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Société - contestation

« Nous ne payerons plus » : la campagne passe à la vitesse supérieure

Dorénavant, un numéro vert et une aide légale d’avocats volontaires seront à la disposition des citoyens qui décident de ne plus rembourser leurs dettes bancaires ou leurs factures.


De gauche à droite, les militants Roy Dib, Rawane Nassif et Wassef Haraké lors de la conférence de presse. Photo A.T

Lancée en décembre par des groupes de contestataires, la campagne « Mech Dafiin » (nous ne payerons plus) visant à s’abstenir de payer les factures d’électricité, d’eau, les taxes municipales et surtout à arrêter de rembourser les dettes bancaires n’a connu qu’une timide réponse, en raison surtout des craintes des citoyens d’être sanctionnés par l’État ou les banques. C’est pourquoi plusieurs groupes de militants à l’origine de cette campagne ont annoncé hier des mesures visant à épauler les gens qui ne peuvent plus, en raison de la crise économique qui s’aggrave, honorer leurs factures, et élaboré plusieurs propositions de lois pour protéger les personnes qui ont contracté un emprunt.

Dans la salle intimiste du théâtre Metro al-Madina et en présence d’un grand nombre d’artistes soutenant le mouvement de contestation, des vidéos humoristiques d’acteurs – Aïda Sabra ou Talal Jurdi – ou de réalisateurs comme Roger Assaf, encourageant à ne plus s’acquitter des factures, ont été projetées.

« Nous sommes ici aujourd’hui pour proclamer notre solidarité avec les milliers de personnes qui ont perdu leur emploi, dont les dépôts bancaires ont été gelés, ou dont le pouvoir d’achat a fondu et qui ont été appauvris et affamés et ne peuvent plus rembourser leurs dettes », a annoncé, dans un communiqué au nom de ces groupes, le militant Roy Dib lors de la conférence de presse qui a suivi.

« La campagne “Nous ne payerons plus” vise d’abord à arrêter totalement de rembourser les prêts au logement, pour l’achat de voitures ou pour l’éducation, qui sont des dettes imposées aux Libanais en raison de l’incapacité de l’État à assurer le logement, les transports publics et l’enseignement supérieur », a-t-il expliqué.

Les militants ont également appelé les Libanais à arrêter de payer l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les biens immobiliers, les taxes municipales, la mécanique, ainsi que les factures d’électricité.

Ils ont mis à la disposition des citoyens un numéro vert (hotline)* qu’ils peuvent appeler à tout moment, pour poser des questions et demander de l’aide, ainsi qu’un numéro fixe* sur lequel ils peuvent prendre rendez-vous tous les vendredis matin avec des avocats bénévoles. Sur la page Facebook Mich Dafiin, il est possible de remplir en ligne un formulaire pour demander une aide légale.

Les groupes de contestataires ont également l’intention de soumettre à des députés qui pourraient les transmettre au Parlement des propositions de lois visant à protéger les personnes ayant contracté des emprunts. Les projets de loi viseraient à dispenser de rembourser certains emprunts et à réduire ou annuler les intérêts sur d’autres.


Dans les années cinquante, une désobéissance civile à Beyrouth
« Les gens sont aujourd’hui dans l’impossibilité de payer, et nous voulons empêcher que la politique d’appauvrissement des Libanais » de la part de l’État et des banques se poursuive, a expliqué lors de la conférence de presse l’avocat et militant Wassef Haraké. « La relation entre le citoyen et l’État est basée sur un contrat social, et si le gouvernement ne remplit plus ses engagements, les citoyens ne sont plus tenus de payer leurs taxes », a-t-il expliqué.

Et si EDL coupe le courant en raison du non-paiement des factures ? M. Haraké cite l’exemple des habitants d’Aley, qui ont arrêté de payer leurs factures et se sont rendus en masse devant la branche d’EDL, poussant la compagnie à ne pas les priver de courant.

« Nous ne devons pas avoir peur », affirme de son côté la chercheuse et militante Zeina Helou, qui rappelle que déjà, dans les années cinquante, les habitants de Beyrouth ont eu recours à la désobéissance civile en refusant de payer leurs factures d’électricité qu’ils jugeaient trop élevées, sans être privés de courant. « Au bout d’un an, ils ont obtenu que la facture soit réduite », ajoute-t-elle.

Interrogée au sujet de la situation des ménages ayant contracté un prêt logement, elle rappelle qu’aujourd’hui, 160 000 personnes ont perdu leur emploi, d’autres ont vu leurs salaires réduits, ou n’ont pas accès à leurs comptes. « Selon la Banque centrale, 130 000 personnes ont contracté un prêt logement, dont la moitié, qui sont des personnes à revenus modérés, auprès de la Banque de l’habitat. Au premier trimestre 2019, il y avait déjà 14,4 pour cent qui ne pouvaient plus rembourser leurs prêts. Aujourd’hui, on estime qu’au moins 30 à 32 pour cent des gens ne peuvent plus rembourser leurs emprunts », ajoute-t-elle.

Elle cite l’exemple d’un couple qui touchait trois millions de livres par mois. L’un a perdu son emploi, et l’autre a vu son salaire réduit. « Leur prêt logement est de 600 000 livres, alors qu’ils ne gagnent plus qu’un million de livres par mois, comment peuvent-ils continuer à le rembourser ? »

*Le numéro vert est le 71 82 99 23 et le fixe est le 01 27 33 67

Lancée en décembre par des groupes de contestataires, la campagne « Mech Dafiin » (nous ne payerons plus) visant à s’abstenir de payer les factures d’électricité, d’eau, les taxes municipales et surtout à arrêter de rembourser les dettes bancaires n’a connu qu’une timide réponse, en raison surtout des craintes des citoyens d’être sanctionnés par l’État ou les...

commentaires (3)

COURAGE, TRÈS BON IDÉE...NE LACHEZ PAS

Gebran Eid

21 h 09, le 23 janvier 2020

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Commentaires (3)

  • COURAGE, TRÈS BON IDÉE...NE LACHEZ PAS

    Gebran Eid

    21 h 09, le 23 janvier 2020

  • Il faut certainement trouver des solutions équitables pour ceux qui ne peuvent plus honorer leur dette ou factures à cause de la crise financière; car c'est de cela qu'il s'agit.

    PPZZ58

    20 h 49, le 23 janvier 2020

  • JE SUIS CONTRE LE -BOYCOTTAGE- D,ARRETER DE PAYER LES DUS AU PAYS. C,EST UNE GRAVE ERREUR.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 24, le 23 janvier 2020

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