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Agenda - Hommage

Nina Ninette Ninon

Si toute vie est un livre, celle de Nina Jidejian pourrait en inspirer mille.

Née à Boston, élevée en partie à Téhéran, arrivée à Beyrouth au début des années quarante, elle vouait au pays du Cèdre une passion immense, et l’écouter le raconter était toujours une fête.

Cette femme à la culture immense était une école de vie. À quarante-cinq ans, en parallèle à un engagement social intense, elle avait entamé allègrement des études d’histoire et d’archéologie. Auteure ensuite de plus de vingt ouvrages et conteuse extraordinaire, sa plume redonnait vie à l’Antiquité, aux temples et aux sarcophages. Écrire était son arme contre l’amertume de la guerre. Fascinante également à l’oral, l’écouter raconter était toujours un bonheur.

Notre amitié née par Hippocrate interposé s’était bâtie au fil des années. Dans cette maison devenue sa meilleure amie où le temps était suspendu ; son five o’clock tea était une parenthèse incontournable. S’y retrouvaient petits et grands comités, voisins et amis, hommes et femmes de lettres ainsi que tous les diplomates de la ville pour qui ce rendez-vous était l’équivalent d’une présentation de lettres de créance. Sur les tables, bouquets désuets et napperons brodés témoignaient d’une élégance qui faisait partie d’elle contre vents, guerre et marées.

La retrouver à chaque fois était un printemps en soi.

Elle m’envoyait ses livres avec une petite attention, un petit mot dentelle. Le dernier enveloppait aussi un trésor plein de tendresse : la recette manuscrite de son gâteau préféré, la brioche à la cannelle. Ultime présent d’une femme pour qui la cuisine était une équation à milles inconnues, alimentant surtout ses anecdotes dont elle était la première à rire.

Elle était frugale au grand étonnement de son volubile et généreux voisin à l’appétit légendaire et à l’œil rieur qui doit être ravi de la retrouver aujourd’hui. C’est lui, inoubliable Michel Eddé, qui l’avait d’ailleurs affectueusement surnommée Ninette.

« Le sens de l’honneur est la seule chose qui ne vieillit point et le dernier plaisir qui reste une fois que l’on est usé par les ans, c’est celui de jouir du respect de ses cadets. » Nina avait écrit ces mots pour rendre hommage à la mémoire du chirurgien colossal qu’était son époux Yervant Jidejian. Son grand amour, qu’elle est partie rejoindre, jour pour jour, trente et un ans plus tard pour un rendez-vous avec l’éternité.

Ninette, au respect je rajouterais également l’admiration, immense, que j’avais pour toi.

Tu fais partie à ton tour de ces légendes, comme celle de Ninon que tu as si bien racontée.

Dr Noha BAZ

Si toute vie est un livre, celle de Nina Jidejian pourrait en inspirer mille. Née à Boston, élevée en partie à Téhéran, arrivée à Beyrouth au début des années quarante, elle vouait au pays du Cèdre une passion immense, et l’écouter le raconter était toujours une fête.Cette femme à la culture immense était une école de vie. À quarante-cinq ans, en parallèle à un engagement...