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Politique - Liban

Affaire Ghada Aoun : réunion ouverte du CSM, la juge convoquée demain

Tensions devant le palais de Justice entre manifestants soutenant la magistrate et d'autres condamnant ses actions.

Affaire Ghada Aoun : réunion ouverte du CSM, la juge convoquée demain

"Juges, n'oubliez pas votre serment", peut-on lire sur une pancarte brandie lors d'une manifestation devant le palais de Justice à Beyrouth, le lundi le 19 avril 2021. Photo Mohammad Yassine.

Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a tenu lundi une réunion exceptionnelle afin de débattre des agissements très controversés de la procureure près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, qu'il a convoquée demain mardi à 10h. La réunion du CSM, présidée par le juge Souheil Abboud, ne sera pas levée avant ce rendez-vous avec la magistrate, indique l'institution dans un bref communiqué publié en soirée. Parallèlement au début de la réunion du Conseil, des groupes de manifestants, certains soutenant la juge Aoun et d'autres conspuant ses actions, se sont fait face lors d'un sit-in devant le palais de Justice de Beyrouth.

Le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, avait pris jeudi la décision de modifier la répartition des tâches au sein des parquets de cette cour, restreignant aux trois magistrats Sami Sader, Samer Lichaa et Tanios Saghbini l’examen, respectivement, des crimes de trafic et d’écoulement de drogue, des grands crimes financiers et des homicides. La juge Aoun a toutefois refusé de confier le dossier dont elle avait été pourtant dessaisie au juge Samer Lichaa, notamment l'enquête sur des transferts de fonds à l’étranger, multipliant les précédents au cours du week-end : elle a ordonné à ses gardes du corps d’enfoncer la porte de la société de change Mecattaf à Awkar, dans le Metn, et elle s’est mise à haranguer des partisans du Courant patriotique libre venus la soutenir. Lundi, le juge Oueidate a demandé au procureur général financier de mener une enquête au sujet des soupçons qui pèsent sur la société Mecattaf concernant une possible violation des lois qui régissent les sociétés de transfert de devises.

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La guerre des prérogatives judiciaires semble clairement sous-tendue de tiraillements politiques entre le camp aouniste auquel appartient Ghada Aoun et le camp haririen dont est proche Ghassan Oueidate. Le premier se targue de lutter contre la corruption, alors qu’il lui est reproché de cibler exclusivement les rangs de ses adversaires politiques et d’encourager ainsi une justice sélective et arbitraire.

Dans ce contexte tendu, des manifestants affirmant être venus soutenir le magistrat Oueidate face à la juge Aoun et vouloir défendre les droits de la communauté sunnite face au CPL s’étaient regroupés dans la matinée devant le palais de Justice de Beyrouth. "Nous sommes venus ici pour défendre la justice libanaise et la soutenir, face aux agissements de certains juges qui se livrent aux rodomontades", a déclaré Omar el-Kouche, avocat, à notre correspondant sur place Mohammad Yassine. Il a accusé certains juges libanais d’être "soumis à la volonté de certaines parties" dans une allusion à Ghada Aoun, et accusé le chef du CPL, Gebran Bassil, d’instrumentaliser l’affaire de la lutte contre la corruption. Certains des manifestants ont affirmé être venus de Tarik Jedidé, bastion sunnite du courant du Futur, et brandissaient des bâtons.

"Ghada Aoun, nous sommes avec toi ! Dieu est avec toi !"
Des dizaines de partisans du CPL, venus manifester leur appui à Ghada Aoun, se sont pour leur part rassemblés un peu plus loin, près du rond-point du palais de Justice, au milieu d'un déploiement des forces de l'ordre et alors que la route était coupée. "Ghada Aoun, nous sommes avec toi ! Dieu est avec toi !", scandaient-ils. "Ghada Aoun fait ce que tout juge doit faire, mais ils l’empêchent d’accomplir son devoir", a affirmé l’avocat Wadih Akl, un partisan du CPL. "Le problème est qu’une partie de la justice protège Riad Salamé (le gouverneur de la Banque centrale, ndlr) et les banques qui nous ont pris notre argent". Malgré le déploiement de l’armée, la tension a dégénéré et des affrontements ont opposé les manifestants alors que des tirs ont été entendus.

Au cours des incidents, des partisans du CPL s'en sont pris à la correspondante de la chaîne MTV, Joyce Akiki, qui couvrait la manifestation devant le palais de Justice, selon la fondation Samir Kassir, qui défend la liberté d'expression et de la presse au Liban.

