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Lifestyle - Architecture

Amale Andraos dévoile les plans du futur Beirut Museum of Art

L’institution muséale, qui devrait ouvrir ses portes fin 2025 à la rue de Damas, vient de poser la première pierre du bâtiment le 25 février dernier. Le budget de la construction se chiffre entre 30 et 50 millions de dollars.

Amale Andraos dévoile les plans du futur Beirut Museum of Art

Pilier du musée, le laboratoire de restauration est ouvert au public. Photo DR

Mis en suspens après le soulèvement de 2019 puis la tragique double explosion du 4 août 2020, le projet du Beirut Museum of Art (BeMA), initié par Apeal (Association pour la promotion et l’exposition des arts au Liban) est relancé. Sa conception a été confiée en décembre 2018 à l’architecte libano-américaine Amale Andraos, dont la nomination avait fait suite à une polémique opposant le board du BeMA à l’architecte Hala Wardé, lauréate originelle pour la réalisation du musée puis écartée du projet. « Même si j’ai vécu à l’étranger, la ville de Beyrouth me tient à cœur. Elle a toujours été une source d’inspiration, confie Amale Andraos à L’Orient-Le Jour lors de son récent passage au Liban. J’ai fait ma thèse sur Beyrouth et ses fouilles archéologiques urbaines. Ensuite, avec ma pratique, j’ai développé des projets théoriques sur la reconstruction du centre-ville. Grâce à Beyrouth, j’ai écrit des livres sur le patrimoine de la ville arabe et le modernisme dans le Moyen-Orient, démontrant les opportunités culturelles que crée l’intégration de l’art, de l’architecture et du paysage au sein d’une urbanisation dense, et le moyen de réinventer notre façon de vivre ensemble. » À propos du BeMA, elle précise : « Ce n’est pas uniquement un bâtiment, c’est une institution. Nous l’envisageons comme un musée-archive, le gardien d’un patrimoine commun. » En s’expliquant, l’architecte fait défiler sur l’écran de sa tablette plans et images de son projet tout en définissant ses choix : « un style aux lignes simples et épurées pour les surfaces intérieures qui, d’une part, facilitera la fluidité de la circulation du public et, de l’autre, permettra aux peintures de s’offrir aux regards comme un grand livre ouvert, où les lectures se renouvellent selon la collection présentée ». Ayant délibérément flouté les limites entre intérieur et extérieur, elle souligne : « Se connecter à l’environnement en intégrant la nature à l’architecture est au centre de mon métier. » Brouillant les frontières, les balcons qui rythment la façade sur la rue de Damas ont été augmentés « en hauteur et profondeur ». « Ils serviront de galeries verticales à des installations conçues pour le musée. »

Augmentés en hauteur et profondeur, les balcons serviront pour des expositions permanentes. Photo DR

