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Politique - Conseil des ministres

Le spectre de la centrale de Selaata plane sur le gouvernement

Le chef de l’État et le camp aouniste font de nouveau le forcing pour faire adopter le projet.

Le gouvernement réuni au palais de Baabda. Photo Dalati et Nohra

Et rebelote. Alors que l’on croyait le projet de la centrale d’électricité de Selaata classé, du moins pour le moment, nouveau coup de théâtre : ce projet auquel les aounistes, et avec eux le président de la République, semblent attachés comme à la prunelle de leurs yeux risque de s’imposer de nouveau à la table du Conseil des ministres qui se tient aujourd’hui à Baabda.

Recourant à ses prérogatives constitutionnelles qui lui permettent de demander la réouverture du débat en Conseil des ministres autour d’un dossier que le gouvernement a déjà tranché, le chef de l’État et avec lui le Courant patriotique libre qui mène bataille pour faire avaliser ce projet semblent toutefois face à une impasse.

Les discussions autour de ce dossier risquent en tous les cas d’être houleuses si le président décide de l’imposer en dehors de l’ordre du jour prévu. La polémique autour de cette question pourrait ainsi se corser, d’autant qu’elle ne pourra plus cette fois-ci faire l’objet d’un vote, à en croire les dernières informations qui circulent à ce propos. Car si l’issue d’un nouveau vote devait s’avérer négative une fois de plus, cela constituerait un revers magistral pour le camp aouniste et un camouflet pour le président de la République. Cela le serait tout autant pour le Premier ministre Hassane Diab et ceux qui ont écarté le projet avec lui, s’ils devaient revenir sur leur décision.

Il y a deux semaines, le Conseil des ministres avait écarté par la voie d’un premier vote l’option Selaata, préférant accorder la priorité aux deux centrales de Deir Ammar et Zahrani, quitte à reconsidérer la troisième solution par la suite si cela devait s’avérer utile. Le gouvernement avait motivé cette décision par le fait que les centrales de Zahrani et Deir Ammar bénéficient d’infrastructures déjà existantes et posent moins de problèmes logistiques que le projet de Selaata, dont le terrain doit être exproprié et nécessite donc des indemnisations que l’État ne peut honorer aujourd’hui.

Ce dossier, pourtant purement technique, a vite fait de prendre une tournure éminemment politique, le camp aouniste s’étant lâché contre son allié le Hezbollah, dont les ministres ont refusé d’avaliser le projet, prenant soin toutefois de faire savoir que ce n’était que « partie remise » et que pour l’heure, Selaata ne figure pas en tête des priorités des réformes attendues.

Depuis, le CPL semble avoir déclaré une guerre larvée contre son partenaire chiite qu’il a attaqué frontalement pour la première fois, critiquant son arsenal militaire et brandissant la menace implicite d’un désaveu du parti chiite. « On ne peut pas continuer à porter les armes alors que le peuple a faim », avait ainsi déclaré à la surprise de nombreux observateurs, le député de Jezzine Ziad Assouad, évoquant par la même occasion une « résistance » qui ne peut survivre sans un « consensus national », avant de mettre en garde le Hezbollah contre « une perte de soutiens sur la scène locale ». Une attitude considérée par un responsable du parti chiite comme du « pur chantage » exercé par le CPL « pour faire plier le parti dans l’affaire de Selaata ».

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Toutefois et à en croire les sources proches du dossier, le Hezbollah et encore moins le mouvement Amal, dont le chef Nabih Berry s’est entretenu il y a quelques jours avec Gebran Bassil pour tenter de calmer le jeu, ne modifieront pas leur position sur cette question.

« Le Hezbollah reste convaincu que Selaata n’est pas une priorité et restera conséquent avec lui-même si cette question devait être évoquée de nouveau aujourd’hui », confie une source proche du parti chiite. Ce dernier avait d’ailleurs informé le chef de l’État et M. Bassil de sa position avant les fêtes du Fitr, dans une tentative destinée à calmer la tension qui montait crescendo entre les deux formations. Cette initiative n’a vraisemblablement pas pour autant intimidé le camp aouniste, le ministre de l’Énergie Raymond Ghajar continuant de promouvoir Selaata et occultant totalement la décision du gouvernement à ce propos lors de la réunion qui a regroupé, le 18 mai au Grand Sérail, plusieurs ambassadeurs et représentants de pays contributeurs du programme CEDRE. Le chef de l’État n’a pas lâché prise non plus en demandant, via un courrier envoyé à la présidence du Conseil, que soit reconsidérée la décision du gouvernement. Michel Aoun a notamment motivé sa requête par le fait que la construction de la centrale de Selaata figure dans le plan de réforme globale du secteur, et qu’elle est nécessaire pour assurer le courant électrique 24 heures sur 24.

