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Politique - Éclairage

Entre Baabda et Bkerké, rien ne va plus

Une mésentente qui pourrait avoir des retombées sur le vote chrétien lors des législatives de mai.

Entre Baabda et Bkerké, rien ne va plus

Le président Aoun et le patriarche Raï à Baabda, le 2 juin 2021. Photo Dalati et Nohra

Le fossé n’en finit pas de se creuser entre le président de la République Michel Aoun et le chef de l’Église maronite Béchara Raï. À moins de deux mois des législatives prévues le 15 mai, suivies par la présidentielle programmée pour octobre, les divergences entre les deux pôles maronites du pays se font de plus en plus profondes, ce qui, selon plusieurs observateurs, pourrait avoir des répercussions sur le vote dans la rue chrétienne. « Il y a de grandes différences de points de vue entre le patriarche et le chef de l’État », reconnaît un proche de Bkerké, sous couvert d’anonymat. « Ils divergent sur des dossiers stratégiques de taille. Je ne dirai donc pas que la relation entre eux est bonne. Elle est plutôt ordinaire », suppute-t-il. La présidence et l’Église maronite divergent d’abord – et surtout – sur les armes du Hezbollah et le positionnement politique d’un Liban qui n’arrive pas à définir une politique étrangère claire. Depuis près de deux ans, Mgr Raï plaide sans relâche pour consacrer la neutralité du Liban par rapport aux conflits régionaux, au moment où le Hezbollah, allié de longue date de Michel Aoun, est impliqué dans ces conflit, en Syrie ou au Yémen, soutenu par son sponsor iranien. Et la semaine dernière était révélatrice de cet antagonisme. Car au moment où le chef de l’Église maronite plaidait au Caire pour que le Liban revienne dans le giron arabe après la récente brouille avec les pays du Golfe sur fond d’ingérence du Hezbollah dans la région, le président Aoun prenait, une fois de plus, la défense du parti chiite et son arsenal. « Le Hezbollah n’a aucune influence sur la situation sécuritaire des Libanais », estimait-il dans un entretien accordé au quotidien italien La Repubblica, en marge de sa visite officielle de deux jours au Vatican.

En face, le patriarche multiplie, notamment ces derniers mois, les appels au désarmement du parti de Dieu et au respect des résolutions onusiennes, dont la 1559 (2004) qui porte entre autres sur « le désarmement et la dissolution de toutes les milices » et « l’extension du contrôle du gouvernement libanais sur tout son territoire ». Au Caire, il a haussé un peu plus le ton, accusant implicitement le Hezbollah d’être la « cause de l’isolement du Liban ». « La solution réside dans le fait que le Liban soit un pays neutre. C’est à partir de ce moment qu’il connaîtra à nouveau la prospérité et la croissance », a-t-il ajouté.

Les législatives

« Mgr Raï a évoqué la semaine dernière la question de la neutralité du Liban devant le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, qui s’y est montré très favorable », confie une personnalité proche de Bkerké. Et de poursuivre : « La neutralité était également au menu des discussions entre le patriarche et le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmad Aboul Gheit, qui s’est attardé sur la question lors de son entretien, le lendemain, avec le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres. » Parallèlement à cette dynamique politico-diplomatique menée par le patriarche au lendemain des premiers signes de réchauffement entre Beyrouth et les monarchies arabes, notamment l’Arabie saoudite, le président Aoun se réunissait, lui, avec le pape François et plusieurs responsables du Saint-Siège. Un voyage entouré de nombre de spéculations et d’informations contradictoires. Certains médias gravitant dans l’orbite du Hezbollah et du camp aouniste ont fait état d’un appel du Vatican à Bkerké en vue d’engager un dialogue avec le parti chiite parce qu’il fait partie de la mosaïque libanaise. Mais le proche du patriarcat maronite livre à L’OLJ une autre version des faits : « Le Vatican et Béchara Raï sont sur la même longueur d’onde. Et il n’a pas été demandé au patriarche d’engager un dialogue avec le Hezbollah », assure-t-il. Ces rumeurs avaient été alimentées par les propos (en faveur du Hezbollah) tenus par Michel Aoun lors de son entretien à La Repubblica. « Les déclarations du président ont été mal interprétées. Il a voulu rappeler que certains territoires libanais sont encore occupés (par Israël). Et une fois ces espaces libérés, il n’y aura plus besoin de l’arsenal du Hezbollah », explique un proche de Baabda. « Là aussi, il y a un désaccord entre Baabda et Bkerké. Les deux camps divergent sur le positionnement du Liban dans le camp de la moumanaa. Et le patriarche ne peut pas rester les bras croisés face à cela », déclare une personnalité gravitant dans l’orbite de Mgr Raï. « Parler de divergences entre Baabda et Bkerké vise à empêcher les chrétiens de voter pour le Courant patriotique libre lors des législatives », rétorque le proche de la présidence. Les rapports entre Bkerké et les aounistes n’étaient, en effet, pas toujours au beau fixe, surtout en période de campagne électorale. En 2009, le CPL, fondé par Michel Aoun, avait reproché au patriarche Nasrallah Sfeir des déclarations jugées favorables au 14 Mars à la veille du scrutin législatif. Il a donc, selon le parti orange, influencé le vote des chrétiens et orienté leur choix.