L’avocat Wadih Akl, un partisan du CPL. Photo Mohammad Yassine

"Comportement de voyou"
Des avocats membres du courant du Futur ont également manifesté à l'intérieur du palais de Justice "en solidarité avec la justice libanaise" et "contre les infractions" de Ghada Aoun. Ils ont dénoncé "le comportement de voyou" de la juge Aoun, "qui agit avec le soutien du président Michel Aoun et du CPL". Certains d'entre eux brandissaient des pancartes appelant à "l'indépendance de la justice" et rejetant "la justice à la carte".

Réagissant à cette affaire, le vice-président du Parlement, Elie Ferzli, a dénoncé un "processus délibéré de dissolution du pouvoir judiciaire". Soulignant que" jamais, même pendant la guerre civile, le pouvoir judiciaire n'avait connu de tels remous", il a estimé qu'il fallait attendre la décision du CSM. "Les gens ne peuvent plus tolérer l'irresponsabilité, que ce soit le gaspillage et la corruption ou que ce soit l'incapacité de réclamer des comptes à un fonctionnaire, peu importe le poste qu'il occupe", a ajouté M. Ferzli qui s'adressait aux journalistes au Parlement. "Je suis pour toute perquisition visant la corruption, mais la corruption est-elle limitée ici ? Il y a de nombreux banquiers, banques, personnalités et responsables. Un procureur, quel qu'il soit, devrait-il s'arrêter à ce stade ?", s'est-il interrogé.

Le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, a, pour sa part, accusé le pouvoir en place de vouloir détruire la justice au Liban. "Ce pouvoir enregistre des succès quotidiens dans la généralisation des échecs et des catastrophes. Son dernier succès en date est la destruction du pouvoir judiciaire au Liban", a estimé M. Geagea dans un communiqué, accusant le chef d'Etat, Michel Aoun, d'essayer de "se poser en champion de la lutte contre la corruption, alors qu'il fait partie des personnes les plus accusées d'être corrompues, preuve en est les sanctions américaines" contre son gendre Gebran Bassil. "Comment un citoyen libanais ou un pays étranger peut-il avoir confiance dans le Liban après tout ce qui s'est passé ces derniers jours ?", s'est-il encore interrogé. "Ce pouvoir détruit, sciemment ou non, toutes les institutions publiques et même privées du pays. C'est ce à quoi nous assistons chaque jour avec des preuves décisives. Nous ne sortirons de cet enfer qu'en en finissant de ce pouvoir", a-t-il estimé. "La seule façon d'en finir réside dans des élections législatives anticipées", a affirmé le leader des FL, répétant sa proposition-phare de sortie de crise.


Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a tenu lundi une réunion exceptionnelle afin de débattre des agissements très controversés de la procureure près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, qu'il a convoquée demain mardi à 10h. La réunion du CSM, présidée par le juge Souheil Abboud, ne sera pas levée avant ce rendez-vous avec la magistrate, indique l'institution dans un...

commentaires (12)

Ghada Aoun, nous sommes avec toi ! Dieu est avec toi ! Question simple, tous ces gens qui suivent, ces responsables, de quelque bord qu'ils soient,comme des moutons, ne leur reste il une once de dignité , tous ces responsables qui passent leur temps à fricoter, trafiquer contre les intérêts de ces propres gens .. Tout cela prouve que nous avons accédé au quart monde , la liberté de penser ne nous réussit manifestement pas et la "démocratie" encore moins.

C…

23 h 05, le 19 avril 2021

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Commentaires (12)

  • Ghada Aoun, nous sommes avec toi ! Dieu est avec toi ! Question simple, tous ces gens qui suivent, ces responsables, de quelque bord qu'ils soient,comme des moutons, ne leur reste il une once de dignité , tous ces responsables qui passent leur temps à fricoter, trafiquer contre les intérêts de ces propres gens .. Tout cela prouve que nous avons accédé au quart monde , la liberté de penser ne nous réussit manifestement pas et la "démocratie" encore moins.

    C…

    23 h 05, le 19 avril 2021

  • C'est maintenant que la vraie révolution devrait commencer ! Il ne s'agit plus de respecter le droit , ou une loi, ou une procédure ! Il s'agit vraiment de mettre le doigt sur la vraie liste des vrais larrons , coûte que coûte , même si tous les diables voulaient nous en empêcher ! NOUS VOUL9NS RÉCUPÉRER NOTRE ARGENT VOLÉ ! VIVE LA RÉVOLUTION !

