Algérie : prison requise contre un militant du "Hirak", un dessinateur en détention

La justice algérienne a placé jeudi en détention provisoire un dessinateur critique du régime, et a requis deux ans de prison contre un militant, "poète" de la contestation en Algérie, a annoncé une association.

Abdelhamid Amine, dit "Nime", peintre et auteur de bandes dessinées, a été placé en détention à Oran (350 km à l'ouest d'Alger), a indiqué le Comité national de libération des détenus (CNLD).

Cette association recense et soutient les personnes incarcérées en lien avec le "Hirak", le mouvement massif de contestation populaire contre le régime né en février. Elle ne précise pas les charges retenues contre le dessinateur, qui a publié récemment sur son compte Twitter @Nime_BD des œuvres grinçantes largement diffusées mettant en scène les actuels dirigeants algériens.

Le dessin intitulé "L'Elu" montre l'actuel homme fort de l'Algérie, le général Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée, un genou à terre, passer un chausson de vair au pied de l'ex-Premier ministre Abdelmadjid Tebboune, candidat à la présidentielle du 12 décembre --rejetée par la contestation-- sous les yeux médusés des quatre autres postulants. En arrière-plan, on distingue, spectral, le président déchu Abdelaziz Bouteflika, contraint à la démission par la rue en avril, après 20 ans à la tête de l'Etat. Un autre dessin intitulé "Jusqu'au bout" montre le général Gaïd Salah, le président par intérim Abdelkader Bensalah et le Premier ministre Noureddine Bedoui en musiciens jouant sur le pont d'un navire qui commence à couler.

Par ailleurs, le parquet a requis à Alger deux ans de prison contre Mohamed Tadjadit, militant de la première heure de la contestation et surnommé le "poète du Hirak" par certains journaux pour ses poèmes déclamés sur les marches du Théâtre national.

Selon le CNLD, il est inculpé pour ses publications sur les réseaux sociaux, sur la base de l'article 96 du Code pénal punissant jusqu'à trois ans de prison quiconque "distribue (...), expose au regard du public (...) dans un but de propagande, des tracts, bulletins et papillons de nature à nuire à l'intérêt national". Le tribunal a renvoyé sa décision au 19 décembre.

Jeudi, quelques centaines de personnes, dont de nombreuses mères de détenus, se sont rassemblées dans le centre d'Alger en soutien aux quelque 140 personnes en lien avec le "Hirak" placées en détention préventive ou condamnées ces derniers mois, selon le CNLD. Elles ont été rapidement dispersées par la police et plusieurs ont été arrêtées, a indiqué l'association.