Restaurer et assurer la conservation

Couvrant une superficie bâtie de 9 000 m2, le bâtiment comprend cinq niveaux d’une surface de 500 m2 chacun. Au rez-de-chaussée, seront installés le lobby, les bureaux administratifs, une librairie de livres d’art et un café-restaurant avec terrasse que prolonge un jardin de 500 m2 de végétation. Le premier étage sera affecté à deux types de programme : l’un proposera des activités pour familiariser les enfants à l’art, ainsi que des ateliers pour les étudiants des beaux-arts qui pourront échanger et créer des œuvres. Le même espace sera partagé par les restaurateurs des œuvres d’art. « Conserver et remettre les pièces dans leur état initial sont l’un des piliers du musée », souligne Amale Andraos. Elle explique qu’après les explosions du 4 août 2020 et les destructions qui s’en sont suivies, traiter les altérations des œuvres picturales et réparer celles qui ont été lacérées était devenu l’élément-clé du projet BeMA. Pour ce faire, « nous avons choisi de travailler avec l’architecte américain Samuel Anderson, spécialiste dans la conception des laboratoires de conservations d’art et d’installation et leur stockage, et qui avait conçu ceux du MoMA (Museum of Modern Art) et du Whitney Museum of American Art ». Pour la petite histoire, en apprenant que le laboratoire était destiné à Beyrouth, l’expert américain, marié à une Arménienne, s’est empressé d’offrir gratuitement toute son expertise aux restaurateurs libanais. « Des investissements en équipements ont été réalisés, et le BeMA dispose aujourd’hui des compétences nécessaires pour mener à bien ce travail aux niveaux local et même régional » , indique l’architecte, qui ajoute que 300 pièces de la collection d’art ont déjà été restaurées à ce jour. Une partie du fonds du musée sera exposée dans la galerie située au deuxième étage. Le reste des collections est gardé dans des dépôts situés au premier sous-sol. Là, « leur conservation optimale est assurée avant que leur rotation n’intervienne dans la galerie », affirme-t-elle. Les créations artistiques contemporaines et les performances multimédias occuperont des espaces « flexibles » au troisième niveau. Ici, en raison des œuvres souvent volumineuses ou de très grandes tailles réalisées aujourd’hui par les artistes, la hauteur sous-plafond grimpe à sept mètres. Ailleurs dans le bâtiment, elle est de cinq mètres. Quant au roof, il sera « le domaine des documents relatifs aux arts plastiques ». Enfin, le bâtiment est desservi par trois parkings en sous-sol.

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Rappelons que dans le cadre de ce projet, « un accord de prêt » d’œuvres d’art de la collection du ministère de la Culture avait été signé en 2016 par le ministre de l’époque Rony Araygi à l’Apeal. L’accord porte sur une partie de la collection qui comprend entre 1 500 et 2 000 pièces d’art réparties depuis des décennies entre le palais présidentiel, le Sérail, le palais de l’Unesco et les différents ministères. À ce jour, 600 pièces ont été répertoriées et documentées par Juliana Khalaf et Talyne Boladian, fondatrices de BAKS/Art Advisory, société spécialisée dans les évaluations de l’art.

L’architecte libano-américaine Amale Andraos derrière ce projet muséal. Photo Raymond Adams

Un parcours jalonné de succès

Après sept ans de service (2014 – fin décembre 2021), Amale Andraos vient de terminer son mandat de doyenne de l’École supérieure d’architecture, de planification et de préservation de l’Université de Columbia. Elle aura été la première femme doyenne d’une des plus prestigieuses universités américaines, « entrant ainsi dans l’histoire des États-Unis », titre en février 2018 le magazine Architectural Digest. L’organisation Design Intelligence la cite parmi les 25 professeurs les plus applaudis de 2016, la décrivant comme « un leadership fort, intégrant dans son programme d’enseignement une vision audacieuse des problèmes du monde réel ». Aujourd’hui, elle conserve toujours son poste de professeure à la Columbia, et dès le mois de juillet prochain, elle assumera la charge de conseillère auprès de la Columbia Climate School, tout en poursuivant sa pratique d’architecte au cabinet Work Architecture Company WORKac, qu’elle a cofondé avec son mari Dan Wood en 2003. WORKac a été nommé « agence de design numéro 1 aux États-Unis » par Architect Magazine en 2017 et sélectionné « firme de l’année 2015 de l’État de New York » par l’American Institute of Architects (AIA). Plus récemment, en 2021, l’agence a remporté le Merit New York Designs Award. WORKac a signé une myriade de projets d’architecture et d’urbanisme, mais aussi de design d’intérieur, aux États-Unis comme à l’étranger. Quand on lui demande de quel projet elle est la plus fière, Amale Andraos répond avec un grand sourire : « Tous », affirmant une implication égale aussi bien pour une rénovation ou une conception de plus grande ampleur, qu’un engagement « à réinventer, repenser l’architecture, imaginer des scénarios alternatifs pour le futur des villes en s’appropriant les aspects les plus productifs du discours urbain ». Elle cite toutefois, le Blaffer Museum of Art de la faculté des beaux-arts de l’Université de Houston au Texas ; la bibliothèque de Kew Gardens Hills, dans le Queens à New York, qui se vante, selon les médias, d’avoir les meilleurs chiffres de fréquentation de toutes les bibliothèques du pays ; le Miami Museum Garage ; The Public Farm One, dit le Children’s Museum of the Arts, conçu pour le Modern Museum of Art (MoMA), et le PF1 Contemporary Art Center ; le nouveau centre estudiantin de la Rhode Island School of Design et enfin le Stealth Building, dans le quartier de Tribeca, qui a raflé de nombreux prix, notamment le Merit de l’Aiany (American Institute of Architects de New York) et le prix Archmarathon dans la catégorie Living. Côté Liban, WORKac a conçu les résidences Marea à Batroun. Ce projet, développé en collaboration avec Jamil Saab et Green Studios, comprend 60 unités de villas et de studios aux toitures végétales et a figuré dans l’édition Moyen-Orient du magazine AD (Architect Digest).

