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Moyen Orient et Monde - Nobel de la paix

À Oslo, l’Éthiopien Abiy plaide pour l’union contre la haine

Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed Ali, lors de son allocution durant la remise du prix Nobel de la paix, hier à Oslo. Fredrik Varjfell/AFP

« Pas de “nous” et “eux” »: le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, en recevant son Nobel de la paix hier, a lancé un plaidoyer pour l’union à l’heure où son pays est déchiré par des violences ethniques et où ses efforts de réconciliation avec l’ex-frère ennemi érythréen piétinent.

M. Abiy, 43 ans, s’est vu attribuer le Nobel pour la réconciliation qu’il a menée tambour battant avec l’Érythrée. Annoncé le 11 octobre, le prix récompense aussi ses tentatives de médiation dans une région tourmentée ainsi que ses réformes visant à démocratiser son pays, longtemps livré à l’autoritarisme.

Après des progrès spectaculaires dans les mois ayant suivi son entrée en fonctions en avril 2018, le vent a tourné : sa politique d’ouverture a ouvert la voie à une flambée de violences intercommunautaires en Éthiopie tandis que le processus de paix avec l’Érythrée semble à l’arrêt.

Dans le discours de remerciements qu’il a tenu, en costume sombre, dans les murs fleuris de l’hôtel de ville d’Oslo, le plus jeune dirigeant d’Afrique s’est voulu rassembleur. « Il n’y a pas de “nous” et “eux” », a-t-il déclaré sous le regard de la famille royale norvégienne. « Il n’y a qu’un “nous” car “nous” sommes tous liés par un destin commun d’amour, de pardon et de réconciliation. »

Le 9 juillet 2018, à l’issue d’une rencontre historique à Asmara, la capitale érythréenne, M. Abiy avait mis fin avec le président érythréen Issaias Afeworki à 20 ans d’état de guerre.

Camarade de paix

Hier, il a veillé à associer à sa récompense son « partenaire et camarade de paix » érythréen, le seul dirigeant que l’Érythrée ait connu depuis l’indépendance acquise en 1993. « Nous avions compris que nos nations ne sont pas ennemies mais que nous étions plutôt victimes d’un même ennemi qui s’appelle la pauvreté », a-t-il affirmé. Ancien soldat, il a aussi témoigné des ravages de la guerre, se rappelant comment son unité avait été anéantie par une attaque d’artillerie érythréenne à laquelle il avait échappé parce qu’il s’était momentanément éloigné pour trouver un meilleur signal radio. « La guerre est l’incarnation de l’enfer pour toutes les personnes impliquées », a-t-il dit.

Si l’accord de paix avec Asmara a été suivi de gestes de bonne volonté tels que la réouverture d’ambassades et de postes-frontières ou le rétablissement des liaisons aériennes, le processus de rapprochement connaît aujourd’hui des ratés. Plusieurs postes-frontières importants sont de nouveau fermés et la question du tracé des frontières reste en suspens.

« Ce travail semble être au point mort », a d’ailleurs noté la présidente du comité Nobel, Berit Reiss-Andersen, avant de remettre le prix. « Le comité Nobel norvégien espère que vos réalisations antérieures, conjuguées au surcroît d’encouragement que représente le prix de la paix, inciteront les parties à poursuivre la mise en œuvre des traités de paix », a-t-elle dit.

Les experts redoutent toutefois que M. Abiy soit contraint d’accorder moins d’attention au processus de paix pour pouvoir se concentrer sur les élections « libres, justes et démocratiques » qu’il a promises pour mai. Une gageure, vu la situation sécuritaire actuelle en Éthiopie.

Violences interethniques

Rompant avec l’autoritarisme de ses prédécesseurs, M. Abiy a levé l’état d’urgence, libéré des milliers de prisonniers politiques, créé une commission de réconciliation nationale et levé l’interdiction pesant sur certains partis.

Mais cet élan de démocratisation a favorisé l’affirmation des identités ethniques.

Des manifestations anti-Abiy ont ainsi débouché en octobre sur des affrontements ethniques qui ont fait 86 morts. Dans son discours Nobel, M. Abiy a fustigé « les prêcheurs de la haine et de la division » qui « font des ravages dans notre société en utilisant les réseaux sociaux ».

Les festivités Nobel ont été assombries par son refus de s’exposer aux questions des médias : l’ex-chef d’un service d’espionnage a considérablement écourté le programme officiel et expurgé toutes les conférences de presse. « Hautement problématique », a jugé le directeur de l’Institut Nobel, Olav Njølstad. Ses services ont rétorqué qu’il était « assez difficile » pour un dirigeant en exercice de consacrer plusieurs jours à un tel événement, en particulier quand « les problèmes intérieurs sont urgents et requièrent l’attention ». Ils ont aussi invoqué son « humilité », selon eux, « guère compatible avec la nature très publique du prix Nobel ». Le Nobel consiste en un diplôme, une médaille d’or et un chèque de 9 millions de couronnes suédoises (environ 850 000 euros).

Source : AFP

« Pas de “nous” et “eux” »: le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, en recevant son Nobel de la paix hier, a lancé un plaidoyer pour l’union à l’heure où son pays est déchiré par des violences ethniques et où ses efforts de réconciliation avec l’ex-frère ennemi érythréen piétinent.M. Abiy, 43 ans, s’est vu attribuer le Nobel pour la réconciliation...

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