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Nos Lecteurs ont la Parole

Législatives 2022 : comment expliquer la survie des partis traditionnels au Liban ?

Législatives 2022 : comment expliquer la survie des partis traditionnels au Liban ?

Un bureau de vote à Batroun, le 15 mai 2022. Ibrahim Chalhoub/AFP

Ce 15 mai 2022, l’heure du jugement dernier a eu lieu pour certains et moins pour d’autres lors des élections législatives libanaises, et malgré toutes les infractions qui ont pu avoir lieu, un nouveau Parlement s’est constitué avec quelques nouveaux visages. Mais pourquoi aujourd’hui les partis politiques traditionnels semblent-ils toujours aussi influents ?

Une question inverse s’impose d’abord : pourquoi les partis politiques traditionnels sont-ils contestés par une bonne partie de la population? Plusieurs critères apportent des éléments de réponse : auteurs de crimes pendant la guerre civile ; ils font partie intégrante du système et des institutions politiques corrompues, menant à la pauvreté qui ne cesse de croître dans le pays ; manque de responsabilité lors de la double explosion du 4 août, sabotage des démarches judiciaires pour condamner les coupables ; et ils sont en faveur de l’intervention de nations étrangères dans les affaires nationales.

Qu’est-ce qui alors attache toujours les partisans à leur parti archaïque ? C’est une sorte de confiance et d’attachement. Ceux-ci peuvent être retraçables en premier lieu au niveau de l’histoire, puisque le regroupement politique constitue une référence à ses militants jusqu’à aujourd’hui. Par exemple, dans le cas de la guerre civile, certains groupes sont encore très liés par la mémoire collective qu’ils conservent de ces temps.

Pour un bon nombre d’enrôlés dans le parti aussi, le chef politique est un personnage héroïque et superpuissant qui, grâce à ses pouvoirs, a été en mesure de redresser bon nombre de situations désastreuses auxquelles il a été confronté par le passé.

En plus de cela, le parti leur semble bien organisé, contrairement aux nouveaux partis qui naissent et qui, pour eux, n’ont pas d’avenir certain.

Un autre facteur peut s’ajouter au précédent, qui n’est autre que les liens affectifs qu’ont des personnes avec les anciennes coalitions. Ainsi, plusieurs individus, confrontés à la question suivante : « Pourquoi choisir ce parti politique ? », répondent tout simplement : « Parce que j’aime ce parti. »

Cela explique pourquoi les chefs politiques font de leur mieux afin de se rapprocher de leurs partisans. En effet, la communication entre chefs et adhérents serait cruciale dans la création de cette loyauté affective. Les chefs et les autorités qui représentent ces derniers descendent ainsi sur le terrain et maintiennent le contact avec leurs affiliés.

Dans une société libanaise fondée sur le modèle familial et souvent patriarcal, il n’est pas étonnant d’observer ce dernier schéma se reproduire au niveau des organisations politiques !

Pour finir, les partis semblent avancer des arguments concoctés à la sophiste. Par exemple, pour beaucoup, permettre à un certain groupe politique de dominer au Parlement mènera à la restriction de plusieurs libertés que possèdent les autres communautés libanaises.

Les adhérents ont aussi confiance en un parti qui, pour eux, est capable de contrer la situation actuelle que tout Libanais vit, et ce grâce au capital que possèdent les groupes politiques. Et dans la situation économique actuelle, ces derniers pourraient toujours subvenir aux besoins des militants…

Il est alors même possible de dire que ces groupes politiques comptent des personnes en qui les affiliés ont confiance parce qu’ils les ont beaucoup aidés dans le passé : qui n’a jamais entendu la phrase « C’est parce que je te connais que je vais voter pour toi et ton parti » ?

En fin de compte, il s’avère que la situation politique libanaise est bien plus complexe que l’on puisse le croire. En tout cas, c’est en se mettant dans la peau de l’autre et en cherchant à adopter son point de vue qu’il serait possible de comprendre ses décisions. L’adhésion persistante de personnes à des partis politiques traditionnels peut alors s’expliquer et se résumer en une loyauté parfois aveugle et inébranlable. Ainsi, beaucoup préfèrent rester dans ce qui, pour eux, est sûr, plutôt que de prendre des risques et de se retrouver déçus. Face à cela, il serait possible de proposer d’éduquer la nouvelle génération sur sa responsabilité citoyenne, non seulement parce que 51 % de la population s’est abstenue de voter aux législatives de 2022, mais aussi pour que la nouvelle génération ait les bonnes clés en main pour pouvoir exercer son devoir citoyen.

Christelle KARKOUR

Étudiante en deuxième année de licence en lettres françaises à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Ce 15 mai 2022, l’heure du jugement dernier a eu lieu pour certains et moins pour d’autres lors des élections législatives libanaises, et malgré toutes les infractions qui ont pu avoir lieu, un nouveau Parlement s’est constitué avec quelques nouveaux visages. Mais pourquoi aujourd’hui les partis politiques traditionnels semblent-ils toujours aussi influents ? Une question inverse...
commentaires (1)

mais comment expliquer que les partisans de ces partis ne realisent pas que ce capital que possèdent ceux ci soit ecorne, mille fois trompeur ou du moins capital qu'ils ont mal investi ? ce serait pt't le pardon dont ces bonnes ames portent en eux !

Gaby SIOUFI

10 h 34, le 15 juin 2022

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Commentaires (1)

  • mais comment expliquer que les partisans de ces partis ne realisent pas que ce capital que possèdent ceux ci soit ecorne, mille fois trompeur ou du moins capital qu'ils ont mal investi ? ce serait pt't le pardon dont ces bonnes ames portent en eux !

    Gaby SIOUFI

    10 h 34, le 15 juin 2022

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