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Politique - Formation du gouvernement au Liban

Consultations parlementaires : le déroulé de la journée qui a mené à la désignation de Mikati

Le Hezbollah et le Futur soutiennent le milliardaire sunnite.

Consultations parlementaires : le déroulé de la journée qui a mené à la désignation de Mikati

Le président de la République, Michel Aoun, et l'ex-Premier ministre Nagib Mikati, à Baabda, le 26 juillet 2021. Photo Dalati et Nohra

Onze jours après la récusation du Premier ministre désigné Saad Hariri, au terme d'un bras de fer politique qui a duré neuf mois, des consultations parlementaires contraignantes ont eu lieu lundi à Baabda et ont mené à la désignation du milliardaire sunnite de Tripoli et ex-Premier ministre Nagib Mikati.

Tout au long de la journée, le chef de l'Etat, Michel Aoun, a reçu l'ensemble des groupes parlementaires qui ont nommé la personnalité sunnite qu'ils souhaitent voir former et présider le futur cabinet, ou s'en sont abstenus. M. Mikati a obtenu, à l'issue de ces consultations, 72 voix en sa faveur, contre 42 abstentions et une voix, celle du député indépendant Fouad Makhzoumi, en faveur du diplomate Nawaf Salam.

Voici le déroulé de cette longue journée de consultations et les prises de position des différents groupes et protagonistes.

Les consultations ont commencé à 10h30, le président de la République recevant l'ancien Premier ministre Nagib Mikati, suivi de Saad Hariri . Dans une courte déclaration à l'issue de son entretien, le leader du Courant du Futur et ex-Premier ministre a indiqué avoir informé le président qu'il soutenait la nomination de Nagib Mikati et exprimé l'espoir qu'un cabinet dirigé par ce dernier serait "formé au plus tôt", affirmant que la situation du pays ne pouvait plus souffrir de délais. L’ancien Premier ministre Tammam Salam a pour sa part également nommé M. Mikati, plaidant pour la formation d’un "cabinet de spécialistes", à même de mettre un terme à l’effondrement du pays. Tant MM. Hariri que Salam ont souligné la nécessité de respecter les procédures constitutionnelles, M. Salam insistant sur le fait que "la coopération de tous, loin de tous obstacles délibérés", était nécessaire, dans une allusion au camp aouniste. Ils ont été suivis par le vice-président de la Chambre, Elie Ferzli, qui a nommé Nagib Mikati. Le groupe parlementaire du Futur de M. Hariri a lui aussi nommé le milliardaire sunnite, a annoncé au nom du bloc le député Samir al-Jisr après l’entretien avec le président Aoun.

Soutien du Hezbollah
Le Hezbollah a également annoncé qu’il nommait M. Mikati. "Aujourd'hui, avec l'apparition d'indices sur la possibilité de la formation d'un gouvernement, nous avons nommé Najib Mikati, ce qui reflète le sérieux de notre engagement à former un cabinet", a annoncé le chef du groupe parlementaire de la formation chiite pro-iranienne Mohammad Raad, à l'issue de son entretien avec le président Aoun.

Lors des dernières consultations parlementaires, le puissant parti s'était abstenu de nommer Saad Hariri, qui avait jeté l'éponge au bout de neuf mois, après avoir constaté l'impossibilité de former une équipe ministérielle. Au cours d'une interview diffusée sur la chaîne al-Jadeed le soir de l'annonce de sa récusation, le 15 juillet, M. Hariri avait indirectement accusé le Hezbollah de ne pas l'avoir aidé dans sa tâche.

Le groupe parlementaire "National" (comprenant notamment le député Marada Tony Frangié) a également nommé M. Mikati, de même que le Parti socialiste progressiste (du leader druze Walid Joumblatt), dont la délégation était dirigée par Taymour Joumblatt. Le groupe du "Centre indépendant" de Nagib Mikati a nommé son leader.

Le bloc du Parti syrien national social a lui aussi soutenu la nomination de M. Mikati, et même le groupe parlementaire de Fayçal Karamé a annoncé, dans un "signe de bonne volonté", qu’il renonçait à nommer son chef : deux de ses membres ont nommé M. Mikati, et les deux autres, dont M. Karamé, se sont abstenus de nommer un candidat. Le leader druze Talal Arslane, de la formation "Garantie de la montagne", ne s'est pas rendu à Baabda et a présenté ses excuses pour son absence sur son compte Twitter.

Le député Nohad Machnouk, ancien membre du bloc du Futur, dont les relations se sont détériorées avec M. Hariri, a annoncé sur Twitter qu’il ne participerait pas aux consultations. "Je ne vois aucune issue à ce processus", a affirmé l’ancien ministre de l’Intérieur. "La clé française n’est pas capable pour le moment d’ouvrir les portes arabes qui doivent aider le Liban", a-t-il ajouté, prévenant les Libanais que "le pire était à venir".