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De son côté, le Hezbollah estime que « ce n’est pas le moment de polémiquer avec le patriarche », pour reprendre les termes d’un responsable du parti pro-iranien qui a requis l’anonymat. « Nous n’avons aucun problème à ce que le dialogue se poursuive avec le patriarcat maronite », souligne pour sa part Mahmoud Comati, membre du comité chargé du dialogue entre Bkerké et le parti de Dieu.

Ghada Aoun et Riad Salamé

Autre pomme de discorde entre Baabda et le patriarcat maronite : les poursuites engagées récemment contre certaines banques, ainsi que le bras de fer judiciaire opposant la procureure du Mont-Liban, Ghada Aoun, proche de la présidence de la République, et le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, bête noire de Baabda et ses satellites, notamment le CPL et son chef Gebran Bassil, gendre du locataire de Baabda. Pour ses détracteurs, le chef de l’État joue le tout pour le tout avant l’expiration de son mandat, le 31 octobre prochain, alors qu’il s’est juré d’obtenir la tête de Riad Salamé avant de quitter son poste. De son côté, le patriarche maronite a pris la défense de M. Salamé à plusieurs reprises, se positionnant aux antipodes de Michel Aoun. Dans son homélie de dimanche, il est revenu à la charge, critiquant ouvertement les mesures prises par Ghada Aoun. Il a appelé à mettre un terme « aux mesures prises par un pouvoir judiciaire partial et politisé », ainsi qu’à celles visant les banques. Le prélat n’a, dans ce cadre, pas caché ses appréhensions quant à un torpillage du scrutin à cause de ces mesures. « Ce n’est pas un péché. Le patriarche a toujours pris la défense des postes de première catégorie, comme le gouverneur de la BDL ou le commandant en chef de l’armée », dit le proche du prélat. Du côté de Baabda, on essaie de minimiser l’ampleur de cette mésentente. « Ces critiques ne sont pas adressées à la présidence, et le patriarche a exprimé son point de vue », se contente de dire le proche de Michel Aoun, insistant sur le fait que « le palais n’a rien à voir avec les décisions de Ghada Aoun ». Selon lui, M. Aoun et Mgr Raï sont « en très bon termes » et vont s’entretenir prochainement.

Le fossé n’en finit pas de se creuser entre le président de la République Michel Aoun et le chef de l’Église maronite Béchara Raï. À moins de deux mois des législatives prévues le 15 mai, suivies par la présidentielle programmée pour octobre, les divergences entre les deux pôles maronites du pays se font de plus en plus profondes, ce qui, selon plusieurs observateurs, pourrait...

commentaires (16)

Le jour que l'islam Libanais s’éloignera du "Din ou dawla", nous remballerons nos dignitaires a la maison. Lorsque les Hassounas, Kabalans, Qaouks ou autre Derianes et compagnie se tairont, alors nous remballerons les nôtres a leur paroisse. Quand aux bien pensants qui sont soutenus par les talents du Hezbollah et qui sortent sur les réseaux sociaux ou les journaux pour la désinformation, la provocation ou l'insulte a notre intelligence, ils ne sont pas encore naît ceux qui nous feront fléchir ou changer d'avis. Nous l'emporterons sur l’adversité, le Hezbollah et tous les traîtres qui l'entoure et nous pourrons alors dire comme feu notre Héros, le Président Bachir Gemayel: "Le Liban a gagné" et ce Liban sera pour tous comme NOUS le préconisons et non pas une province islamique de l'Iran ou de Daech.

