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Culture - Livre

Maroun Hakim : L’art, ma vie

À 71 ans, le peintre et sculpteur livre aujourd’hui les coulisses de son travail polyvalent. Non à travers les toiles, la pierre, le bois, la céramique ou le fer, mais dans les pages d’un livre grand format, de 656 pages, déployant une carrière artistique qui s’étend sur plus d’un demi-siècle de labeur et de créativité débordante.

Maroun Hakim : L’art, ma vie

Maroun Hakim, une œuvre à la fois témoignage et aveu personnel. Photo DR

Les amateurs des arts plastiques made in Lebanon seront ravis de retrouver en librairie une monographie trilingue qui retrace le parcours de l’artiste Maroun Hakim sous l’intitulé L’art, ma vie (édité à compte d’auteur). Avec des textes en arabe, français et anglais écrits par lui-même, ses proches, amis et critiques (Akl Awit, Riad Fakhoury, Joseph Abou Rizk, Joseph Tarrab et bien d’autres), ce livre-pavé, bourré de photos familiales ainsi que d’œuvres signées et (non) exposées, retrace les différentes évolutions des étapes d’une vie vouée à la création du beau.

Une vie où l’art se mêle intimement à tout ce qui touche les sentiments, les émotions, les remous sociaux, l’amour, la famille. Ce long fleuve jamais tranquille, toujours émaillé d’impondérables, mais source inépuisable d’inspiration, de dépassement et de renouvellement.

Maroun Hakim est né en 1950 à Mazraat Yachouh (Metn, Mont-Liban), où ses parents entretiennent une étroite intimité avec la terre. À 12 ans, le jeune garçon s’essaie au polissage des pierres et à dompter les rochers. Dès que ses études au Collège des sœurs de la Sainte-Famille sont terminées, son premier saut sera à l’institut des beaux-arts de l’Université libanaise. Rachid Wehbé et Joseph Matar détectent vite le don et le talent de cet étudiant bouillonnant épris d’art et le prennent sous leur ombrelle.

Coup de la fatalité : en 1975, alors que la guerre fratricide démarre, l’artiste, piaffant de sortir dans l’arène publique, obtient son diplôme. Toujours prêt à affronter toutes les situations, déjà amoureux d’aventures et d’expérimentations artistiques, le jeune homme fonce vers Rome pour y apprendre la magie et l’alchimie de la céramique. Sacré maître de sa nouvelle discipline, il s’envole vers Rabat pour retrouver une lumière chaude et vive qui baignera par la suite sa palette et toutes ses toiles.

Style volubile

La lumière, surtout de l’Orient et du Liban de ses racines, sera omniprésente dans son langage agile, à travers l’usage des couleurs vibrantes, toniques, dynamiques, énergisantes. Et sa touche, faite d’audace, de modernité et d’inédit, tout en faisant des clins d’œil malicieux à plusieurs tendances picturales, se singularise par le biais d’un pinceau usant aussi bien l’acrylique, l’aquarelle, la gouache que l’huile. Sans oublier ses pastels et ses dessins à l’encre de Chine. Ses dessins, ses ébauches, ses croquis sont là pour évoquer une griffe et un coup de plume servis par un style volubile.

Artiste complet, Maroun Hakim s’essaie aussi au burin, n’hésitant pas à faire jaillir des formes nouvelles, en marbre notamment, avant de s’intéresser plus tard au bois dans ses innombrables textures. Naîtra une œuvre polymorphe, quasi insaisissable dans ses embranchements, ses évolutions, son inlassable quête, parfois au prix d’innombrables périls de mauvaises perceptions, pour un dire différent, nouveau, dans le sillage d’une vision alliant abstraction échevelée et représentation précise. Sa peinture avec ses collages et ses montages de matériaux insoupçonnés tels que les étoffes et le papier sera qualifiée de « toile sculptée » par certains exégètes. Une expression inattendue pour ces années 1980.

Empreinte de sensualité et de douceur ou teintée de violence et du choc dru des tonalités, caresse ou éclaboussure, la peinture de Maroun Hakim ne connaît pas de frontière entre ses images venues aussi bien d’un Orient chamarré de couleurs que des rigueurs occidentales dans le tracé équilibré des lignes.

