
Le Parlement réuni lundi pour la quatrième séance dédiée à l'élection d'un président de la République. Photo Mohammad Yassine
Le vide au sommet de l’État semble de plus en plus inévitable. À une semaine de la fin du mandat de Michel Aoun, la quatrième séance dédiée à l’élection du prochain président de la République n’a (sans surprise) pas abouti, aucun candidat n’ayant obtenu les 86 voix requises pour l’élection dès le premier tour. Il faut rappeler, à ce sujet, que du fait qu’un certain nombre de députés (gravitant autour du Hezbollah) quittent à chaque fois l’hémicycle après un seul tour de vote, le jeu (ou la « pièce de théâtre », pour reprendre les propos tenus dimanche par le patriarche maronite Béchara Raï) est mené de telle sorte qu’il n’y ait toujours que des premiers tours, de façon à ce qu’on ne passe au second tour, où pour être élu un candidat a juste besoin d’obtenir 65 voix, que lorsqu’un accord en amont sur le nom du président est conclu. Lors donc de ce énième premier tour, lundi, 50 élus, principalement du Hezbollah et ses alliés, ont maintenu le vote blanc ; 39 autres issus de l’opposition ont déposé une enveloppe au nom du député réformiste de Zghorta Michel Moawad ; et dix autres, notamment affiliés à la contestation, ont glissé le nom du professeur et géographe Issam Khalifé, un candidat qui vient tout juste de faire son entrée. Quant au second tour, il n’a jamais eu lieu, les députés du Hezbollah et leurs alliés s’étant une fois de plus retirés de la séance, provoquant un défaut de quorum. À défaut d’avoir rempli sa fonction principale, la séance de lundi a cependant permis de confirmer deux principales tendances.
Berry veut reprendre l’initiative
Comme pour toutes les séances, la conclusion reste la même : l’entente en amont reste la condition sine qua non à l’élection d’un président. En termes de chiffres, le rapport de force ne bouge toujours pas. En comptant les quatre absents (3 députés des Forces libanaises et Nadim Gemayel des Kataëb) qui allaient vraisemblablement soutenir sa candidature, la séance de lundi a prouvé que Michel Moawad ne peut (jusqu’ici) compter que sur le soutien de 43 parlementaires. Un léger recul par rapport à la dernière séance, lors de laquelle il a pu compter sur l’appui de 44 élus. Selon le principal intéressé, cette voix perdue résulte d’une désertion parmi les députés ex-haririens, qui restent réticents à soutenir pleinement sa candidature. M. Moawad reste donc très loin des 65 voix nécessaires à son élection au second tour. Et même s’il parvenait à dépasser ce seuil, Michel Moawad ne pourra pas garantir son élection. Faute d’une entente élargie, le Hezbollah – qui le considère comme un candidat de défi – et ses alliés n’hésiteront pas à avoir recours à l’arme (bien qu’anticonstitutionnelle) du défaut de quorum, comme ils l’ont déjà fait à plusieurs reprises. Cette arme, utilisée depuis 1982, complique l’arithmétique nécessaire à l’élection d’un président, puisqu’elle octroie à n’importe quel groupe de 43 députés un véritable droit de veto.Face à ce cul-de-sac, les appels au dialogue se multiplient. Déjà à la veille de la séance, le président du Parlement Nabih Berry a confié au journal panarabe al-Chark al-Awsat qu’il appellera à « un dialogue ouvert » après la fin du délai constitutionnel, le 31 octobre, pour élire un nouveau président. Une façon pour le patron du mouvement Amal de garantir un rôle-clé après l’expiration du mandat de Michel Aoun, son principal rival politique. L’appel de M. Berry a été bien accueilli auprès des formations du 8 Mars. « Le blocage est dû au fait que le Parlement ne parvient pas à élire un président faute d’entente, et non à cause des votes blancs », a affirmé le député du CPL Alain Aoun, alors que le camp aouniste continue à voter blanc depuis la première séance, tout comme le Hezbollah et le mouvement Amal. Le nombre de votes blancs a certes baissé de 55 à 50, mais cela est le résultat de l’absence d’un grand nombre de députés (14 au total). « Pour l’élection d’un président, il faut un minimum de consensus », a-t-il estimé, soulignant « la nécessité d’un dialogue sérieux » et saluant l’appel dans ce sens lancé par M. Berry.