    Chucri Abboud

    22 h 45, le 19 avril 2021

  • Les crapules (des deux bords d'ailleurs) essayent comme d'habitude de confessionnaliser le conflit juridique pour recuperer du terrain. "Kellon ya3ne kellon" sans exception, eux et leurs juges aux ordres.

    Michel Trad

    20 h 04, le 19 avril 2021

  • QUAND LA VIEILLE POULE DU POULAILLER S,ENGAGE DANS LE COMBAT DES COQS AVEC LES C... DES AUTRES.

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    19 h 35, le 19 avril 2021

  • Du calme, ça suffit de barboter.

    Esber

    15 h 40, le 19 avril 2021

  • "... qui était rassemblés devant le palais de..." Hmm...et paf sur le d...

    Georges MELKI

    14 h 47, le 19 avril 2021

  • A chaque fois ils font tout pour noyer le poisson ; retard injustifié du '' forsenic audit ''de la BDL , identité encore inconnue de ceux qui ont introduit le nitrate d'ammonium dans le pays , les dossiers du fuel , de la mécanique , et d'autres , restés sans vérité et actuellement ceci tourne en '' affaire ghada aoun'' . Triste sort pour notre pays .

    Lecteurs OLJ 2 / BLF

    14 h 26, le 19 avril 2021

  • Le fait que la juge Ghada Aoun soit proche du courant Aouniste ne fait aucun doute mais si elle lève des lièvres c'est tant mieux et la partie adverse au lieu d'essayer de l'en empêcher devrait lever d'autres lièvres et comme cela nous connaitrions peut être la vérité. Je ne suis pas grand juriste mais changer les compétences des Procureurs ne devrait pas être rétroactif.

    Farhat Raymond

    14 h 19, le 19 avril 2021

  • Le processus de destruction du pays entamé il y a quelque temps continue tranquillement son chemin. Des gardes de corps d’une juge dessaisie d’une affaire judiciaire défoncent les portes d’une propriété privée en se prenant pour des officiers de police judiciaire. Même dans la plus reculée des républiques bananière du sixième monde on n’a jamais assisté à une telle mascarade dont l’actrice principale s’est couverte de ridicule mais elle s’en en fiche complètement car soutenue par un parti politique. Sur une échelle de 0 à 100, nous sommes à moins 1000

    Lecteur excédé par la censure

    14 h 16, le 19 avril 2021

  • Je suis totalement incompétent pour dire si la décision de Ghassan Oueidate est légitime et légale, mais quoi qu'il en soit, l'attitude de Ghada Aoun est absolument inqualifiable. Une personne capable de tels actes doit être écartée de toute fonction judiciaire.

    Yves Prevost

    13 h 44, le 19 avril 2021

  • Ces libanais qui sont venus défendre l’indéfendable qui est saper le peu de justice qui reste dans ce pays sous prétexte de poursuivre les corrompus ne lisent pas les journaux qui ont relaté le fait qu’elle était dessaisi des dossiers pour cause de parti pris et qu’un autre juge était saisi de l’affaire pour perquisitionner légalement et d’une façon légitime. Pourquoi a t-elle pris les devants pour se pointer sans mandat ni mission sinon pour torpiller cette institution chère au cœur des libanais et faire croire à certains bahbouls qu’elle serait la seule à vouloir connaître la vérité avec son clan déjà cité comme corrompu alors qu’elle n’a fait que jeter l’opprobre sur les magistrats de ce pays sur ordre des vendus qui la soutiennent. Une surenchère de plus qui dévoile leur complot de détruire ce pays dans toutes ses instances et faire parler d’eux comme des sauveurs alors que tout le monde connaît le fond de leurs pensées et leurs actes, sauf quelques récalcitrants aveugles et sourds à ce qui se passe dans ce pays.

    Sissi zayyat

    13 h 26, le 19 avril 2021

  • Tout Cela hélas nous rappelle de très mauvais souvenirs tels que les divisions de l armée entamées en 1975 conséquentes à la flamme du 13 avril qui allumera tout le pays , que de mauvais souvenirs ... Aujourd’hui ce sont de hauts responsables du ministère de la justice qui se révoltent créant une division et des querelles intestines entre les juges qui n ont pas lieu d être , mais , qui peuvent causer des dégâts irréversibles pour tous les dirigeants en place et c est dommage , le pays se meure à petit feu ..Ça n était ni le temps ni le moment d attiser le feu ... La population a soif d autre chose , la Vie ....

    Menassa Antoine

    13 h 22, le 19 avril 2021

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