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Culture - Web

Sortir de l’ombre les artistes féminines

Sortir de l’ombre les artistes féminines

Saloua Raouda Choucair, l’une des premières artistes abstraites au Liban sur le site de Aware.

Sortir de l’ombre des milliers d’artistes femmes : sur son site Aware, l’historienne de l’art Camille Morineau répertorie minutieusement depuis six ans ces talents victimes de préjugés sexistes en veillant à élargir ses recherches au-delà du monde occidental vers l’Amérique latine, l’Afrique et prochainement l’Asie. À signaler la présence du Liban avec des artistes comme Etel Adnan, Simone Fattal, Saloua Raouda Choucair, Huguette Caland et Lamia Joreige.

Depuis sa création en 2014, le site bilingue (anglais/français) Aware (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions) a déjà réalisé 700 notices illustrées d’artistes femmes, classées de manière alphabétique, avec le soutien d’universitaires de plusieurs pays, de mécènes et du ministère français de la Culture. Il en a mille autres en attente.

Un travail à la fois de titan et de fourmi qui consiste à établir pour chaque artiste une notice principale, avec dix à douze illustrations de son art, et des liens par le biais de mots-clé avec d’autres artistes, des expositions et des catalogues, des interviews, etc.

Parmi les projets récents entrepris par Camille Morineau, l’entrée sur le site de 24 plasticiennes d’Afrique et de ses diasporas. « Deux ou trois fois plus d’artistes sont en attente. Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg », indique l’historienne, ancienne élève de Normale sup et présidente du conseil d’administration de l’École du Louvre.

Neuf expert(e)s sont venu(e)s à Paris pour choisir ces artistes, et « les meilleures auteures » ont été mobilisées pour rédiger les textes, ajoute-t-elle. Parmi ces plasticiennes, la Kényane Magdalene Odundo, créatrice de poteries raffinées (exposées dans plusieurs grands musées) ou encore l’Égyptienne Huda, dont l’oeuvre dialogue avec les iconographies pharaonique, copte, arabe, africaine et européenne.

Camille Morineau, qui a découvert aux États-Unis les « gender studies » (qui décortiquent les rapports sociaux entre les sexes), veut sortir les femmes artistes de leur « invisibilité ». Car beaucoup restent invisibles, et les Frida Kahlo ou Camille Claudel sont l’arbre qui cache la forêt.

« Il y a eu énormément d’artistes femmes, autant que d’hommes, mais elles ne sont pas vues, pas entendues », déclare l’historienne qui a été conservatrice au musée national d’Art moderne (Centre Pompidou). Elle estime nécessaire d’éclairer « les mécanismes secrets d’invisibilité » et les modes de création des femmes retenues à la maison.

Remonter au XVIe siècle

Grâce au mouvement MeToo, « ce sujet qui me valait des attaques il y a dix ans est devenu celui de tous, et pas seulement des féministes. C’est une pilule que tout le monde a dû avaler ».

Il y a dix ans justement (en 2009), elle a été la commissaire de l’exposition « elles@centrepompidou » au Centre Pompidou, qui réunissait 500 œuvres d’artistes femmes tirées des collections, et a organisé en 2014 la rétrospective Niki de Saint Phalle au Grand Palais.

Cette année, elle coorganise un colloque pour l’exposition « Elles font l’abstraction », consacrée, comme son nom l’indique, aux artistes femmes ayant participé à l’histoire de l’abstraction et qui doit ouvrir en mai à Beaubourg.

« Nous avons une ministre et un président attentifs à ces questions », déclare Camille Morineau. Le financement public (ministères et Ville de Paris) du site Aware est passé de 20 à 35 % en 2021, et la fréquentation a été multipliée par deux en 2020, à 40 000/50 000 visites par mois.

Les recherches de l’historienne portent essentiellement sur le XXe siècle, mais elle souhaite remonter le temps et explorer l’art au féminin jusqu’au XVIe siècle. Aware a déjà beaucoup travaillé sur des artistes latino-américaines et voudrait se tourner vers les talents féminins en Asie.

Dans le cadre de la Saison Africa 2020 (reportée à 2021), Aware participe au « Focus femmes » et ouvrira un forum sur « les récits des femmes africaines artistes » en avril, avec l’École du Louvre.

Le site produit également des films animés, Petites histoires de grandes artistes, destinés notamment aux enfants scolarisés et qui s’efforcent de démonter les stéréotypes masculin-féminin.

Jean-Louis DE

LA VAISSIÈRE (AFP)

Sortir de l’ombre des milliers d’artistes femmes : sur son site Aware, l’historienne de l’art Camille Morineau répertorie minutieusement depuis six ans ces talents victimes de préjugés sexistes en veillant à élargir ses recherches au-delà du monde occidental vers l’Amérique latine, l’Afrique et prochainement l’Asie. À signaler la présence du Liban avec des artistes...

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