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Culture

Lectures d’été pour se changer les idées

Par Maya GHANDOUR HERT, Joséphine HOBEIKA, Colette KHALAF, Gilles KHOURY et Zéna ZALZAL

Lectures d’été pour se changer les idées

Le bon plan de cette fin de semaine ? S’évader de l’actualité politico-socio-économique, devenue trop angoissante, à travers ces huit livres coup de cœur, entre polars palpitants, confidences biographiques bien calculées, et romans romantiques ou habités par la fantaisie la plus débridée. À consommer sans modération...


« Al-Amira wal khatam »/ Rachid el-Daïf

L’un des maîtres du roman libanais de la génération de la guerre civile signe ici une œuvre aussi hallucinée que jubilatoire. Dans Al-Amira wal khatam (Dar as-Saqi), Rachid el-Daïf emmène le lecteur dans les méandres d’un conte allégorique aux multiples ramifications. L’auteur se réinvente en effet un univers littéraire bigarré où il puise dans la mythologie, les récits des ancêtres arabes, les contes fantastiques, les livres sacrés et … son imagination débordante. Le tout servi par une langue arabe simple, lisible et fluide.

Le lecteur suit la trame de la princesse qui, ne trouvant pas l’homme idéal, se réfugie dans le sommeil pour préserver sa jeunesse. Après moult préparatifs et des épisodes entre rêves et réalité, elle entreprend un voyage dans le temps, une sorte de quête du Graal qui guide ses pas vers un maître sage. Ce dernier, dans un lieu sacré nommé Palestine, incrustera la bague de la princesse sur un rocher magique...



« Hanna’s Diaries »/ John McCarthy

Bienvenue dans le monde de Hanna, un adolescent libano-américain élève d’une école internationale à Ras Beyrouth. Son rêve le plus fou ? Être l’auteur de best-sellers en arabe et de recueils de poésie romantique. Né aux États-Unis, il ne cache pas sa grande curiosité envers sa seconde patrie, le Liban, où il vient de débarquer. À travers des dialogues divisés en petits chapitres, rédigés en arabe et en anglais, John McCarthy, homme d’affaires retraité tombé amoureux du pays du Cèdre, livre dans Hanna’s Diaries une collection de petites saynètes piquantes autour de l’histoire du pays, de sa culture, de ses us et coutumes, de son art culinaire, de ses filles et de ses garçons… Belle introduction du pays aux lecteurs étrangers et rafraîchissante (re)découverte pour les Libanais désabusés. Ou lorsqu’un Américain parfaitement arabophone nous réconcilie avec notre identité...


« Passé composé »/Anne Sinclair

Les lecteurs avides de détails sur sa vie privée avec Dominique Strauss-Kahn en seront pour leurs frais. Certes, Anne Sinclair évoque dans Passé composé (éd. Grasset, 374 pages) le scandale du Sofitel, mais sans rien révéler de ses coulisses intimes. De l’homme qu’elle a passionnément aimé, elle se contente d’un lapidaire et élégant : « C’est un magnifique indifférent au monde et aux gens. » Pudique, la journaliste – dont le père avait été la voix radiophonique de la France libre à Beyrouth, apprend-on dans ce livre – revient essentiellement dans ses Mémoires sur son parcours professionnel et les personnalités politiques qu’elle a approchées. Tout en laissant filtrer entre les pages des confidences sur sa propre personnalité, moins assurée qu’il n’y paraît, et très marquée par des relations compliquées avec sa mère. Derrière le regard bleu de celle qui fut l’emblématique intervieweuse de l’émission « 7 sur 7 », se dévoile ainsi une fragilité qui rend cette femme humaine. Et émouvante.


« La Plus-que-vraie »/Alexandre Jardin

Qui dit Alexandre Jardin dit histoires d’amour « sans modération » habitées par la fantaisie la plus débridée et écrites dans un style très littéraire. Son dernier livre ne déroge pas à la règle. Cerné d’un alléchant bandeau annonçant que « les vraies histoires d’amour existent », ce roman-là va loin dans la mise en abîme de son propre personnage d’écrivain amoureux de l’amour. Car, dans La Plus-que-vraie (Albin Michel, 227 pages), le plus romanesque des auteurs français contemporains raconte la rencontre d’un romancier aux passions refroidies, Frédéric Sauvage, avec Alice, une jeune femme délirante qui va bouleverser sa trop tiède existence. Lui qui ne croyait plus à l’amour, sauf dans ses romans, il va le réinventer, le réécrire à quatre mains avec l’extravagante qui l’entraînera dans un voyage rocambolesque ponctué de 58 ruptures et 59 retrouvailles. Une lecture qui ravira les fans de l’auteur du Zèbre.


