
Le Premier ministre désigné, Moustapha Adib, à Baabda, le 14 septembre 2020. Photo Houssam Shbaro
Le Premier ministre libanais désigné, Moustapha Adib, qui tente depuis trois semaines de former un gouvernement conforme à "l'initiative française" à laquelle s'étaient engagées toutes les formations politiques, a lancé lundi matin un appel pour que ces parties "coopèrent toutes afin de faciliter la mise sur pied d'un cabinet de mission au programme déterminé".
"Le Liban, qui se trouve à la croisée de nombreuses crises sans précédent, financière, monétaire, économique, sociale et sanitaire, n'a plus de temps à perdre", a souligné M. Adib dans un communiqué. "Les douleurs des Libanais résonnent à l'échelle nationale et notamment via les traversées de la mort en mer", a-t-il ajouté, en référence aux tentatives de traversées illégales vers Chypre, qui ont provoqué la mort de plusieurs personnes au cours des dernières semaines.
Il a dans ce contexte appelé à "la coopération de toutes les parties afin de faciliter la formation d'un gouvernement de mission au programme déterminé, que les formations s'étaient engagées à soutenir". Et de rappeler que ce cabinet devrait être composé de "spécialistes" et être capable de "mettre un terme à l'effondrement, commencer à œuvrer pour sortir le pays des crises et rétablir la confiance des citoyens dans leur pays et ses institutions".
L'obstacle du ministère des Finances
"Je ne ménagerai aucun effort pour réaliser cet objectif, en coopération avec le président de la République, Michel Aoun", a poursuivi le Premier ministre désigné, qui a souhaité "le succès immédiat de l'initiative française, qui permettrait d'ouvrir la voie au sauvetage du pays et mettre un terme à sa chute rapide". "Tout retard supplémentaire ne fera qu'accumuler et approfondir les crises, appauvrir encore plus les gens et mener le pays vers toujours plus de déficit", a-t-il souligné. "Personne n'est capable selon moi de porter dans sa conscience la responsabilité d'une souffrance accrue pour le peuple, qui subit déjà beaucoup", a-t-il conclu.
Conformément à l'initiative française, qui vise à sortir le Liban de sa crise politique et financière, Moustapha Adib est appelé à former un cabinet "de mission" restreint, formé de spécialistes indépendants. Le principal noeud rencontré dans les tractations avec les formations concerne le portefeuille des Finances, que le Hezbollah et le mouvement Amal réclament. Ces deux formations exigent qu'"une personnalité chiite" soit nommée à la tête de ce ministère qui, selon, eux doit être exclu du principe de rotation des portefeuilles défendu par le Premier ministre désigné et soutenu par plusieurs parties.
Alors qu'il était question en fin de semaine dernière d'une éventuelle récusation du Premier ministre désigné, il semble que la cellule de crise française chargée du dossier libanais l’ait aussi poussé à patienter.
Mr. Adib. Malheureusement, vous avez perdu votre crédibilité et en 3 semaines voire 2. C’est un record. Si vous pensiez que le chemin était balisé, alors vous êtes naïf. C’est un comble pour un diplomate. Et si vous pensiez qu’il était utile de négocier, alors vous êtes encore plus naïf ; mais c‘est l’ADN du diplomate. Et si vous pensez que c’est encore possible, alors vous êtes dans le dénis, et cela c’est grave. Vous n’êtes pas l’homme de la situation alors avouez et partez. Vous êtes arrivé avec un soupçon d’handicap qui s’appelle Mikati. Vous auriez dû démontrer votre indépendance tout de suite : former une équipe de sauvetage indépendante, au-delà des religions et aller au parlement. Mieux vaut tomber dans la gloire plutôt que dans la misère. Mais c’est trop tard. Alors partez. Vous n’êtes pas l’homme de la situation. Le Liban ira alors en enfer et vous avez raté l’occasion d’entrer dans l’histoire. C’était peut être votre objectif ; rentrer dans l’histoire, mais la bonne intention ne suffit pas. Il faut des hommes et des femmes dignes de cela. Les cimetières sont remplis de gens de bonne intention ; y compris des diplomates. Partez, partez, partez. Et le Liban, une fois dans l’enfer, un peu grâce à votre manque de courage, se relèvera ; même s’il est fatigué d’être un phœnix. Le Liban se relèvera, envers et contre tous et toutes !
21 h 47, le 21 septembre 2020