Quatre jours après la décision de Riyad de suspendre les importations de fruits et légumes libanais après une saisie de drogue dans le royaume, le président libanais, Michel Aoun, a dit mercredi refuser que le Liban soit utilisé pour porter atteinte à l'Arabie saoudite.
Ces propos du chef de l'Etat viennent s'ajouter aux tentatives des autorités libanaises de faire revenir Riyad sur sa décision, mais le royaume wahhabite semble jusque-là intraitable sur cette question.
"Une sorte de compréhension"
Lors d'une réunion avec une délégation d'industriels libanais, en présence du ministre sortant de l'Industrie, Imad Hoballah, le président Aoun a dit "refuser que le Liban serve de passage à tout ce qui porterait atteinte aux pays arabes frères, notamment l'Arabie saoudite et les Etats du Golfe", précise la présidence dans un communiqué. "L'Arabie saoudite est un Etat frère, et il nous importe de maintenir la coopération économique avec elle. Aujourd’hui, nous déployons de grands efforts pour dévoiler les circonstances de ce qu'il s'est passé et rectifier la situation", a assuré le président Aoun. "(...) Il semble qu'il y ait une sorte de compréhension (de la part de l'Arabie, NDLR), en espérant aboutir à des solutions", a ajouté le chef de l'Etat.
Les relations entre Beyrouth et Riyad ont été ternies en fin de semaine dernière par l'annonce de la suspension des importations par Riyad de produits agricoles libanais, une mesure prise pour lutter contre le trafic de stupéfiants. Cette annonce a été faite après que la police saoudienne a mis à jour une opération de trafic de millions de pilules de Captagon dissimulées dans une cargaison de grenades en provenance du Liban. Selon des informations préliminaires de l'enquête menée à Beyrouth, la cargaison de stupéfiants proviendrait de Syrie et aurait transité par le Liban avant d'être envoyée en Arabie saoudite. Au cours d'une réunion tenue lundi au palais présidentiel, les officiels avaient appelé le royaume wahhabite à revenir sur sa décision. Le ministre sortant de l'Intérieur, Mohammad Fahmi avait en outre été officiellement chargé d’engager des contacts avec son homologue saoudien à des fins d’information et d’explication. Le ministre tente en particulier de sauver des tonnes de fruits et agrumes actuellement bloqués dans des camions à la frontière saoudienne.
Aoun promet l'application de mesures
"Les mesures prises lors de la réunion élargie tenue lundi au palais de Baabda seront appliquées. Les services de sécurité vont renforcer leur contrôle des flux d'exportations à travers les ports, les aéroports et les passages frontaliers terrestres, afin de rassurer les Etats qui reçoivent des marchandises libanaises, qu'il s'agisse de produits agricoles ou industriels", a promis M. Aoun.
"Protéger la sécurité de l'Arabie est également notre responsabilité", a pour sa part estimé le ministre de l'Industrie Imad Hoballah. "Cela doit se traduire par une coopération avec les autorités saoudiennes", a-t-il ajouté, appelant lui aussi à renforcer les contrôles douaniers.
En visite de terrain dans différentes casernes, notamment proches de la frontière avec la Syrie, avec ses collègues de l'Energie, Raymond Ghajar, et de l'Economie, Raoul Nehmé, la ministre sortante de la Défense, Zeina Acar, a pour sa part salué le rôle de l'armée dans la lutte contre la contrebande transfrontalière.
En ce qui concerne le suivi des procédures lancées pour faire la lumière sur l'origine du chargement de grenades fourrées de captagon, le ministre sortant de l'Agriculture, Abbas Mortada, a transféré le dossier à l'Inspection centrale, afin qu'une enquête soit ouverte sur les fonctionnaires du ministère ayant autorisé l'exportation de la cargaison.
L’Arabie saoudite reste intraitable sur l’interdiction des fruits et des légumes libanais. Mardi, l'ambassadeur saoudien au Liban, Walid Boukhari, a affirmé sur Twitter que "depuis le début de 2020 et jusqu’au mois d’avril 2021, 57 184 900 comprimés d’amphétamine ont été saisis", manifestant une détermination à ce que l’interdiction soit maintenue jusqu’à ce que le Liban mette en place un système de contrôle efficace des marchandises destinées à l’exportation.
Démenti de l'armée
Dans ce contexte, l'armée libanaise a démenti mercredi matin une information parue ce mercredi dans le quotidien Al-Akhbar, concernant la tenue d'une réunion entre son commandant en chef, Joseph Aoun, et Walid Boukhari, et qui aurait porté sur l'aide à la troupe.
"Un journal local a fait part ce matin d'une réunion tenue loin des médias entre le général Joseph Aoun et l'ambassadeur saoudien, Walid Boukhari", a annoncé l'armée. "Toutes les réunions du commandant en chef de l'armée sont annoncées par des déclarations officielles publiées quotidiennement sur notre site web et la rencontre avec l'ambassadeur d'Arabie n'a pas eu lieu, comme le prétend ce journal", a affirmé la troupe. Elle a toutefois souligné qu'elle accueillait favorablement "toute réunion ayant pour but de soutenir l'institution militaire, surtout en ces circonstances difficiles".
Las de lire ses inepties. Je plonge dans le livre de Rachel Khan Racée, éditions l’observatoire. Livre sur le racisme, mais pas celui que l’on croit. A +
17 h 16, le 29 avril 2021