« Un bruit de balançoire »/Christian Bobin

Isolé du monde dans une cabane au fond des bois, Christian Bobin ne vit que d’écriture. Chez lui, pas de portable ni de mail, mais le simple geste manuel de l’écriture. Pour correspondre, il écrit à la main. Un texte entièrement composé de lettres. Des lettres adressées à sa mère, à un bol, à un nuage, à un ami ou à une sonate, et qui parlent de l’enfance. Mais aussi de l’émerveillement et surtout de la lecture et, par conséquent, de l’écriture. Un bruit de balançoire, en petit format édité chez Folio, nous apprend qu’il faut toujours célébrer le simple et le quotidien. Christian Bobin nous dit : « Parlons tranquillement de la vie puisque nous n’y comprenons rien. » Ses mots poétiques et magiques célèbrent le miracle d’exister à une époque où l’on ne croit plus aux miracles.


« Brèves de solitude »/Sylvie Germain

C’est l’un des tout premiers romans marqués par le coronavirus. À bien lire ces 218 pages de Brèves de solitude (Albin Michel), on découvre que l’épidémie n’est finalement que le décor : le sujet, au final, c’est cette plus ou moins solitude brève qui touche tout le monde, de l’étudiante au réfugié. Une galerie de portraits que brosse Sylvie Germain, émouvants et fragiles. Le décor est planté du début du roman, et ces personnages qui traînent leur solitude se croisent dans un square. Tous ces gens ordinaires voient leur vie balayée par la pandémie. Le square sera fermé, et tous ces personnages se retrouveront enfermés chez eux. Confrontés à eux-mêmes, les masques tomberont, et la romancière dévoile ainsi leur visage intérieur d’une manière bouleversante.


« Cache-cache à l’hôtel »/ M.C. Beaton

« Agatha se jeta à corps perdu dans une frénésie de shopping : nouveau maillot de bain, nouvelle robe de soirée vaporeuse, tenue et sac de plage... » Sauf que c’est un autre type de séjour qu’a en tête James Lacey, son ex-mari, lorsqu’il l’invite pour des vacances dans un petit hôtel décrépit de Burryhill-on-Sea. Dans le tome 17 de la série policière Agatha Raisin (Albin Michel), de M.C. Beaton, la quinquagénaire, à la fois pimpante et revêche selon les circonstances, saisit néanmoins l’occasion de s’évader de son petit village des Costwolds, lassée par son agence de détective qui tourne au ralenti.

Dès leur arrivée, un client de l’hôtel est assassiné et Agatha est la principale suspecte. C’est depuis sa cellule de prison qu’elle devra résoudre l’affaire, alors que James est entre les griffes d’une redoutable prédatrice qui ne le laisse pas insensible. L’enquêtrice délurée se révélera une fois de plus intrépide et avisée. Traduit de l’anglais par Esther Ménévis.


« Les enfants sont rois »/ Delphine de Vigan

Double changement de registre opéré avec Les enfants sont rois (Gallimard), le nouvel ouvrage de Delphine de Vigan. D’une part, l’auteure passe de chez Lattès à chez Gallimard et, d’autre part, après avoir abordé, avec la sobriété qui est la sienne, le thème du vieillissement dans Les gratitudes, la détentrice du Prix Renaudot planche cette-fois ci sur un sujet d’actualité, ces parents qui exhibent leurs enfants sur les réseaux sociaux. Elle y raconte Mélanie, ex-star de téléréalité qui fait de son fils et sa fille des influenceurs qu’elle exhibe aux yeux de millions de fans. En opposant cette histoire à celle de Clara, une flic au quotidien tout à fait antipodique, en pilotant son roman entre quelque chose qui se rapproche d’un polar, mais qui est en même temps d’une vérité glaçante, Delphine de Vigan signe un ouvrage qui se lit d’un trait, tout en nous poussant à réfléchir sur la possibilité de continuer à protéger les enfants au cœur de cette folle époque.

Le bon plan de cette fin de semaine ? S’évader de l’actualité politico-socio-économique, devenue trop angoissante, à travers ces huit livres coup de cœur, entre polars palpitants, confidences biographiques bien calculées, et romans romantiques ou habités par la fantaisie la plus débridée. À consommer sans modération...« Al-Amira wal khatam »/ Rachid el-DaïfL’un des...

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