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Culture - L’artiste de la semaine

Hussam Aliwat, né pour être libre

Alors que son premier album « Born Now » vient de sortir (octobre 2019) sous le label Gaya Music Production, le jeune musicien et compositeur d’origine palestinienne prépare la tournée de son Quartet avec passion et ambition.


Hussam Aliwat. Photo Clara Abi Nader

Né en 1990 au Qatar, Hussam Aliwat grandit au sein d’une famille palestinienne ; ses grands-parents maternels vivent au Liban, à Saida, où il se rend régulièrement pour les vacances. « Lorsque nous étions enfants, nous avons reçu mon frère et moi de petits ouds et j’ai pris ce jouet au sérieux. Je ne connaissais pas d’autre instrument de musique à l’époque. Pour mes douze ans, mes parents m’ont offert mon premier oud et je me suis mis à m’entraîner tout seul, j’y passais des heures et des heures. Je n’ai pas reçu de formation musicale académique, j’ai appris à en jouer tout seul. »

À vingt ans, Hussam Aliwat décide de partir pour Paris ; il suit des études de réalisation cinématographique à l’École de cinéma Eicar. « Je voulais faire une carrière musicale et je savais que la France, qui est un creuset de cultures variées, serait positive pour mon projet. J’étais trop vieux pour intégrer une école de musique, alors j’ai commencé à jouer avec différents artistes, comme le percussionniste brésilien Zé Luis Nascimento, en 2012. J’ai ensuite joué en 2016 avec Lars Danielsson, qui est un excellent contrebassiste suédois, très réputé dans le monde du jazz. Il m’a ouvert à de nouvelles inspirations, à des rythmes plus compliqués. Et c’est par l’écoute, l’expérience et les rencontres que je me suis construit comme compositeur. Maintenant, quand je me retrouve avec mes musiciens, on échange autour des morceaux, et chacun ajoute ses idées. »


Quand le oud rencontre le violoncelle et la batterie
Le Hussam Aliwat Quartet est un projet que le oudiste lance en juin 2016 avec deux amis violoncellistes, le Libanais Sary Khalifé (neveu de Marcel Khalifé) et Raphaël Jouan, bientôt rejoints par le batteur Nicolas Goussot. Le groupe, qui ne joue que des compositions originales, entre l’écrit et l’improvisé, fait le pari de mixer la musique traditionnelle orientale et le groove, en passant par le jazz et le rock. En avril 2017, le Quartet donne un concert à guichets fermés au célèbre club parisien Sunset Sunside ; c’est le premier d’une longue série. Il est régulièrement invité à des festivals de jazz, comme Jazz Contreband.

Avec la circonspection qui le caractérise, l’artiste franco-palestinien rappelle la malléabilité inhérente à son Quartet : « On joue parfois en trio, avec les deux violoncelles, et dans mon album, on a un invité dans deux morceaux : le pianiste Ayad Khalifé. »

L’album Born Now, composé de neuf titres, représente plus de 5 ans de travail. « Entre la composition, l’enregistrement, les répétitions et les concerts, c’est un travail intense. Mon album parle de naissance, la mienne, et de l’endroit où je me trouve en ce moment. C’est ici que je me suis imaginé depuis longtemps. Je ne viens pas d’un milieu artistique et je me suis construit tout seul. C’est pour ça que je parle de naissance, mais il ne s’agit pas que de moi, c’est un message pour tout le monde : j’invite le public à sortir de son confort, des frontières physiques ou culturelles, et à faire ce qu’il aime, sans peur. Peut-être que le titre qui me correspond le plus est Gently Wild, il a un côté révolutionnaire, tout en étant calme et poétique. » Celui qui apprécie la musique de Bachar Mar-Khalifé, du trio Gibran ou d’Anouar Brahem revendique une dimension cinématographique dans son écriture musicale. « Pour écrire, les images m’inspirent, et dans mon album, on peut avoir l’impression de regarder un film. J’ai déjà écrit pour le cinéma et j’aimerais poursuivre dans cette voie. »



Une certaine émotion
Hussam Aliwat évoque son instrument à six cordes, dont cinq doublées et une basse, avec une certaine émotion. « Il est emblématique de la musique arabe traditionnelle, et j’ai envie de l’emmener ailleurs, dans d’autres styles. Il offre une grande liberté par le jeu des quarts de ton, mais est assez limité au niveau de la puissance du son, ce qui fait que je module sans cesse mon jeu. En France, on aime les catégories et la classification, et ça m’a pris du temps pour briser les limites des genres musicaux, car je ne fais pas que du jazz. L’essentiel est d’écouter et de profiter, sans chercher à classer : cette approche est plutôt bien reçue par la presse et par le public. À mes concerts, on trouve des fans de métal, de rock, de musique orientale… Et j’aime ce mélange des cultures musicales. »

Le 29 novembre 2019, Hussam Aliwat Quartet a proposé au public parisien, au Café de la danse, la totalité des titres de l’album Born Now. « On a fait salle comble, avec une majorité de jeunes, des personnes plus âgées et même des enfants. Il y avait des gens de toutes sortes, et beaucoup d’entre eux sont venus nous parler à la fin, ils étaient ravis. »

Le Quartet est actuellement en train de préparer une longue tournée, avec Far-Prod, incluant des projets dans toute la France, en Europe, en Jordanie, au Maroc, en Colombie…

Hussam Aliwat évoque avec enthousiasme le soulèvement que connaît le Liban depuis plusieurs mois. « C’est très positif, le peuple doit exister, il a besoin de plus de liberté. Le problème du monde arabe, c’est que les gens ont eu l’habitude de suivre tel ou tel homme ou parti politique. Il y a de nombreux artistes dans notre région, mais le contexte ne leur permet pas de développer leur créativité et de construire leur parcours artistique. En ce qui me concerne, je n’avais pas l’environnement qu’il me fallait là-bas et je suis parti pour pouvoir devenir un artiste, tout en gardant des liens culturels et humains avec la Palestine en particulier, dont je suis solidaire. »

1990

Naissance au Qatar.

2002

Reçoit en cadeau son premier oud.

2010

S’installe à Paris.

2012

Premiers concerts avec le percussionniste brésilien Zé Luis Nascimento.

2016

Joue avec Lars Danielsson, un excellent contrebassiste suédois.

Juin 2016

Lance le projet Hussam Aliwat Quartet.

Avril 2017

Le Quartet donne un concert à guichets fermés au célèbre club parisien Sunset Sunside.

Octobre 2019

Sortie de l’album « Born Now ».



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