La journée de commémoration de l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, vendredi dernier, a mis en exergue « une rivalité grandissante », selon certaines sources, entre l’ancien Premier ministre Saad Hariri, chef du courant du Futur, et son frère aîné Baha’.
Une rivalité politique liée au leadership sunnite et à la présidence de la formation politique, qui s’est illustrée par des incidents au centre-ville, entre partisans des deux camps devant le mausolée de Rafic Hariri dans le centre-ville. Des sources de la révolution dénoncent « une présence provocatrice » de partisans du fils aîné au centre-ville de Beyrouth et la « réponse agressive » des partisans du courant du Futur qui ont mis à sac les installations des contestataires dans le périmètre de la place des Martyrs et du parking des lazaristes. « Des groupes de jeunes gens se sont invités sur la place en criant Abou Baha’, raconte un militant de la contestation populaire, qui requiert l’anonymat. Ils ont placardé des portraits du Premier ministre assassiné sur lesquels ils avaient écrit Abou Baha’. » « C’était de la pure provocation, et pour la première fois depuis le début de la contestation populaire, nous pouvons parler d’éléments infiltrés », assure le contestataire, précisant que les jeunes gens ont été identifiés par les manifestants. Ce jour-là, les membres du soulèvement populaire, qui squattent le cœur de la capitale depuis le 17 octobre dernier, avaient pour mot d’ordre de rester pacifiques et de ne répondre à aucune provocation. « Ils savaient que c’était une journée de commémoration pour le 14 Mars et se sont conformés aux directives », affirme-t-il. Cela n’a pas empêché « les partisans du courant du Futur de saccager et brûler des tentes installées par la contestation, en réaction à la présence de groupes proches de Baha’ Hariri », ajoute-t-il.
À la mort de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri en 2005, Baha’ Hariri avait refusé de prendre la succession politique de son père. Mais, note le contestataire, « il a visiblement changé d’avis lorsque son frère, Saad, a été arrêté en Arabie saoudite en novembre 2017. À l’époque, il s’était heurté au veto de la famille Hariri et du courant du Futur. Cela ne l’empêche pas de revenir à la charge aujourd’hui. » Pour sa part, l’avocat Nabil Halabi, qui s’est présenté comme un proche de Baha’ Hariri et qui était sur place, a affirmé à la LBCI que « certains ont tenté de nous empêcher de déposer des gerbes de fleurs sur la tombe » de l’ancien Premier ministre.
« Nous n’avons rien à voir avec lui »
Également interrogé sur la question, l’ancien député Moustapha Allouche, membre du bureau politique du courant du Futur, assure que le parti n’a rien à voir avec Baha’ Hariri. « S’il veut faire de la politique, libre à lui. Il peut le faire comme n’importe quelle autre personnalité, dit-il. Mais nous n’avons rien à voir avec lui. » « Et s’il envisage, en tant que fils de feu Rafic Hariri, de représenter une alternative à Saad Hariri, cela est hors de question », martèle-t-il, rappelant que Saad Hariri est le seul membre de la famille qui supporte la lourde responsabilité financière et politique. « Pour nous et pour le courant du Futur, Saad est non seulement le fils de Rafic Hariri mais aussi son héritier politique », martèle-t-il. L’ancien député souligne dans ce cadre que le frère aîné du chef du courant du Futur « n’existe pas politiquement » « Il n’a ni parti, ni groupe politique, ni même une association », affirme-t-il.
M. Allouche était présent vendredi au centre-ville de Beyrouth, lorsque le jeune député du Futur, Sami Fatfat, a été aspergé d’eau par des inconnus. « Nous ne savons pas qui sont les personnes qui ont pris part à ces provocations au cœur de la capitale, vendredi dernier », assure-t-il, écartant la possibilité que les éléments provocateurs soient proches de l’ancien ministre de la Justice, Achraf Rifi, qui était invité à la cérémonie à la Maison du Centre, sans toutefois être présent. « Je ne pense pas que les jeunes provocateurs étaient des partisans de Rifi », dit-il. Alors que sur les réseaux sociaux circulait un faux communiqué de Baha’ Hariri, ce dernier a remercié sur Twitter et par la voix de son attaché de presse, Jerry Maher, « tous ceux qui se sont associés à la commémoration » du décès de son père. Il n’a pas manqué, par la même occasion, de saluer « la contestation populaire » et de critiquer « l’oligarchie corrompue ».
Pour mémoire
Baha’ Hariri exprime son soutien à la démission de son frère
commentaires (9)
Les vieux réflexes chacun à mort derrière son zaïm... rien ne va changer hélas
AntoineK
09 h 36, le 18 février 2020