Mbappé-Hakimi, duel fratricide en demi-finale

Les copains d’abord ? Pas sûr que l’adage soit de mise en demi-finale de Coupe du monde. Après s’être à maintes reprises affichés côte à côte depuis le début du tournoi, les deux inséparables compères du club de la capitale n’ont pas manqué de se donner rendez-vous ce mercredi sur la pelouse du stade al-Bayt, situé à al-Khor, à environ 40 kilomètres au nord de Doha.

Comme deux jeunes hommes de leur époque, ils se sont échangé quelques messages qui ne sont pas passés inaperçus sur les réseaux sociaux. « See you soon my friend » (« On se voit bientôt mon ami »), a lancé le Marocain, ce à quoi Mbappé a répondu par trois émojis en forme de cœur, comme pour sous-entendre qu’aucune opposition, aussi cruciale et décisive soit-elle, ne pourra briser leur romance amicale.

Pour son seul jour de congé après la qualification en huitièmes contre la Pologne, l’attaquant français s’est empressé de partager un peu de temps avec son acolyte au camp de base de la sélection marocaine, le félicitant au passage pour la qualification historique des Lions de l’Atlas contre l’Espagne (0-0, 3 t.a.b. à 0).

Depuis la signature de Hakimi au PSG au cours de l’été 2021 en provenance de l’Inter Milan, les deux partagent presque tout, sur le terrain et en dehors : « Nous sommes deux jeunes hommes de 23 ans qui partagent les même goûts, on parle de musique, de jeux vidéo, on va au restaurant », décryptait le Marocain dans les colonnes du quotidien Le Parisien.

Le pingouin et la théière

Une proximité facilitée par celle de leurs dates de naissance respectives : nés avec moins de deux mois d’écart, Mbappé (du 20 décembre 1998) et Hakimi (du 4 novembre 1998) ont été victimes d’un « coup de foudre amical » tandis que l’attaquant français s’occupait personnellement de l’intégration du joueur formé au Real Madrid.

Soucieux de pratiquer son espagnol, qu’il parle couramment, Mbappé a très vite pris sous son aile son presque-jumeau, que ce soit au sein du vestiaire parisien ou pour l’accompagner dans ses sorties dans les restaurants les plus prisés de la capitale ou les défilés de mode dont ils sont tous deux des amateurs.

Même en plein cœur de la tourmente entourant la prolongation de contrat du Bondynois au PSG, alors fortement pressenti pour rejoindre les rangs de la « Casa Blanca », les deux compères s’étaient amusés à brouiller les pistes en s’affichant dans un restaurant de la capitale espagnole. Des images qui avaient alimenté la rubrique mercato des médias français et espagnols.

Leur complicité se matérialise aussi sur le rectangle vert, y compris à l’occasion de ce Mondial où leurs différentes célébrations sont autant de clins d’œil à l’intention de l’autre. En marge de son doublé face à la Pologne (3-1), le Français s’était par exemple curieusement accroupi pour mimer

une sorte de théière.

Ce à quoi le Marocain lui a répondu par une danse semblable à la démarche d’un pingouin dans la foulée de sa panenka scellant la victoire du Maroc au terme de la séance de tirs au but contre l’Espagne. Deux gestes incongrus et uniquement compréhensibles par l’un ou l’autre qui sont toutefois révélateurs de leur complicité réciproque.

« Il faudra que je détruise mon ami »

Mais ce mercredi, l’heure ne sera certainement pas aux marques de politesse. D’autant que le duo se retrouvera face à face sur le côté gauche du terrain, au cours d’un match au sommet, une demi-finale de Coupe du monde, niveau que le Maroc atteint pour la première fois de son histoire et de celle du football africain.

Mbappé l’avait-il senti venir ? Dans une vidéo diffusée par PSG TV lors du stage de début de saison à Doha, le Français envisageait déjà un France-Maroc à la Coupe du monde : « Il faudra que je détruise mon ami », avait alors lancé en anglais le champion du monde 2018 avec un grand sourire. « Je vais le frapper », rétorquait le Marocain, semblant annoncer la couleur que prendrait un éventuel face-à-face dans un duel aussi crucial que celui qu’ils s’apprêtent à disputer.

D’autant que leur relation n’a pas toujours été totalement idyllique. Lors d’un match de Ligue 1, le diffuseur Prime Video avait diffusé une séquence dans le couloir du stade où Mbappé s’adressait avec véhémence à son partenaire, qui venait de manquer l’occasion de lui faire une passe décisive : « Je te jure, regarde la vidéo », avait lancé Mbappé. « Si c’est ça, je suis désolé », tentait de désamorcer Hakimi. « Ça suffit pas désolé, il faut me donner des passes », avait sèchement conclu l’attaquant.

Mais l’essentiel du temps ils prennent la défense l’un de l’autre. Hakimi avait publiquement souhaité que « Kyky » reste au PSG l’été dernier, et Mbappé en conférence de presse avait soutenu son ami, un peu moins bon en club.

Hakimi « doit garder cette exigence, moi qui le connais plus intimement, il est revenu cette année avec d’autres intentions, une exigence du quotidien. Il a eu des moments plus difficiles la saison dernière, mais c’était une saison d’adaptation », avait déclaré Mbappé.

Mais cette fois, pendant 90 ou 120 minutes, les deux copains auront tout intérêt à s’attaquer plutôt qu’à se défendre.

G.B. avec AFP