin à cette dictature, il faut une révolution en bonne et due forme de tous les libanais quelque soit leur courant politique ou leur religion. Pour dire , la coupe est pleine. ÇA SUFFIT.

Sissi zayyat

14 h 06, le 25 mars 2023

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Commentaires (6)

  • Pour ceux qui ont peur de manifester leur ras le bol à cause des vendus armés dans notre pays je leur dis, que valent les 11000 missiles et les voyous qui vont avec contre la volonté de 4 millions de citoyens qui n’en peuvent plus de cette injustice qui ne fait qu’accroître au fil des jours pour les tuer à petit feu, car c’est de cela dont il s’agit. Les manifestations ne mettront pas fin à cette dictature, il faut une révolution en bonne et due forme de tous les libanais quelque soit leur courant politique ou leur religion. Pour dire , la coupe est pleine. ÇA SUFFIT.

    Sissi zayyat

    14 h 06, le 25 mars 2023

  • Le mystère demeure et s'épaissit même...alors qu'il y a des centaines de milliers, pour ne pas dire quelques millions, de clients qui ont vu leurs fonds bloqués/volés, on continue à assister à des manifestations occasionnelles regroupant quelques dizaines de personnes....bizarre, vous avez dit bizarre ? Comme c'est bizarre...

    IBN KHALDOUN

    16 h 20, le 24 mars 2023

  • Les crapules bancaires et politichiennes pleurent des larmes de crocodile apres avoir transfere a l'etranger, sur leurs comptes personnels, ce qui restait de l'argent des deposants. Nous attendons toujours les excuses publiques et privees des banquiers pour leur incompetence dans la gestion de l'argent des epargnants. Nous attendons toujours qu'ils nous expliquent quels efforts ils ont consenti au cours des 3 ans et demi passes pour renforcer leurs structure en vue de rembourser leurs clients ? Nous attendons toujours les mesures d'assouplissement du controle illegal des depots apres 3 ans et demie de crise. Rien de tout cela. Pendant ce temps, ces crapules menent grand train, rachetent des societes (Solidere) et des biens-fonds au Liban et a l'etranger (les Libanais, deuxieme investisseurs immobiliers apres les Americains a Paris en 2022) en toute arrogance. Nous ne devons pas permettre a ces canailles de faite heriter NOS SOUS a LEUR PROGENITURE.

    Michel Trad

    15 h 30, le 24 mars 2023

  • Manifestations ? ! Mais ce n'est pas face à des manifestations que le système politique pourri ploiera, mais face à la révolte populaire. Yallah.

    Ca va mieux en le disant

    15 h 17, le 24 mars 2023

  • Les dépôts dans les banques ne valent plus rien. Les banques sont sous respirateur artificiel. Les libanais ont tout perdu, tous les libanais? NON : les gangsters de politiciens, hauts fonctionnaires, les actionnaires des banques et tous leurs proches ont mis leur argent à l’abri dans des paradis fiscaux et ils s’en foutent que le peuple crève. Qu’ils soient tous damnés eux et leur descendance jusqu’à la quatrième génération. OLJ courage publiez si du moins vous faites aussi partie de ceux qui ont tout perdu

    Lecteur excédé par la censure

    14 h 05, le 24 mars 2023

  • Des dizaines ont manifesté mais nous sommes des millions a avoir perdu NOTRE argent, notre épargne, notre dignité.

    Georges Zehil Daniele

    12 h 02, le 24 mars 2023

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