L’Ukraine « dans tous les esprits »

Défilé de stars, dont Mads Mikkelsen et Tom Cruise, réalisateurs cultes comme David Cronenberg ou James Gray : le Festival du film de Cannes ouvrira mardi prochain sa 75e édition, où se pressera le gratin du cinéma mondial, avec la guerre en Ukraine pour toile de fond. Après une édition sous le soleil de juillet l’an dernier, pour cause de pandémie de Covid-19, les festivaliers retrouvent ainsi le mois de mai, et sans restrictions sanitaires pour la première fois depuis le début de la pandémie.

Tom Cruise donc, pour le nouveau Top Gun, Idriss Elba et Tilda Swinton chez George Miller, Léa Seydoux et Viggo Mortensen chez David Cronenberg, ou le prometteur Austin Butler qui incarne le « King » dans un biopic d’Elvis Presley signé Baz

Luhrman : le tapis rouge attend son lot de vedettes. L’acteur américain Forest Whitaker sera présent également, pour recevoir une palme d’or d’honneur.

L’actrice Virginie Efira (au générique de Revoir Paris, film présenté hors compétition qui aborde le souvenir douloureux des attentats terroristes dans la capitale française) animera la cérémonie d’ouverture mardi soir. Place ensuite au cinéma avec Coupez !, parodie sanguinolente de comédie de zombies et ode au cinéma fait avec beaucoup d’amour et des bouts de ficelle signée Michel Hazanavicius – le roi du pastiche oscarisé pour The Artist.

Côté compétition, 21 films sont en lice pour succéder à Titane, palme d’or gore et sans concession de la cinéaste française Julia Ducournau, seconde réalisatrice couronnée dans l’histoire du Festival de Cannes. Quand jury et sections parallèles tendent désormais à la parité, la compétition n’offre toujours qu’une place réduite aux réalisatrices : cinq sont en lice, dont Claire Denis qui retrouve Robert Pattinson pour Stars at Noon. Quant aux cinéastes attendus sur la Croisette, ils sont âgés de 30 à 84 ans. Parmi eux, David Cronenberg, qui promet une nouvelle fois de secouer le public avec Les crimes du futur, et James Gray, qui présentera Armageddon Time – film qui se déroule dans le New York des années 1980 en pleine ascension de la famille Trump.

Plusieurs réalisateurs déjà couronnés sont en lice : les frères belges Jean-Pierre et Luc Dardenne avec Tori et Lokita, le plus grinçant des cinéastes suédois Ruben Östlund avec Triangle of Sadness, le Japonais Hirokazu Kore-eda, qui a tourné Broker avec la star sud-coréenne Song Kang-ho, et le Roumain Cristian Mungiu avec son film RMN.

Serebrennikov libre

Au-delà de la compétition, toujours pas ouverte aux plateformes, fans comme cinéphiles devraient se régaler avec des dizaines d’œuvres très attendues : le nouveau film de George Miller, Trois mille ans à t’attendre, avec Idriss Elba et Tilda Swinton, le retour de Marco Bellocchio sur les années de plomb en Italie, l’as espagnol du polar Rodrigo Sorogoyen ou les passages à la réalisation de Lee Jung-jae et Jesse Eisenberg. Côté français, Léa Seydoux, Louis Garrel ou encore Sandrine Kiberlain monteront les marches à plusieurs reprises.

Tout ce programme aura pour toile de fond la guerre en Ukraine, inévitablement « dans tous les esprits », a souligné Thierry Frémaux, le délégué général du Festival de Cannes. Deux générations de cinéastes ukrainiens seront présentes, avec l’habitué Sergei Loznitsa pour The Natural History of Destruction, sur la destruction des villes allemandes par les Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale, mais aussi le jeune Maksim Nakonechnyi pour Bachennya Metelyka (dans la catégorie Un certain regard). Cannes devrait accueillir pour la première fois sur ses marches Kirill Serebrennikov, devenu symbole des artistes russes en rupture avec le régime depuis qu’il a pu rejoindre légalement l’Europe après le déclenchement de la guerre. Le réalisateur n’avait pas pu quitter son pays pour ses précédents films en compétition, Leto et La fièvre de Petrov, mais est désormais libre de venir défendre La femme de Tchaïkovski, premier film projeté de la compétition. Le titre du film de clôture n’est, lui, pas encore connu.

Et, signe que tout n’est pas encore redevenu comme avant sur la planète cinéma, ce n’est que trois semaines avant son ouverture que le Festival de Cannes a enfin réussi à constituer le jury, présidé par l’acteur français Vincent Lindon. Il prend la suite du réalisateur américain Spike Lee. À ses côtés, l’actrice et réalisatrice anglo-américaine Rebecca Hall, la Suédoise Noomi Rapace ou encore les réalisateurs Asghar Farhadi, Ladj Ly et Joachim Trier.

François BECKER/AFP