L’initiative koweïtienne bientôt remise sur le tapis

Le mois de mars devrait être pour le Liban celui de la remise sur le tapis de l’initiative koweïtienne, lancée en janvier, visant à normaliser ses rapports perturbés depuis octobre dernier avec les pays du Golfe, Arabie saoudite en tête. C’est en tout cas cette impression qui se dégage dans certains cercles politiques et diplomatiques libanais, deux jours après la visite éclair, samedi dernier, du secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmad Aboul Gheit, accompagné de son adjoint, Houssam Zaki, pour prendre part à une cérémonie, tenue au Sérail, récompensant la meilleure thèse de doctorat en droit dans le monde arabe. Un déplacement qui est intervenu près de deux semaines avant une tournée beyrouthine prévue le 15 mars pour le chef de l’organisation panarabe.

En janvier dernier, le Koweït avait mené une mission diplomatique à Beyrouth au nom des monarchies du Golfe et avec le soutien des puissances occidentales. Lors d’une visite officielle de deux jours, les 22 et 23 janvier, le chef de la diplomatie koweïtienne Ahmad Nasser al-Mohammad al-Sabah avait remis aux autorités une feuille de route pour aider le Liban à rétablir ses liens tendus avec les pays du Golfe. Le document comprenait plusieurs requêtes et certains points considérés comme rédhibitoires, comme l’appel au respect de la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité, qui porte entre autres sur « le désarmement et la dissolution de toutes les milices » et « l’extension du contrôle du gouvernement libanais sur tout son territoire », dans une allusion à l’arsenal du Hezbollah. Le Liban avait présenté sa réponse officielle à cette feuille de route le 31 janvier, et attend depuis la réaction arabe. Dans sa réponse, Beyrouth, rappelons-le, s’engageait à respecter l’accord de Taëf (qui a mis fin en 1990 à quinze ans de guerre civile au Liban, NDLR), à mener une politique de distanciation par rapport aux axes régionaux, ainsi qu’à l’application des résolutions internationales. En ce qui concerne la résolution 1559, les autorités libanaises ont estimé qu’elle est difficile à mettre en œuvre dans les circonstances actuelles, étant donné qu’elle est liée à la sécurité et la souveraineté du Liban, l’arrêt des agressions israéliennes et la libération des territoires libanais occupés.

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Le Liban attend la réaction des pays du Golfe à sa réponse

Placé dans ce contexte, le but du déplacement du numéro un de la Ligue arabe à Beyrouth samedi allait bien au-delà de la participation à une cérémonie officielle. Le diplomate aurait pu se contenter de dépêcher un représentant personnel pour remplir cette tâche protocolaire, comme il le fait même lorsqu’il est question de dossiers compliqués, comme la formation d’un gouvernement, pour ne citer que cet exemple. La visite du diplomate égyptien pourrait donc être le prélude de sa tournée attendue à Beyrouth. « Avec le Premier ministre, Nagib Mikati, qu’il a rencontré en marge de la cérémonie de samedi, le secrétaire général de la Ligue arabe n’a pas évoqué les questions politiques, préférant les garder pour la mi-mars », confie ainsi à L’Orient-Le Jour un diplomate proche du Premier ministre, sous couvert d’anonymat. « C’est lors de la tournée de mars que sera remise sur la table l’initiative koweïtienne », croit-il savoir, précisant que le diplomate arabe se réunira avec les responsables libanais en marge d’une conférence organisée par la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (Escwa). En attendant, le secrétaire général adjoint de la Ligue arabe, Houssam Zaki, a anticipé le déplacement de son supérieur hiérarchique, en évoquant la feuille de route koweïtienne dans un entretien accordé durant le week-end à l’agence égyptienne d’information MENA au Liban. Il a réitéré l’appui de l’organisation panarabe à la démarche des pays du Golfe, affirmant en « comprendre les motifs ». « La Ligue est entrée en contact avec les parties koweïtienne et libanaise en vue de dépasser le désaccord et pousser les pays arabes à soutenir le Liban qui constitue toujours une composante essentielle dans le système de travail arabe commun », a-t-il souligné.

Le Liban à la tête du conseil de la Ligue arabe

Ne voulant pas commenter ces déclarations, le diplomate proche du chef du gouvernement se contente de souligner que le Liban officiel attend toujours la réaction arabe à sa réponse à la feuille de route koweïtienne. Et cela ne saurait plus tarder. Car le ministre des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, devrait se rendre au Caire le 9 mars pour présider le conseil de la Ligue arabe, c’est-à-dire une réunion des chefs de la diplomatie des pays membres de l’organisation. « Les Arabes pourraient profiter de cette occasion pour formuler leurs remarques sur la réponse libanaise devant M. Bou Habib personnellement », estime un diplomate libanais installé au Caire, contacté par L’OLJ. Selon lui, le ministre libanais pourrait même avoir une idée de la réaction arabe à l’issue de la réunion du Conseil de coopération du Golfe qui se tient généralement peu avant le conseil de la Ligue arabe. « Pour le moment, c’est le silence radio du côté des monarchies du Golfe. Mais je crois que rien n’a changé : ces pays veulent que le Liban se libère du joug du Hezbollah », souligne le diplomate.