Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - Focus

La visite de François à Bahreïn scrutée par les défenseurs des droits humains

La visite de François à Bahreïn scrutée par les défenseurs des droits humains

Le pape François célèbre la messe de la Toussaint, le 2 novembre 2022, en mémoire des cardinaux et évêques décédés cette année. Marco Bertorello/AFP

La première visite pontificale à Bahreïn qui commence aujourd’hui pour trois jours se déroulera dans le cadre du « Forum pour le dialogue : l’Orient et l’Occident pour la coexistence humaine ». Une initiative qui s’inscrit dans la continuité de la conférence interreligieuse organisée aux Émirats arabes unis en 2019, à laquelle le pape François avait également assisté, marquant alors son premier déplacement officiel dans la péninsule Arabique. Si le séjour du pape avait été l’occasion de poursuivre le « dialogue islamo-chrétien » cher au pontife, il en avait profité pour évoquer la question des violations des droits humains au Yémen et celle de la répression des opposants dans la fédération émiratie. Dans ce contexte, les organisations de défense des droits de l’homme attendent du pape qu’il soulève notamment la question des discriminations religieuses dans le pays.

Au cours de son séjour, le pape rencontrera le grand imam d’al-Azhar et le Conseil des sages musulmans pour poursuivre le dialogue interreligieux dans la région. C’est une occasion pour le Bahreïn de « construire des ponts entre l’Orient et l’Occident », indique le père Charbel Fayad, prêtre de la communauté catholique arabe dans le pays. Un porte-parole du gouvernement déclarait ainsi à l’agence de presse que « Bahreïn, en tant que société multiculturelle et foyer de peuples de nombreuses confessions, est fier de ses valeurs de tolérance et de sa longue histoire de coexistence pacifique ». Le royaume est notamment un des quatre pays arabes qui ont normalisé leurs relations avec l’État hébreu en 2020 dans le sillage des accords d’Abraham.

Les enjeux politiques

Pour Manama, « la visite a une grande dimension stratégique », indique le père Charbel Fayad. Le Vatican estime que 80 000 catholiques sont présents dans la monarchie, principalement des travailleurs venant de l’Inde et des Philippines. La région du Golfe compte aujourd’hui plus de 3,5 millions de chrétiens, dont plus de la majorité sont de confession catholique. Une prière aura lieu vendredi dans la cathédrale Notre-Dame d’Arabie, plus grande église de la péninsule Arabique, inaugurée l’année dernière, et une messe sera célébrée le dimanche en présence de 24 000 fidèles.

S’exprimant sur son compte Twitter, Cinzia Bianco, chercheuse associée au Conseil européen des relations étrangères, a suggéré que la visite du pape pouvait également être l’occasion de « discuter de l’ouverture d’une église en Arabie saoudite ». Le royaume wahhabite est le seul pays de la péninsule où la pratique de toute religion autre que l’islam est proscrite. Selon la chercheuse, la nouvelle église pourrait faire partie du mégaprojet futuriste Neom, mais il pourrait aussi s’agir d’un temple protestant, les discussions étant encore en cours.

En organisant cet événement, Manama espère adoucir son image internationale. Certains groupes de défense des droits de l’homme espèrent au contraire que le pape François fera pression sur le dirigeant sunnite de Bahreïn, le roi Hamad ben Issa al-Khalifa, pour qu’il mette fin à la répression contre les musulmans chiites, qui constituent la majorité de la population du royaume, ainsi que contre les personnalités et les militants de l’opposition, et aux abus contre les travailleurs migrants. Dès 2011, dans le sillage des printemps arabes, la répression contre les manifestants s’est en grande partie tournée vers les citoyens chiites accusés d’être à la solde de Téhéran. Des dizaines de mosquées chiites sont alors détruites par les troupes du royaume saoudien, grand frère du pouvoir bahreïni. Selon Human Rights Watch, 26 condamnés sont actuellement dans le couloir de la mort à Bahreïn, en contradiction avec le droit international autant que la législation bahreïnie, suite à des procédures qui n’ont pas respecté leur droit fondamental à un procès juste ou pour des faits de drogue qui ne relèvent pas de crimes graves.

Alors que les élections législatives doivent se tenir le 12 novembre prochain dans le royaume, HRW a dénoncé, dans un autre rapport publié en octobre 2022, une loi interdisant aux anciens membres des partis politiques d’opposition de se présenter aux élections parlementaires et de siéger aux conseils d’administration de gouverneurs des organisations civiles. Le régime a également publié la semaine dernière un décret modifiant les règles internes du Conseil des représentants élus, « empiétant sur l’autonomie du pouvoir législatif », selon un tweet de Kristin Diwan, chercheuse à l’Arab Gulf States Institute de Washington.

La première visite pontificale à Bahreïn qui commence aujourd’hui pour trois jours se déroulera dans le cadre du « Forum pour le dialogue : l’Orient et l’Occident pour la coexistence humaine ». Une initiative qui s’inscrit dans la continuité de la conférence interreligieuse organisée aux Émirats arabes unis en 2019, à laquelle le pape François avait également...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut