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Sport - Mondial de football

Écran noir dans les métropoles françaises

À l’image de sept autres grandes villes de l’Hexagone, la ville de Paris a annoncé qu’elle fera l’impasse sur les écrans géants et les fan zones pendant la Coupe du monde au Qatar.

Écran noir dans les métropoles françaises

Des supporteurs des Bleus réunis dans la fan zone du Champ-de-Mars, devant la tour Eiffel, le 15 juillet 2018, pour regarder la finale de la Coupe du monde de football entre la France et la Croatie. Jacques Demarthon/AFP

Comme à Lille, Marseille ou encore Bordeaux, les grandes places de la capitale ne retransmettront pas non plus les matchs de l’équipe de France lors du Mondial qatari. Rien à voir avec un nouveau protocole Covid, bien que les raisons qui motivent ces décisions ne soient pas moins virales dans l’opinion française. En plus des diverses révélations sur le coût humain des chantiers des stades, « l’aberration écologique » que constitue la compétition est de plus en plus mise en avant pour justifier son boycott.

Un « non-sens » pour les droits humains

« Pour nous, il n’a pas été question d’installer des zones de diffusion des matchs pour plusieurs raisons : la première, c’est les conditions de l’organisation de cette Coupe du monde, tant sur l’aspect environnemental que social. La seconde, c’est la temporalité, le fait que ça ait lieu au mois de décembre », a annoncé lundi l’adjoint chargé des sports de la mairie de Paris, Pierre Rabadan, pour qui « ce modèle de grands événements va à l’encontre de ce que Paris souhaite organiser ».

Plusieurs maires de grandes villes, toutes couleurs politiques confondues, n’ont pas mâché leurs mots lundi depuis l’annonce faite samedi par la maire socialiste de Lille Martine Aubry, qui avait qualifié l’événement de « non-sens au regard des droits humains, de l’environnement et du sport ».

À Marseille, le maire socialiste Benoît Payan, à la tête d’une large coalition de gauche et écologiste, a jugé que cette compétition s’était « progressivement transformée en catastrophe humaine et environnementale, incompatible avec les valeurs que nous voulons voir portées au travers du sport et notamment du football ».

Parmi les raisons de ces appels au boycott figurent au premier plan le traitement des travailleurs immigrés et le nombre d’accidents lors de la construction des huit stades du Mondial. Si le bilan officiel n’est que de trois morts, d’autres études ont révélé que de tels chiffres sous-évaluent de façon outrancière la réalité. D’après de multiples enquêtes, notamment celle publiée dans le journal britannique The Guardian en 2021, le coût humain de ces chantiers s’élèverait à plus de 6 000 décès liés aux mauvaises conditions de travail subies par les ouvriers depuis l’attribution de la compétition à l’émirat en 2009.

Dans un récent rapport, l’Organisation internationale du travail (OIT) a également fait état de 50 travailleurs décédés dans des accidents du travail au Qatar en 2020 et de 500 blessés graves, un chiffre qui pourrait être plus élevé selon elle en raison de lacunes dans le système de recensement des accidents.

« Aberration énergétique »

« J’aurais vraiment l’impression, si Bordeaux accueillait ces fan zones, d’être complice de cette manifestation sportive qui représente toutes les aberrations humanitaires, écologiques et sportives », a déclaré lundi Pierre Hurmic, le maire écologiste de Bordeaux.

Outre la question des droits humains, l’édile girondin, élu en 2020, s’est également refusé à être « incohérent » par rapport aux efforts demandés à la population en matière « de sobriété énergétique » dans un contexte de tensions énergétiques sur le Vieux Continent aggravées par la guerre en Ukraine. « Vous ne pouvez pas appeler vos concitoyens à la sobriété et vous-même vous montrer complice d’aberrations énergétiques de cette nature », a-t-il déclaré.

Même son de cloche du côté de Reims, Rodez, Strasbourg ou encore Nancy, dont le maire a également pointé le décalage de « l’usage de stades climatisés durant cette Coupe du monde avec les enjeux de transition écologique » et appelé les organisateurs à « sérieusement revoir les règles d’attribution des prochaines Coupes du monde ».

Si les autorités qataries ont répondu à ces critiques en promettant que les systèmes de climatisation ne seront pas utilisés lors de la compétition, elles ont en parallèle noué pléthore de partenariats pour se délester de l’accueil permanent des quelque 1,2 million de spectateurs attendus sur les 29 jours de compétition.

Une partie de ce flux humain sera acheminée quotidiennement à l’aide d’un système de « navettes » qu’assureront quatre compagnies aériennes de pays voisins de l’émirat : Saudia Airways, Kuwait Airways, Flydubai et Oman Air. Une logistique aussi importante qu’énergivore qui devrait mobiliser l’équivalent de 160 vols par jour, soit un avion toutes les 10 minutes.

