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Politique - Éclairage

Le message américain musclé à Téhéran : négociations et sanctions vont de pair

L’administration Biden annonce sa première série de mesures visant des proches du Hezbollah, en pleins pourparlers avec Téhéran.

Le message américain musclé à Téhéran : négociations et sanctions vont de pair

Des membres du Hezbollah durant une cérémonie, à l’occasion de la Journée al-Qods, à la frontière avec Israël, le 7 mai. Ali Dia/AFP

Les sanctions américaines contre des personnes accusées de collaborer avec le Hezbollah se multiplient dernièrement. Lundi 10 mai, le département américain de la Justice a publié un communiqué de presse annonçant qu’un couple de Libanais avait avoué avoir pris part à des opérations de blanchiment d’argent pour le compte du Hezbollah, parti que Washington a inscrit sur sa liste des organisations terroristes. Selon les faits rapportés dans le communiqué, Racha Farhat a mené de 2010 jusqu’à son arrestation en février 2021 des opérations de blanchiment d’argent au profit du Hezbollah. Elle achetait des équipements électroniques pour la chaîne de télévision al-Manar, organe média du parti chiite, et finançait ces achats par les recettes de certaines activités « illicites », selon le communiqué du département de la Justice. Le texte indique que Mme Farhat est en outre accusée, avec son mari Houssam Haoui, de fraude fiscale. Le couple avait caché aux autorités américaines compétentes les sources de revenu de la jeune femme, qui avait prétendu être femme au foyer alors qu’elle exerçait un travail rémunéré dont les détails n’ont pas été dévoilés dans le texte. Pour toutes ces infractions, Racha Farhat risque une peine de vingt-cinq ans de prison, alors que son mari pourrait y passer cinq seulement. La justice dira son dernier mot à ce sujet dans le verdict, prévu le 21 septembre prochain.

Bien au-delà de l’aspect juridique, c’est le timing de l’affaire qui lui confère une dimension politique. C’est au lendemain de la publication de ce communiqué que le Trésor américain a imposé de nouvelles sanctions contre sept Libanais accusés d’être liés au Hezbollah et de financer ses activités. Ces sanctions, les premières du genre sous l’administration du président Joe Biden, ont notamment ciblé Ibrahim Daher, que le Trésor américain présente comme le chef du département des finances du parti chiite. Les six autres personnes concernées sont présentées comme ayant des liens directs avec al-Qard al-hassan, institution financière de microcrédits affiliée à la formation pro-iranienne et sanctionnée depuis 2007 par les États-Unis.

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Les nouvelles mesures américaines interviennent alors que l’administration Biden est engagée dans des pourparlers avec l’Iran afin de redynamiser l’accord conclu entre l’Iran et la communauté internationale en 2015, sous le mandat Obama, sur le dossier nucléaire iranien. Et c’est précisément là que réside le message musclé de

Washington à ses alliés régionaux, mais aussi à l’Iran : négocier un éventuel retour à l’accord sur le nucléaire (duquel Donald Trump, ancien locataire de la Maison-Blanche, s’était unilatéralement retiré) ne signifie pas que les ramifications régionales de Téhéran ne sont plus dans le collimateur de Washington. C’est ainsi que Hanine Ghaddar, journaliste et chercheuse au sein du Washington Institute, connue pour être critique du parti chiite, décrypte pour L’Orient-Le Jour la dernière décision du Trésor américain. « La nouvelle administration américaine veut calmer les appréhensions de ses alliés régionaux, tels que les pays du Golfe et Israël, en leur réaffirmant sa détermination à faire face à l’hégémonie iranienne au Moyen-Orient », dit-elle. Pour ce qui est de l’Iran, Mme Ghaddar estime que Washington veut lui faire comprendre que le processus de négociations actuellement en cours à Vienne ne signifie pas que les États-Unis négligeront les comportements de l’Iran dans la prochaine phase.