BIO EXPRESS

Née à Beyrouth, Amale Andraos a hérité sa passion pour l’architecture de son père, l’architecte Farid Andraos. Elle a vécu en Arabie saoudite, au Canada et aux Pays-Bas où elle a collaboré à l’OMA (Office for Metropolitan Architecture), l’agence basée à Rotterdam de l’architecte et urbaniste néerlandais Rem Koolhaas. Elle a également occupé des postes à Montréal chez Saucier & Perrotte, une firme spécialisée dans la construction d’édifices pour des organismes culturels et institutionnels, avant de s’installer à New York en 2002.

Diplômée de l’école d’architecture de l’Université de McGill à Montréal et de l’école de design de Harvard, Amale Andraos a enseigné à Princeton, à la Parsons School of Design et à l’Université de Pennsylvanie. C’est en 2011 qu’elle rejoint Columbia University. Elle siège actuellement au conseil d’administration de l’Architectural League of New York, et fait partie du comité consultatif international de la faculté d’ingénierie et d’architecture de l’Université américaine de Beyrouth (AUB) et du conseil consultatif New Inc. du New Museum, à New York. Depuis 2021, The Royal Architecture Institute of Canada (RAIC) lui a conféré le titre de membre honoraire.

En tant qu’auteure, ses écrits se sont concentrés sur le changement climatique et son impact sur l’architecture, ainsi que sur la représentation à l’ère de la pratique mondiale. Son livre The Arab City, coédité avec Nora Akawi en 2016, a été le sujet d’une série de symposiums tenus à Amman en 2013 et à New York en 2014. Parmi ses autres ouvrages We’ll Get There When We Cross that Bridge, coécrit avec Dan Wood, et 49 Cities, qui croque plusieurs siècles d’urbanisme, de la cité romaine idéale au Monument infini de Superstudio et lance un appel à réengager les villes comme lieux de réflexion expérimentale.

Mis en suspens après le soulèvement de 2019 puis la tragique double explosion du 4 août 2020, le projet du Beirut Museum of Art (BeMA), initié par Apeal (Association pour la promotion et l’exposition des arts au Liban) est relancé. Sa conception a été confiée en décembre 2018 à l’architecte libano-américaine Amale Andraos, dont la nomination avait fait suite à une polémique...

commentaires (3)

Le projet de Hala Warde était autrement plus ambitieux que ce machin Gaudesque

M.E

19 h 22, le 12 avril 2022

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Commentaires (3)

  • Le projet de Hala Warde était autrement plus ambitieux que ce machin Gaudesque

    M.E

    19 h 22, le 12 avril 2022

  • Waw que des universités aux États Unis , vous connaissez le proverbe qui dit «  quand on vous dit qu’il y a beaucoup des cerises prenez un petit panier « ….

    Eleni Caridopoulou

    17 h 29, le 12 avril 2022

  • Avec quel argent va t on battir ce musee!?

    Robert Moumdjian

    12 h 26, le 12 avril 2022

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