Pierre Christo Hadjigeorgiou

09 h 33, le 30 mars 2022

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Commentaires (16)

  • Le jour que l'islam Libanais s’éloignera du "Din ou dawla", nous remballerons nos dignitaires a la maison. Lorsque les Hassounas, Kabalans, Qaouks ou autre Derianes et compagnie se tairont, alors nous remballerons les nôtres a leur paroisse. Quand aux bien pensants qui sont soutenus par les talents du Hezbollah et qui sortent sur les réseaux sociaux ou les journaux pour la désinformation, la provocation ou l'insulte a notre intelligence, ils ne sont pas encore naît ceux qui nous feront fléchir ou changer d'avis. Nous l'emporterons sur l’adversité, le Hezbollah et tous les traîtres qui l'entoure et nous pourrons alors dire comme feu notre Héros, le Président Bachir Gemayel: "Le Liban a gagné" et ce Liban sera pour tous comme NOUS le préconisons et non pas une province islamique de l'Iran ou de Daech.

    Pierre Christo Hadjigeorgiou

    09 h 33, le 30 mars 2022

  • Sans vouloir les nommer, trois Présidents de la République n'étaient pas destinés à occuper ce poste. C'est la raison pour laquelle le pays a dégringolé du sommet jusqu'aux abîmes depuis une trentaine d'années.

    Un Libanais

    21 h 33, le 29 mars 2022

  • Pourquoi perdre son temps avec des discussions stériles avec le HA, CPL, Amal et Baabda? Nous n'avons absolument pas la même vision ! Il y a des Partis Politiques qui sont fiers d'être les Parasites du HA et de l'Iran! Un parasite ne peut survivre de lui-même !

    Marwan Takchi

    19 h 09, le 29 mars 2022

  • Le drame du Liban est lié d’une à l’incompétence de ses hommes politiques qui manquent de charisme, de projet pour tout le pays et d’autre part aux religieux de tout genre, mufti jaafarite, imams, prêtres et j’en passe…ceux qui ont une certaine capacité de renflouer le pays dont doit exilés soit muselés sur place

    Karam Georges

    17 h 07, le 29 mars 2022

  • comme c’est bizarre de voir certains décérébrés dénoncer l’implication du patriarche dans les affaires de son pays alors que pas plus tard qu’hier un certain mufti Jaafari de son nom monté à La Tribune pour faire un discours concernant la marche à suivre du pays en menaçant et vociférant travestissant toutes les vérités et qui s’est permis de tracer les lignes à suivre par le gouvernement pour lui asséner de prendre comme alliés russes et iraniens sans que cela ne choque leur dignité ou ne les déstabilise ou remue leur sentiment patriotique parce qu’il représente les vendus qu’ils appuient et à qui ils veulent céder le pays sans état d’âme. Le pire c’est qu’ils n’ont aucune honte à se placer du côté des tortionnaires et des fossoyeurs du pays, et veulent nous faire croire qu’ils sont patriotes. Vous avez dit bizarre? Comme c’est bizarre.

    Sissi zayyat

    14 h 57, le 29 mars 2022

  • Est-il raisonnable qu’il y est mésentente ou divergence entre un chef religieux et un président de la république ? Pourquoi le patriarche se mêle sans cesse de politique avant pendant et après la messe . Lui qui est censé vaquer à la prière ou à se pencher plutôt sur la situation précaire d’un grand nombre de familles chrétiennes.

    Hitti arlette

    14 h 28, le 29 mars 2022

  • Mgr, il serait temps d’adopter la même position que feu Mgr Sfeir et de vous adresser à tous les citoyens de ce pays et en particulier aux chrétiens, puisque vous êtes censé les représenter, en n’oubliant pas d’elargir le front de défense avec les représentants sunnites patriotiques ainsi que opposants chiites pour les réveiller de leur coma en leur expliquant ce que ce président fantoche a fait d’eux. Un paillasson pour les vendus pour s’essuyer les pieds avant de trôner dans le fauteuil au prix de leur dignité et de labeur de toute une vie qu’ils ont saccagé lui et son ânon par amour de l’argent et du pouvoir. Il n’est pas à sa dernière trahison, il est prêt à vendre le pays et son peuple pour faire accéder son ânon au palais une fois qu’il a obtenu le délabrement de ce qui reste du système économique et s’attaquerait à l’autre pilier qui est l’institution militaire de notre pays si cette dernière se mettrait en travers de son chemin, juste pour permettre aux vendus de régner pour nous achever. A voir sa détermination délirante de destruction, il serait plus judicieux d’anticiper ses actes en vous adressant vite, clairement et courageusem au peuple avant qu’il ne soit trop tard et qu’il ne s’attaque à votre représentativité puisque qu’il ne recule devant rien et ne cesse de répéter avec son ânon que les seuls représentants des chrétiens ce sont eux, eux, qui les ont détruit et anéanti et que certains les voient encore comme leurs sauveurs. La situation est grave, agissez

    Sissi zayyat

    13 h 05, le 29 mars 2022

  • Ce qui manque le plus à l'un c'est la fibre patriotique, en plus du sens des réalités du 21ème siècle ( à son age c'est courant ) ...quant au deuxième, ce qui est important pour lui ce sont ses habitudes religieuses et les rituels en grande pompe,,,entrecoupés, il est vrai, d'affirmations répétées depuis des années...qui tombent dans le vide moral qu'est devenue notre société...! - Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 46, le 29 mars 2022

  • Pas etonnant. Le CPL n' est plus un parti libanais. Depuis longtemps. Pour exister sur la carte politique, ils ont prefere la milice iranienne a Bkerke. ..,

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 39, le 29 mars 2022

  • Les uns comme les autres cachent la poussière sous le tapis. Il n'y a déjà plus de place et nous voyons tous que rien ne va plus. Alors au lieu de continuer a jouer au chat et a la souris, il est temps que les choses sortent au grand jour et que le Patriarcat Maronite prenne ses responsabilités et nomme un traître un traître et un terroriste un terroriste. Les Patriarcats, au Liban, qu'ils soient Maronite, Orthodoxes, Latin, Araméens, Arméniens ou Chaldéens sont tous responsables de tous les Chrétiens du pays et non seulement des ouailles de leur paroisse respective comme ils sont aussi responsables de nos concitoyens Sunnites, Druzes, ou Chiites en tant que concitoyens Libanais. Ils ont donc tous le devoir d'agir et de réagir a la situation actuelle avec fermeté, clarté et détermination en face de adversité qu'ont créé le Hezbollah et ses alliés CPL, Amal, PSNS, etc... Il faut dire la vérité, toute la vérité au peuple même si elle doit faire mal. Aoun a été convoqué au Vatican pour être tancé. Il a te prévenu que sa politique conduit le pays vers plus de malheur et que le prix a payer sera lourd pour le peuple. Rien ne peut nous mettre d'accord avec le Hezbollah s'il ne désarme pas et comme il ne le fera pas et a commence a se comporter comme Ghazi et Addoum, il nous dirige droit vers la confrontation qu'il pense emporter. Qu'il relise l'Histoire et qu'il comprenne qu'il trouvera les FL en face avec la majorité du peuple Libanais dans toutes ses composantes.

    Pierre Christo Hadjigeorgiou

    09 h 12, le 29 mars 2022

  • d’ici a 1 dizaine d’année, il ne restera plus aucun Chretien au Liban, et toutes leurs propriétés vendues.

    Abdallah Barakat

    09 h 09, le 29 mars 2022

  • 2 abrutis

    Abdallah Barakat

    09 h 07, le 29 mars 2022

  • Donc en gros, ils sont opposés sur tout, et sont en très bons termes ! A bon entendeur :((

    Pandora

    08 h 39, le 29 mars 2022

  • "… les divergences entre les deux pôles maronites du pays se font de plus en plus profondes …" - Je vois un représentant des maronites du Liban, et un représentant des pasdarans. Alors de quels pôles parlez-vous?

    Gros Gnon

    08 h 23, le 29 mars 2022

  • Merci pour cette éclairante analyse sur les antagonismes entre le patriarche et le président.

    Vincent Gélinas

    07 h 10, le 29 mars 2022

  • PATRIARCHE, DEBARRASSEZ-VOUS DES DEUX LIEUTENANTS INFERNAUX DE LA TRINITE DU MAL DE BELZEBUTH LE BARBU ET QUI SONT LES DEUX BELIERS BISCORNUS SATANIQUES DE VOTRE BERGERIE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 33, le 29 mars 2022

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