Après une interruption en milieu de journée, les consultations ont repris en début d’après-midi avec le bloc de la République forte (Forces Libanaises) qui ont confirmé leur décision de ne nommer personne pour former le gouvernement. "Nous n’accorderons pas de couverture au pouvoir politique qui n’a pas modifié ses pratiques, ses agissements et sa façon de penser après le 17 octobre", a annoncé au nom du groupe parlementaire le député Georges Adwane. "Nous n’allons pas participer à ce gouvernement et nous continuerons à œuvrer chaque jour pour débarrasser les gens au plus vite de ce pouvoir", a-t-il ajouté, réitérant la demande constante des FL de tenir des élections anticipées.

Parmi les députés indépendants, le chef de l'Organisation populaire nassérienne, Oussama Saad, Chamel Roukoz et Jamil Sayyed n'ont nommé personne, Fouad Makhzoumi a nommé le diplomate Nawaf Salam, tandis que Michel Daher, Eddy Demirdjian, Jean Talouzian et Jihad Samad ont nommé Nagib Mikati.

Le groupe parlementaire du mouvement Amal du président de la Chambre, Nabih Berry, a de son côté nommé M. Mikati, a annoncé le député Anouar el-Khalil. "Nous espérons que M. Mikati pourra former rapidement son cabinet" composé de technocrates non affiliés à des partis politiques, a lancé M. Khalil.

Le CPL ne nomme personne
Le groupe parlementaire aouniste n'a, de son côté, nommé personne. Cette décision a été prise "parce que Fayçal Karamé n'était pas candidat et que Nawaf Salam n'a été nommé par personne, ce qui fait qu'il ne restait qu'une seule personne en lice, a souligné le chef du parti aouniste, Gebran Bassil. Nous avons une expérience peu encourageante avec Nagib Mikati". "Nous espérons que ses actes nous feront changer d'avis et nous aiderons à une formation rapide du cabinet", a-t-il ajouté.

Les députés arméniens n'ont nommé personne également. 

M. Mikati, âgé de 65 ans, a déjà été Premier ministre à deux reprises : en 2005 après l’assassinat de Rafic Hariri, il avait dirigé un gouvernement qui avait supervisé la tenue d’élections, après le retrait syrien du Liban. En 2011, il était revenu à la tête du gouvernement avec l’appui du camp du 8 Mars qui avait forcé Saad Hariri à démissionner. Il s’est depuis réconcilié avec le chef du Courant du Futur.

Ces consultations ont été organisées alors que Saad Hariri avait annoncé le 15 juillet qu'il renonçait à former un gouvernement, près de neuf mois après avoir été nommé et au moment où le pays est confronté à la pire crise socio-économique de son histoire. M. Hariri avait été désigné Premier ministre en octobre 2020 et devait mettre en place une équipe censée lancer des réformes indispensables pour débloquer notamment des aides internationales cruciales. Mais après des mois de marchandages interminables avec le camp du président libanais, il a fini par jeter l'éponge en raison notamment du conflit politico-personnel qui l'oppose à M. Aoun et son gendre, Gebran Bassil.

M. Mikati devrait sans tarder entamer ses concertations pour la formation de son équipe. Selon la chaîne MTV qui cite ses proches, le député de Tripoli s’est donné jusqu’au 4 août pour mettre en place son gouvernement. Il n’a pas besoin de plus pour sonder les intentions de ses interlocuteurs politiques. 

Le président Aoun a estimé que le prochain gouvernement devra superviser les élections parlementaires qui doivent se tenir au printemps prochain. "Le prochain gouvernement sera un gouvernement de sauvetage dont les tâches incluent également la supervision des élections législatives", a-t-il affirmé, lors d'un entretien avec une délégation de sénateurs français appartenant au groupe d'amitié franco-libanais. Des élections présidentielle, parlementaire et municipale sont prévues en 2022 au Liban. Le chef de l'État a également réitéré son attachement à l'initiative française, lancée le 1er septembre dernier par le président Emmanuel Macron, pour la formation d'un cabinet de sauvetage.

Milliardaire
Alors que la classe politique semble s'être accordée sur le choix de M. Mikati, le mouvement de protestation n'est pas en faveur du milliardaire. Des militants s'étaient rassemblés dimanche soir devant le domicile de M. Mikati, face à Zeitouna Bay à Beyrouth, a rapporté ThawraMap sur son compte Instagram. "Voleurs", "Tout le pays est corrompu", ont crié les protestataires. Sur le terrain, à la faveur de l'espoir de la formation d'un cabinet, la livre libanaise est brutalement montée en flèche lundi, s'échangeant autour de 17.000 livres libanaises (L.L.) alors qu'elle avait dépassé récemment le pic historique de 22.000 pour un dollar. C'est la remontée la plus rapide de la monnaie locale face au billet vert depuis le début de la crise économique en octobre 2019.

Selon le dernier classement annuel publié par le magazine Forbes, Najib Mikati et son frère Taha, qui ont fait fortune dans les télécoms, figurent parmi les six personnes les plus riches au Liban, aux côtés de quatre membres de la famille de l’ancien Premier ministre assassiné Rafic Hariri. Le Premier ministre Najib Mikati et son frère Taha ont été classés à la 377e place sur 1226 milliardaires dans le monde avec une fortune estimée à 3 milliards de dollars chacun, contre 2,8 milliards de dollars chacun en 2011 (409e place). En 2019, la procureure près la cour d'appel du Mont-Liban, la juge Ghada Aoun, avait engagé des poursuites contre Nagib Mikati, son fils Maher et son neveu Azmi (le fils de Taha Mikati), et contre la Banque Audi pour enrichissement illicite par le biais de prêts au logement subventionnés.

