Au moins 14 personnes ont été tuées et 145 blessées dans un attentat à la voiture piégée ayant visé hier matin un commissariat de police dans l’ouest de Kaboul. Dix des quatorze morts sont des civils, tout comme 92 des blessés, selon des propos émanant du porte-parole du ministère de l’Intérieur, Nasrat Rahimi.
Cette attaque a été revendiquée par les talibans et s’est produite au lendemain d’une déclaration du groupe islamiste dans laquelle il annonce son intention de tout faire pour empêcher la tenue de l’élection présidentielle prévue le 28 septembre prochain, exhortant dans le même temps la population afghane à se tenir à distance des rassemblements et autres meetings de campagne. L’attentat a également eu lieu alors qu’un huitième round de négociations entre talibans et Américains se tient en ce moment à Doha, au Qatar. Le point sur la situation avec Marvin G. Weinbaum, directeur du département des études afghanes et pakistanaises au Middle East Institute.
(Lire aussi : Les talibans menacent la présidentielle et appellent à « boycotter » le scrutin)
Dans quel contexte politique cet attentat s’est-il produit ?
L’attaque d’hier s’est produite dans un contexte politique évident qui est celui de l’élection présidentielle prévue le mois prochain. S’il existe un lien quelconque entre les différentes attaques perpétrées à Kaboul, c’est bien l’objectif de démontrer la faiblesse du gouvernement du président Ashraf Ghani à protéger ses citoyens et, de ce fait, ses efforts pour rester au pouvoir. Avec cette attaque et d’autres à travers le pays, les talibans tentent également d’empêcher les gens de se rendre aux urnes et ainsi de saper la légitimité de tout futur gouvernement.
Est-ce que les talibans utilisent ces attentats comme un moyen de pression dans leurs négociations avec les Américains ?
Les attaques font certainement partie des négociations avec
Washington. Elles peuvent d’une part être perçues comme des tentatives de renforcer la position des talibans dans les négociations, mais elles amènent également de nombreuses personnes à s’interroger sur la sincérité des talibans dans leur recherche de la paix.
Cependant, tout indique que les dernières attaques ne devraient pas faire dérailler les discussions. Les deux parties obtiennent ce qu’elles veulent : le départ des troupes étrangères pour les talibans et une sortie sûre et non humiliante de l’Afghanistan pour les États-Unis. Ces derniers vont dire qu’ils préparent le terrain pour une trêve et de futures négociations interafghanes, mais en réalité, ils ne feront que jeter tous les problèmes non résolus dans les mains des Afghans.
Risque-t-on un report de la présidentielle ?
Tant que la plupart des candidats à la présidence resteront disposés à participer à l’élection, les choses devraient se dérouler comme prévu. Le seul scénario dans lequel elle pourrait être annulée serait que les négociations de Doha aboutissent à la constitution d’un gouvernement intérimaire. Mais le gouvernement du président Ghani pourrait ne pas accepter ces conditions et nous n’aurions ni gouvernement provisoire ni élection.
Cela dit, il devrait être clair que les talibans n’accepteront jamais une participation à des élections générales fondées sur la volonté populaire. Ils rejettent les élections et les Parlements par principe et savent pertinemment que s’ils participaient à une élection, leurs résultats seraient médiocres. Au mieux, les talibans seraient des petits partenaires au sein d’un gouvernement. L’objectif des talibans reste la restauration d’un émirat islamique (peut-être plus inclusif qu’avant).
Pour mémoire
La jeunesse afghane sceptique à l'approche d'un possible accord américano-talibans
commentaires (2)
L,AFGHANISTAN, UN FIASCO !
LA LIBRE EXPRESSION
20 h 26, le 08 août 2019