Maroun Hakim, « Night of the Mask », marbre noir, 32 x 20 x 13 cm, 2010. Photo DR

Les trois clés du succès

Au fil des pages de cet ouvrage, apparaît le portrait de Maroun Hakim, artiste qui croit ferme en trois clés du succès, à savoir le don, la culture et l’approfondissement des techniques de l’art sous ses diverses formes. L’artiste a signé une prolifique création à travers ses ateliers (en tête de liste « L’atelier du bonheur » en son jardin à Mazraat Yachouh) et ses 30 expositions à Beyrouth (« Station des arts », « Damo », « Noah’s Ark », « Épreuve d’artiste »), dans le monde arabe et en Europe. Sans oublier ses sculptures qui figurent dans de nombreux jardins et espaces publics au Liban comme à l’étranger.

À la fois témoignage et aveu personnel, son œuvre reflète son intériorité à fleur de peau, mais aussi sa sensibilité à un environnement social déjà trouble, depuis les premières canonnades de la guerre civile jusqu’aux répits successifs pour finir avec l’effondrement actuel. Tentaculaire et changeant constamment de cap, elle englobe l’inspiration et le chant de la nature, du corps humain avec la parité homme/femme, la transcendance religieuse (mar Maroun, mar Charbel ou saint Michel), ainsi que les scènes de foule en déroute ou des nus saisis dans l’impudeur frémissante d’une chair offerte.

Un livre hybride où abondent pêle-mêle un trop-plein d’articles critiques, d’écrits personnels et surtout un surplus de photos de l’artiste et de sa famille. Et même des œuvres tous azimuts. Fallait-il autant montrer sans une sélection plus restrictive ? Livre d’art, album de famille, manifeste artistique personnel, hommage appuyé ? L’art, ma vie est tout cela à la fois. Et renvoie un peu à la pensée de Nicolas Boileau : « Souvent trop d’abondance appauvrit la matière. »

Conçu pour dévoiler le riche parcours et le long cheminement d’un artiste plasticien libanais, par-delà la joie, le souci permanent et la fièvre de créer, l’ouvrage de Maroun Hakim reste cependant un moment de réflexion. Réflexion, témoignage et volonté non seulement à l’attachement d’une terre entre destruction et reconstruction, mais aussi un regard sur le passé d’un pays, son effervescence, son chaos et sa progressive fragmentation…

Les amateurs des arts plastiques made in Lebanon seront ravis de retrouver en librairie une monographie trilingue qui retrace le parcours de l’artiste Maroun Hakim sous l’intitulé L’art, ma vie (édité à compte d’auteur). Avec des textes en arabe, français et anglais écrits par lui-même, ses proches, amis et critiques (Akl Awit, Riad Fakhoury, Joseph Abou Rizk, Joseph Tarrab et bien...

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J'AVAIS DEMANDÉ À UN ARTISTE QUE JE CONNAIS DE LA MÊME UNIVERSITÉ DES BEAUX ARTS QUI A TERMINÉ SES ÉTUDES EN 70/71. JEAN TANNOUS, S'IL CONNAIT MAROUN HAKIM. IL M'A DIT QU'IL SE SOUVIENT PARFAITEMENT DE CE NOM, MAROUN HAKIM. UN ARTISTE DOUÉ ET QUI ÉTAIT LE MEILLEUR DE SA PROMOTION. BRAVO L'ARTISTE.

Gebran Eid

09 h 57, le 21 décembre 2021

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Commentaires (1)

  • J'AVAIS DEMANDÉ À UN ARTISTE QUE JE CONNAIS DE LA MÊME UNIVERSITÉ DES BEAUX ARTS QUI A TERMINÉ SES ÉTUDES EN 70/71. JEAN TANNOUS, S'IL CONNAIT MAROUN HAKIM. IL M'A DIT QU'IL SE SOUVIENT PARFAITEMENT DE CE NOM, MAROUN HAKIM. UN ARTISTE DOUÉ ET QUI ÉTAIT LE MEILLEUR DE SA PROMOTION. BRAVO L'ARTISTE.

    Gebran Eid

    09 h 57, le 21 décembre 2021

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