Les Européens accordent leurs violons 

La journaliste, établie à Washington, estime par ailleurs que la mesure américaine est à même d’encourager l’Union européenne à prendre des décisions tout aussi fortes pour accélérer le redressement du pays du Cèdre. L’UE s’apprête en effet à sanctionner les protagonistes politiques libanais qui continuent, à ses yeux, de bloquer la formation du gouvernement, neuf mois après la démission du cabinet de Hassane Diab dans la foulée de la double explosion meurtrière au port de Beyrouth, le 4 août. Ce processus, initié par le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, pourrait d’ailleurs prendre une nouvelle tournure prochainement. Lors de leur dernière réunion à Bruxelles, lundi, le chef du Quai d’Orsay semble être parvenu à convaincre ses homologues européens de se joindre à la France dans sa pression sur la classe politique libanaise pour accélérer la mise sur pied de la nouvelle équipe ministérielle. « Nous travaillons sur le bâton et les carottes. Toutes les options sont examinées pour mettre la pression sur les membres de la classe politique qui empêchent de sortir de l’impasse », avait ce jour-là annoncé le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell. Et hier, des diplomates cités par l’agence Reuters ont annoncé le début de la phase technique du processus. L’un d’eux a même déclaré sans ambages à l’agence : « Attendez-vous à une décision (infligeant des sanctions) dans les trois à quatre prochaines semaines. »

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L’Europe semble donc être entrée dans le vif du sujet. Seul obstacle à surmonter encore : l’opposition de la Hongrie, traditionnel défenseur des minorités chrétiennes, à la démarche européenne, sachant que celle-ci requiert l’approbation unanime des pays membres. En visite à Beyrouth fin avril, le ministre hongrois des Affaires étrangères avait déclaré, à l’issue d’un entretien avec le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, que Budapest s’opposerait à des sanctions infligées au « plus grand parti chrétien au Liban », à savoir le CPL. Selon Reuters, afin de contourner un éventuel veto hongrois, les 26 autres pays membres de l’UE pourraient opter pour des sanctions qu’ils imposeraient de façon individuelle aux personnalités concernées.

Les sanctions américaines contre des personnes accusées de collaborer avec le Hezbollah se multiplient dernièrement. Lundi 10 mai, le département américain de la Justice a publié un communiqué de presse annonçant qu’un couple de Libanais avait avoué avoir pris part à des opérations de blanchiment d’argent pour le compte du Hezbollah, parti que Washington a inscrit sur sa liste des...

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Ce jeu de sanctions que pratiquent les américains ne convainc plus personne. Pourquoi sanctionner des membres du parti et non leur chef qui lui est le donneur d’ordre et l’instigateur? De qui se moquent tous ces pays puissants en épargnâtes soigneusement les chefs de file de cette organisation? Sont ils puissants au point de trembler devant un parti qu’ils ont classé eux mêmes comme étant terroriste et hésitent à sanctionner fermement ses agissements dans le monde? Pour quelle raisons tardent ils à régler le problème à sa racine au lieu de faire croire aux pays détruits et ruinés dans la région à cause de leurs agissements que le monde civilisé jugent inacceptables mais ne font rien pour les arrêter. Ça dépasse tout entendement et toute logique. Les sanctions françaises à venir seront elles différentes ou se sont ils donnés le mot pour continuer à taper sur les petits exécutants en rendant encore plus fort leurs chefs puisque intouchables.

Sissi zayyat

11 h 54, le 13 mai 2021

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Commentaires (2)

  • Ce jeu de sanctions que pratiquent les américains ne convainc plus personne. Pourquoi sanctionner des membres du parti et non leur chef qui lui est le donneur d’ordre et l’instigateur? De qui se moquent tous ces pays puissants en épargnâtes soigneusement les chefs de file de cette organisation? Sont ils puissants au point de trembler devant un parti qu’ils ont classé eux mêmes comme étant terroriste et hésitent à sanctionner fermement ses agissements dans le monde? Pour quelle raisons tardent ils à régler le problème à sa racine au lieu de faire croire aux pays détruits et ruinés dans la région à cause de leurs agissements que le monde civilisé jugent inacceptables mais ne font rien pour les arrêter. Ça dépasse tout entendement et toute logique. Les sanctions françaises à venir seront elles différentes ou se sont ils donnés le mot pour continuer à taper sur les petits exécutants en rendant encore plus fort leurs chefs puisque intouchables.

    Sissi zayyat

    11 h 54, le 13 mai 2021

  • Dès l'annonce des aveux de Racha Farhat, la justice libanaise a lancé une enquête sur le financement de la chaîne Al Manar... Pardonnez-moi: je rêve! - Par ailleurs, je m'ai absolument pas compris comment la Hongrie "traditionnel défenseur des minorités chrétiennes" peut s'opposer à des mesures visant au redressement du Liban. Le prétexte de défendre " le plus grand parti chrétien au Liban" ne tient pas puisqu'il n'a jamais été question de sanctionner un PARTI quelconque, mais des HOMMES accusés d'obstructionnisme et de corruption.

    Yves Prevost

    07 h 31, le 13 mai 2021

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