Fonds d’indemnisation pour les ouvriers

Reste à savoir si toutes ces déclarations d’intention résisteront à un long parcours des Bleus qui, malgré de dernières sorties peu convaincantes, demeurent sur le papier armés pour défendre leur titre mondial.

Face à cette éventualité, le Bordelais Pierre Hurmic a déjà prévenu « qu’aucun écran ne sera mis en place si la France arrive en finale » et qu’il invitait ses homologues à prendre « des décisions identiques dans les jours à venir ». Il a par ailleurs indiqué qu’il ne regarderait pas la compétition.

Au centre de toutes les attentions à l’approche du coup d’envoi du Mondial qui sera donné le 20 novembre, la Fédération française de football (FFF) est récemment sortie du silence dans un communiqué officiel publié la veille du dernier match disputé par l’équipe de France contre le Danemark le 25 septembre dernier.

En substance, la « 3F » estime que « participer ne signifie pas fermer les yeux et cautionner ». Pour ce faire, elle promet de mettre en œuvre « différentes mesures » en prévision de son séjour qatari. L’instance a d’ailleurs annoncé ce mardi qu’elle travaillait actuellement avec plusieurs autres fédérations à la création d’un « fonds d’indemnisation des victimes d’accidents du travail sur les chantiers de la Coupe du monde au Qatar ».

Son vice-président délégué Philippe Diallo a par ailleurs apporté plus de précisions, lors de l’ouverture d’un forum intitulé « Think Football », sur la position qui sera adoptée par la Fédération. « Nous tentons d’être pragmatiques, d’être efficaces, notre choix, c’est d’accompagner les évolutions, et pas de boycotter, de faire en sorte sans arrogance par rapport au pays organisateur que les évolutions qu’on commence à constater puissent se prolonger », a détaillé le dirigeant, ajoutant que la FFF ferait en sorte que les employés et prestataires du camp de base des Bleus à Doha aient de bonnes « conditions de travail et de rémunération ».

Cette idée d’un fonds d’indemnisation pour les ouvriers et leurs familles a été portée ces derniers mois par plusieurs organisations de défense des droits humains, qui ont appelé les sponsors du Mondial à soutenir l’initiative. « On salue cette prise de parole, a réagi auprès de l’AFP Lola Schulmann, chargée de plaidoyer d’Amnesty International France. L’objectif, maintenant, c’est que la FFF porte sa voix au sein de la FIFA et que la FIFA, elle aussi, s’engage pour les travailleurs. »

Les montants qui seront débloqués pour ce fonds demeurent inconnus. Il semble tout de même peu probable que ceux-ci soient supérieurs aux dotations sportives, avoisinant les 400 millions de dollars, promises aux 32 sélections alignées au départ de la compétition.

Comme à Lille, Marseille ou encore Bordeaux, les grandes places de la capitale ne retransmettront pas non plus les matchs de l’équipe de France lors du Mondial qatari. Rien à voir avec un nouveau protocole Covid, bien que les raisons qui motivent ces décisions ne soient pas moins virales dans l’opinion française. En plus des diverses révélations sur le coût humain des chantiers des...

commentaires (2)

Si l'argument des droits de l'homme (et non des "droits humains", expression qui est une hérésie grammaticale), possède une certaine pertinence, il devrait, à plus forte raison, s'appliquer aux jeux olympiques de Pékin. Ceci dit, moi qui, pour de multiples raisons, ne compte pas regarder ces matches, je constate que nos maires écolo-socialistes se comportent en nouveaux Savonarole. et veulent absolument priver le peuple de toute réjouissabce. Après les crèches et sapins de Noel, après les écoles de voile (oui, DE VOILE!) et le Tour de France, les voilà qui partent en guerre contre le Mondial!. Comme si, en cette période de crise, une petite distraction ne serait pas la bienvenue.

Yves Prevost

08 h 05, le 05 octobre 2022

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Commentaires (2)

  • Si l'argument des droits de l'homme (et non des "droits humains", expression qui est une hérésie grammaticale), possède une certaine pertinence, il devrait, à plus forte raison, s'appliquer aux jeux olympiques de Pékin. Ceci dit, moi qui, pour de multiples raisons, ne compte pas regarder ces matches, je constate que nos maires écolo-socialistes se comportent en nouveaux Savonarole. et veulent absolument priver le peuple de toute réjouissabce. Après les crèches et sapins de Noel, après les écoles de voile (oui, DE VOILE!) et le Tour de France, les voilà qui partent en guerre contre le Mondial!. Comme si, en cette période de crise, une petite distraction ne serait pas la bienvenue.

    Yves Prevost

    08 h 05, le 05 octobre 2022

  • Étalage de greenwashing : c’est â qui va jouer plus vert que vert parmi les métropoles françaises… sinon, l’argent des Qataris est toujours bon à prendre d’où le choix du Qatar pour ce Mondial quitte à pousser des cris d’orfraie ensuite.

    Marionet

    06 h 48, le 05 octobre 2022

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