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Nos Lecteurs ont la Parole - par Sabine CHAMOUN

J’ai dit oui au mariage civil !

La question du mariage civil au Liban est l’une des plus complexes. