Le président libanais Michel Aoun (d) aux côtés du pape François lors de son audience privée au Vatican, le 21 mars 2022. Photo Handout / VATICAN MEDIA / AFP
Le président libanais, Michel Aoun, en visite à Rome depuis dimanche, a affirmé qu'il "sait" que le pape François, qui l'a reçu lundi au Vatican, "entreprendra une initiative pour aider" le Liban qui se débat contre une grave crise économique et politique depuis 2019.
Dans un entretien au journal italien La Repubblica publié mardi, le chef de l'Etat a pris, une nouvelle fois, la défense du Hezbollah, son allié chiite accusé par ses détracteurs de prendre l'Etat libanais en otage et de dominer la scène politique grâce à son arsenal illégal.
"Je sais que le pape entreprendra une initiative pour nous aider, mais il ne nous revient pas de décider nous-mêmes des conditions de cette aide ni de ses composantes", a répondu le président Aoun à une question de la journaliste Gabriella Colarusso. Lorsque celle-ci lui a demandé si le pape lui a confirmé qu'il se rendrait au Liban, comme l'a annoncé la veille la présidence libanaise, citant le Souverain pontife, M. Aoun s'est contenté de répondre : "Nous attendons la venue du pape depuis longtemps. Je lui ai renouvelé l'invitation à se rendre au Liban".
"Le Liban occupe une place particulière dans mes prières et mes préoccupations, et je m'y rendrai pour y renouveler l'espérance", a déclaré lundi le pape François, cité par la présidence libanaise. Toutefois, le communiqué publié par le Vatican ne mentionne à aucun moment ces propos. Le Saint-Siège a toutefois évoqué une rencontre "cordiale" d'une "trentaine de minutes" entre le président libanais et le Saint-Père, durant laquelle "les bonnes relations diplomatiques" entre le Liban et le Vatican ont été soulignées, à l'occasion de leur 75ème anniversaire. "L'attention s'est portée sur les graves problèmes socio-économiques du pays, ainsi que sur la situation des réfugiés", rapportait lundi le site d'information officiel du Vatican . "L'aide de la communauté internationale, les prochaines élections législatives (du 15 mai) et les réformes nécessaires doivent contribuer à renforcer la coexistence pacifique entre les différentes confessions religieuses qui vivent au pays du Cèdre", poursuivait le Vatican.
"La résistance à l'occupation n'est pas terrorisme"
Interrogé au sujet de l'hégémonie du Hezbollah, le président Aoun a pris la défense de son allié chiite. "Le Hezbollah n'a aucune influence sur la situation sécuritaire des Libanais", a-t-il estimé. "Le Hezbollah a des armes. Il a libéré le Liban-sud de l'occupation israélienne. Il est composé de Libanais du Sud qui ont souffert de l'occupation israélienne. La résistance à l'occupation n'est pas du terrorisme", a-t-il affirmé, alors que le Hezbollah est classé comme organisation terroriste par plusieurs pays.
Parallèlement à l'entretien qu'il a donné, le président Aoun s'est entretenu mardi à Rome avec son homologue italien, Sergio Mattarella, qu’il a félicité pour sa réélection, le 29 janvier dernier, pour un nouveau mandat de sept ans. M. Aoun sera de retour au Liban ce mardi soir.
Le président libanais, Michel Aoun (g), mardi à Rome avec son homologue italien, Sergio Mattarella. Photo H/Paolo Giandotti via REUTERS
Après leur rencontre, le président Aoun a salué le rôle de l'Italie, "premier partenaire commercial européen" du Liban, et affirmé que "le Liban est déterminé, malgré les difficultés, à panser ses plaies en dépit des crises dont il souffre". Il a également estimé que son pays "ne peut plus supporter le fardeau des déplacés syriens, et les pays donateurs doivent les inciter à retourner en Syrie", ce à quoi le président Mattarella a répondu : "Il faut œuvrer au retour des réfugiés syriens en parallèle des efforts pour une solution politique", alors que les autorités libanaises refusent de lier ce retour à une telle solution.
Le chef de l'État italien a estimé, en outre, que "la stabilité du Liban est la clé de la stabilité de l'Orient", dans des propos cités par la présidence libanaise. "L'Italie poursuivra son soutien au développement économique et social du Liban, qui reste un modèle en termes d'équilibres et de préservation des droits de tous", a-t-il ajouté.
Le Vatican a manifesté, à maintes reprises, son inquiétude pour le Liban, et assuré être prêt à aider son peuple, alors que le pays continue de s'enliser dans une crise pluridimensionnelle inédite. Début février, le secrétaire pour les relations avec les Etats, Mgr Paul Richard Gallagher, avait appelé depuis Beyrouth la communauté internationale à "aider le Liban à mettre un terme à sa crise économique". L'archevêque avait également assuré que le Vatican était prêt à parrainer un dialogue national entre les partis politiques, si une demande officielle en est faite par les formations concernées. Il s'était montré, lors d'une réunion avec le président, inquiet pour le Liban, estimant que "l'avenir du pays n'est pas assuré", et avait profité de cette occasion pour critiquer la classe politique et annoncer que le pape se rendra prochainement à Beyrouth, sans donner de date.
Fin novembre, le Souverain pontife avait assuré au Premier ministre, Nagib Mikati, en visite officielle au Vatican, qu'il œuvrait à "un effort commun" pour aider le Liban à se redresser. Lors d'une visite à Chypre début décembre, il s'était dit "très préoccupé" par la crise libanaise.
Pour sa part, le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, a été reçu mardi par son homologue italien, Luigi di Maio, a rapporté l'Agence nationale d'information en citant l'agence de presse italienne. Les deux ministres ont discuté des "relations bilatérales et des questions régionales d'intérêt commun, dont la guerre en Ukraine". M. Di Maio s'est félicité de "la position claire prise par le Liban, parmi les premiers pays du Moyen-Orient à condamner l'attaque de la Russie contre l'Ukraine et à voter en faveur de la résolution de l'Assemblée générale des Nations unies condamnant la Russie". Enfin, le ministre italien a souligné,"l'importance stratégique du Liban pour l'Italie en ce qui concerne la stabilité de la région méditerranéenne et du Moyen-Orient".
"le pape entreprendra une initiative pour le Liban". Aide-toi et le pape t'aidera! Que lui, président, cesse d'abord de soutenir le principal ennemi du Liban. Ses propos légitimant les armes et les actions du Hezbollah sont invraisemblables! Syndrome de Stockholm ou intérêts électoraux?
07 h 32, le 23 mars 2022