Onze jours après la récusation du Premier ministre désigné Saad Hariri, au terme d'un bras de fer politique qui a duré neuf mois, des consultations parlementaires contraignantes ont eu lieu lundi à Baabda et ont mené à la désignation du milliardaire sunnite de Tripoli et ex-Premier ministre Nagib Mikati.Tout au long de la journée, le chef de l'Etat, Michel Aoun, a reçu l'ensemble des...

commentaires (9)

On peut dire que les menaces sérieuses de sanctions ont fonctionné si on ne connaissait pas la nature de ces gens. Ils essaient la même méthode qu’ils appliquent aux citoyens libanais aux dirigeants européens et pays amis. Une piqûre de calmant pour reprendre du poil de la bête et sévir lorsque ces derniers auront cru à leur subterfuge. C’est fou ce que certains peuvent être naïfs.

Sissi zayyat

20 h 11, le 26 juillet 2021

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Commentaires (9)

  • On peut dire que les menaces sérieuses de sanctions ont fonctionné si on ne connaissait pas la nature de ces gens. Ils essaient la même méthode qu’ils appliquent aux citoyens libanais aux dirigeants européens et pays amis. Une piqûre de calmant pour reprendre du poil de la bête et sévir lorsque ces derniers auront cru à leur subterfuge. C’est fou ce que certains peuvent être naïfs.

    Sissi zayyat

    20 h 11, le 26 juillet 2021

  • On peut dire que les menaces sérieuses de sanctions ont fonctionné si on ne connaissait pas la nature de ces gens. Ils essaient la même méthode qu’ils appliquent aux citoyens libanais aux dirigeants européens et pays amis. Une piqûre de calmant pour reprendre du poil de la bête et sévir lorsque ces derniers auront cru à leur subterfuge. C’est fou ce que certains peuvent être naïfs.

    Sissi zayyat

    20 h 11, le 26 juillet 2021

  • Si tous ces millliardaires politiques aimaient vraiment leur pays et ses habitants, il ne leur coûterait rien de faire chacun don d'un de leurs milliards honnêtement ou mal acquis pour sortir le pays de la crise. Cela serait suffisant, mais ils ne le font pas et ne le feront jamais...

    Politiquement incorrect(e)

    16 h 44, le 26 juillet 2021

  • Mais rien ne changera juguler une crise n’est pas semblable à une sortie de crise !!! Rien ne changera tant que Régionalement le Liban sera impliqué

    Bery tus

    14 h 58, le 26 juillet 2021

  • Nouveau gouvernement pour diriger la crise mieux que rien .

    Antoine Sabbagha

    14 h 12, le 26 juillet 2021

  • Est-ce que M Mikati va distribuer gratuitement aux libanais de l’habillement de la marque internationale dont il est propriétaire ?? Il est accusé d’avoir détourné l’argent de la Banque de l’Habitat, en offrant de l’habillement, il prouvera le contraire

    Lecteur excédé par la censure

    14 h 02, le 26 juillet 2021

  • LES DEUX BELIERS BISCORNUS DE L,APOCALYPSE DE LA BERGERIE DE RAI SONT COINCES. OU ILS REITERERONT LES NEUFS MOIS PASSES OU ILS SONT CUITS. ET LE PEUPLE ON LUI A VOLE SES ECONOMIES ET A FAIM. L,HISTOIRE RETIENDRA LES NOMS. MAIS IL FAUT JUGER ET CONDAMNER APRES SEQUESTRATION DE TOUS LES BIENS MOBILIERS ET IMMOBILIERS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 08, le 26 juillet 2021

  • Dorénavant notre INUTILE peut s’adonner au TOURISME . OUF pour lui . Pour NOUS RIEN DE NOUVEAU : POINT ZÉRO . A l’occasion du RETOUR DU MILLIARDAIRE , LE GROS BONNET des KOULONS ( qui sera bien sûr VITE BÉNI par les COMMERÇANTS DE DIEU, la COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE , LA SOCIÉTÉ CIVILE , la VILLE DES MISÉRABLES , : LA fiancée de la RÉVOLUTION -, TRIPOLI , bref à tout ce BEAU MONDE DE LA CONVULSION RÉVOLUTIONNAIRE ) on peut vous dire Messieurs / Dames / Révolutionnaires MERCI pour les 22 mois passés !! LA CRISE D’HIER EST LA BLAGUE DE DEMAIN . A suivre .

    aliosha

    12 h 48, le 26 juillet 2021

  • Puisque la mafia au pouvoir est incapable de choisir une personnalite vraiment independante, un choix judicieux aurait ete celui de la personnalite sunnite la plus deteste par le Hezb (et son feal le CPL). Fouad Siniora aurait fait un excellent premier ministre dans ces circonstances.

    Michel Trad

    12 h 31, le 26 juillet 2021

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