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Culture - Littérature

Emmanuel Carrère, prix Princesse des Asturies

Emmanuel Carrère, prix Princesse des Asturies

Emmanuel Carrère : « J’ai l’impression d’une certaine affinité avec les lecteurs espagnols. » Photo AFP

L’écrivain français Emmanuel Carrère s’est vu décerner le prestigieux prix espagnol Princesse des Asturies de littérature pour une œuvre « ô combien personnelle » qui « efface les frontières entre réalité et fiction ».

Le jury, présidé par Santiago Muñoz Machado, directeur de l’Académie royale espagnole, a également estimé qu’Emmanuel Carrère avait dressé dans son œuvre « un portrait incisif de la société actuelle » et qu’il avait « exercé une influence notable sur la littérature de notre époque ».

« Sans être hispanophone, malheureusement pour moi, j’ai un goût assez vif pour la littérature hispanique », a déclaré l’écrivain à l’AFP. « Et puis, c’est dans le monde hispanique que mes livres suscitent le plus d’intérêt, et ça, ça me rend très heureux. J’ai l’impression d’une certaine affinité avec les lecteurs espagnols », a-t-il ajouté.

Âgé de 63 ans, Emmanuel Carrère, qui est également scénariste, journaliste, comédien, biographe, cinéaste et documentariste, est notamment l’auteur de L’adversaire, Un roman russe ou Limonov, qui lui avait valu en 2011 le prix Renaudot, l’un des principaux prix littéraires français.

Le jury du prix Princesse des Asturies a salué une œuvre « où s’entremêlent des faits et des personnages de la vie réelle avec des réflexions sur l’acte d’écriture et l’expérience de l’auteur lui-même ».

À ce propos, l’auteur a commenté à l’AFP que le fait « de travailler à la frontière du roman, de la fiction et de ce qu’on pourrait appeler le documentaire » était « une caractéristique » de son travail.

Exploration de soi

Auteur reconnu, Emmanuel Carrère a connu de nombreux succès en librairie, se classant régulièrement en tête des ventes de romans.

Son dernier livre, Yoga, grand succès de la rentrée littéraire 2020, revient sur l’hospitalisation de l’écrivain à Sainte-Anne en 2017 et sur le traitement par électrochocs.

Évoquant ce qu’il appelle une « autobiographie psychiatrique », Emmanuel Carrère écrit ainsi que « tout ce qui est réel est vrai, par définition, mais certaines perceptions du réel ont une plus grande teneur en vérité que d’autres ».

Le roman, figurant parmi la première sélection du jury du prix Goncourt, le prix littéraire français de plus grand prestige, avait finalement été éliminé, n’étant pas considéré comme une « œuvre d’imagination », comme le mentionne le testament d’Edmond de Goncourt, fondateur de cette récompense.

La polémique avait mis en exergue le débat difficile sur les limites à la création romanesque s’agissant de personnes réelles, et sur les frontières entre fiction et récit véridique, puisque son ex-épouse, l’ancienne journaliste Hélène Devynck, avait même publié un droit de réponse sur le sujet.

Toute l’œuvre romanesque d’Emmanuel Carrère est en effet bâtie sur l’exploration de soi, y compris quand il raconte la vie des autres, qu’il s’agisse du meurtrier Jean-Claude Romand dans L’adversaire ou de l’écrivain russe Édouard Limonov dans Limonov.

Auteur éclectique

Outre l’introspection, le travail d’Emmanuel Carrère est marqué par trois tropismes : la Russie, avec notamment ses romans « russes » (Un roman russe (2007), Limonov (2009), Voyage à Kotelnitch (2003)) ; le fantastique, avec des romans comme Je suis vivant et vous êtes morts (1993) ; et enfin le fait divers et le fait social dans des livres comme La classe de neige (1995), porté à l’écran par Claude Miller, ou L’adversaire (2000), dont le protagoniste, Jean-Claude Romand, a donné son nom à l’un des faits divers les plus connus et les plus macabres de la France de la fin du XXe siècle.

Adapté à de nombreuses reprises, il a également pris en main la caméra pour se faire documentariste (Retour à Kotelnitch, 2003) et cinéaste (La moustache, 2005), et a participé à l’écriture de fictions télévisées, notamment pour la série multiprimée Les revenants (2012).

Il a aussi fait partie du jury du Festival de Cannes en 2010 et de celui de Venise en 2015.

Il doit faire l’ouverture de la Quinzaine des réalisateurs, une section parallèle au Festival de Cannes, en juillet, avec son film Le quai de Ouistreham, adaptation éponyme du récit de la journaliste Florence Aubenas mettant en scène l’actrice Juliette Binoche.

Parmi les précédents lauréats du prix Princesse des Asturies, figurent des géants de la littérature latino-américaine, comme le Péruvien Mario Vargas Llosa, les Mexicains Carlos Fuentes et Juan Rulfo et le Cubain Leonardo Padura.

Créés en 1981, les prix Princesse des Asturies, qui portent le nom de l’héritière au trône d’Espagne, couvrent au total huit catégories. Les lauréats ont déjà été annoncés dans cinq catégories cette année.

Ils sont remis aux lauréats par les souverains espagnols en octobre à Oviedo, capitale de la région des Asturies (Nord).

Diego URDANETA et Marie GIFFARD/AFP

L’écrivain français Emmanuel Carrère s’est vu décerner le prestigieux prix espagnol Princesse des Asturies de littérature pour une œuvre « ô combien personnelle » qui « efface les frontières entre réalité et fiction ».Le jury, présidé par Santiago Muñoz Machado, directeur de l’Académie royale espagnole, a également estimé qu’Emmanuel Carrère avait...

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