Un avis que plusieurs experts contestent, estimant que les deux centrales de Zahrani et Deir Ammar, auxquelles il faut ajouter celle de Jiyé, suffisent à assurer les besoins du pays en courant.

Du côté du gouvernement, toute remise en cause de sa décision concernant un dossier aussi névralgique donnerait immanquablement des signes négatifs à la communauté internationale, qui observe à la loupe ce secteur ainsi que la prestation de l’exécutif.

Selon une source diplomatique, plusieurs études ont déjà montré « l’inutilité de cette troisième centrale », d’autant que le coût prévisionnel qu’elle risque de générer est extrêmement élevé, dont celui de l’expropriation du terrain. Cette question avait fait l’objet d’un scandale autour de la valeur réelle du terrain qui avait décuplé avant que l’affaire ne s’ébruite. « Depuis le début, il existe des doutes sur le bien-fondé de ce projet », confie cette source.

Le secteur de l’électricité est, rappelons-le, une priorité dans le chantier des réformes exigées par les bailleurs de fonds internationaux, lesquels conditionnent toute aide à accorder au Liban à l’élaboration d’un plan clair, un engagement de transparence et la création d’une autorité de régulation du secteur qui n’a toujours pas vu le jour.

Et rebelote. Alors que l’on croyait le projet de la centrale d’électricité de Selaata classé, du moins pour le moment, nouveau coup de théâtre : ce projet auquel les aounistes, et avec eux le président de la République, semblent attachés comme à la prunelle de leurs yeux risque de s’imposer de nouveau à la table du Conseil des ministres qui se tient aujourd’hui à Baabda....

commentaires (7)

La vue de dix drapeaux libanais identiques, du jamais vue dans un pays démocratique. J'aurais préféré un seul drapeau et neuf décisions patriotiques pour le salut de la Patrie.

Un Libanais

21 h 04, le 29 mai 2020

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • La vue de dix drapeaux libanais identiques, du jamais vue dans un pays démocratique. J'aurais préféré un seul drapeau et neuf décisions patriotiques pour le salut de la Patrie.

    Un Libanais

    21 h 04, le 29 mai 2020

  • "...a vite fait de prendre une tournure éminemment politique, le camp aouniste s’étant lâché contre son allié le Hezbollah, dont les ministres ont refusé d’avaliser le projet, " Vous voulez dire: "s'étant fâché..", bien sûr?

    Georges MELKI

    12 h 19, le 29 mai 2020

  • Racketing à la sauce CPL.

    Tabet Karim

    09 h 22, le 29 mai 2020

  • Va-t-on jamais finir des interventions interéssées des uns ou des autres, et qui finissent toujours par avoir gain de cause, au détriment du pays???

    NAUFAL SORAYA

    08 h 36, le 29 mai 2020

  • Qu'est=ce qui a bien pu pousser le chef de l'Etat à relancer cette discussion qui risque de mettre à mal son gouvernement? Quand un projet s'avère, a fois coûteux et inefficace, et qu'il est, en plus, défendu par le CPL, il faut se demander quelle magouille il cache.

    Yves Prevost

    07 h 29, le 29 mai 2020

  • L,ENJEU DE SALAATA EST PUREMENT POLITIQUE. IL EST CANTONAL.

    LA LIBRE EXPRESSION

    05 h 59, le 29 mai 2020

  • A QUI APPARTIENT LE TERRAIN A EXPROPRIER ET VOUS SAUREZ QUI VEUT VOLER LE PAYS ET QUI VEUT LUI EPARGNER CE VOL LA VERITE EN EGYPTE UNE CENTALE POUR PLUS DE 100 MILLIONS D'HABITANTS AU LIBAN 2 OU 3 OU MEME 4 CENTRALES POUR 5 MILLIONS D'HABITANTS VOUS N'AVEZ PAS ENCORE COMPRIS MESSIEURS DU CPL QUE C'EST FINI VOTRE MAINMISE SUR L'ELECTRICITE QUI A FAIT ECHOUER LES REFORMES DEMANDEES PAR CEDRE ET QUE DIAB A DECIDE DE GOUVERNER SANS ACCEPTER LES DICTATES DE BASSIL CAR DIAB A VITE COMPRIS QUE C'EST HEZBALLAH QUI GOUVERNE VRAIMENT LE PAYS ET PAS LE LOCATAIR DE BAABDAH LA VERITE LA LECON EST AMERE QUAND ON A PENSE NOMMER UN PANTIN PLUS INTELLIGENT QU'ON LE PENSAIT MAIS QU' ON NE PEUT PLUS FAIRE MARCHE ARRIERE AH COMME BASSIL DOIT REGRETTER LE TEMPS DE HARRIRI BEAUCOUP PLUS DIPLOMATE MAIS FACILEMENT CONVAINCABLE DURANT 3 ANS

    LA VERITE

    03 h 40, le 29 mai 2020

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