Pablo Neruda : Ne vous privez pas du bonheur

Pablo Neruda est mort à Santiago un 23 septembre 1973… Officiellement, le poète est décédé à 69 ans d’un cancer de la prostate. Mais la controverse continue de faire rage, certains le croyant victime d’un empoisonnement en ce Chili encore plus trouble et troublé que le pays du Cèdre aujourd’hui….

Chantre de l’Amérique latine et non seulement des pampas chiliennes, Pablo Neruda est un pseudonyme puisé dans les romans d’aventure de Conan Doyle.

Épris de la langue française dont il imite d’ailleurs avec éclat et originalité les parnassiens, dans une langue ibérique chantante et sensuelle, l’auteur des Vers du capitaine avait le goût ardent de la vie. Trois mariages, un amour idyllique et une passion pour sa dernière épouse qui lui inspire ses plus beaux poèmes d’amour d’une fulgurante beauté, qu’il enserre dans le recueil La centaine d’amour. Seul point noir et difficilement acceptable (lui qui n’a pas manqué de courage !) dans son existence, comme Jean-Jacques Rousseau pour sa progéniture, c’est l’abandon et la non-reconnaissance de son unique fille née hydrocéphale, c’est-à-dire une tête remplie d’eau…

Il fut l’ami de Federico García Lorca, occupa le poste de consul en Espagne, se rendit au Mexique, à Cuba, au Pérou. Membre du Parti communiste au Chili, il contestera le pouvoir en place puis s’exilera en Europe.

S’ensuivront de longues pérégrinations de la Russie à la Pologne, en passant par la Hongrie, l’Italie et l’Inde. Autant d’images somptueuses, de sentiments complexes et d’émotions intenses qu’il coulera dans son verbe au lyrisme puissant et incendiaire.

Avec Picasso, il reçoit en 1955 le Prix international de la Paix. Avec l’entrée en scène de la dictature d’Augusto Pinochet, il tombe en défaveur, voit sa maison saccagée. Et déjà la maladie ou le poison injecté dans son corps faisait de grandes enjambées…

Prince du Parnasse

Restent aujourd’hui de ce vrai prince du Parnasse le verbe retentissant, les mots parés de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, la musicalité douce et fluide d’une mélodie tendre, les images empruntées aux horizons de l’univers de ses recueils de poésie.

Notamment Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée.Pour terminer, en souvenir de cette vibrante voix de poète, rappelons ces quelques vers majeurs :

« Meurt lentement celui qui ne voyage pas, ne lit pas, n’écoute pas la musique, ignore le monde entier, ne croit qu’à sa suffisance et n’accepte aucune aide.

« Meurt lentement celui qui devient esclave de l’habitude, qui répète quotidiennement la même routine, n’ose rien changer dans ses habits, ou leur couleur, et craint ce que les autres en diront…

« Meurt lentement celui qui tait son amour et s’éloigne de l’intensité des sentiments qui ramènent l’éclair dans les yeux et panse les cœurs meurtris.

« Vis ton quotidien, sois téméraire, ne remets pas au lendemain, ne te laisse pas mourir lentement, ne te prive pas du bonheur. »

Voilà non seulement une philosophie de vie, mais aussi de vitales recommandations pour fuir la prison que toute société érige. Et la paix, pour ce seigneur de la paix, alors régnera.