La fin des 13 ?
Si les divergences qui séparaient les 13 députés se réclamant de la contestation ont déjà été mises à nu ces dernières semaines, la séance de lundi a illustré l’effondrement de ce bloc parlementaire. Ainsi, le député de Beyrouth II Waddah Sadek a annoncé à l’issue de la séance qu’il était « un député indépendant du changement, hors du bloc de la contestation », claquant ainsi officiellement la porte de ce rassemblement. Il emboîte le pas à Michel Doueihy, député de Zghorta, qui s’était retiré du bloc la semaine dernière. Si M. Sadek a profité de sa nouvelle indépendance pour voter en faveur de Michel Moawad, 10 des 11 députés contestataires restants – Paula Yaacoubian était absente – n’ont pas tous voté pour la même figure. Officiellement, ces élus ont décidé de soutenir Issam Khalifé, mais ce dernier n’affichait à son compteur que 10 voix, dont celles des indépendants Oussama Saad (Saïda), Charbel Massaad (Jezzine) et Michel Doueihy. Il n’a donc pu compter que sur 7 des voix des 11 députés du « changement ». Qui sont les électrons libres ? Selon plusieurs sources concordantes contactées par L’Orient-Le Jour, il s’agit de Rami Fanj (Tripoli), qui aurait voté pour M. Moawad, mais aussi des députés du parti Taqaddom Mark Daou (Aley) et Najat Saliba (Chouf), qui ont voté pour le « Nouveau Liban », aux côtés des députés anciens haririens.
Peut-on dès lors parler de la fin du bloc des 13 ? Le député de Beyrouth Ibrahim Mneimné se veut moins fataliste. « Le bloc, tel qu’on l’a connu, traverse actuellement une phase de réforme et de restructuration », affirme-t-il. En effet, l’absence d’un véritable mécanisme de prise de décision constitue une des raisons qui ont conduit à l’éclatement de ce groupe. C’est d’autant plus le cas que ces élus ont des positions souvent hétéroclites, mais sont condamnés à prendre des décisions à l’unanimité. « En l’absence d’un véritable mécanisme démocratique, certains au sein du bloc ont voulu imposer leurs idées d’extrême gauche sur nous tous, via la vetocratie », dénonce de son côté Waddah Sadek, contacté par notre journal. Il dit souhaiter l’émergence d’un nouveau bloc parlementaire avec les élus Rami Fanj, Mark Daou, Najat Saliba et Michel Doueihy.
Le vide au sommet de l’État semble de plus en plus inévitable. À une semaine de la fin du mandat de Michel Aoun, la quatrième séance dédiée à l’élection du prochain président de la République n’a (sans surprise) pas abouti, aucun candidat n’ayant obtenu les 86 voix requises pour l’élection dès le premier tour. Il faut rappeler, à ce sujet, que du fait qu’un certain...
commentaires (7)
Qu'attend-on pour nous débarrasser définitivement de tous ces Nuls qui n'ont plus aucune raison de se trouver: 1) dans un palais soi-disant "présidentiel" 2) dans un Parlement 3) au Sérail 4) certains ministères ? Qu'on les assigne à domicile et, pour les plus âgés, dans des asiles pour vieillards. Ils ont tous causé assez de malheurs à notre pays et à nous, le petit peuple ! Le Liban compte beaucoup de personnes vraiment patriotes, honnêtes et dévouées, capables de le gérer convenablement. - Irène Saïd
Irene Said
16 h 05, le 25 octobre 2022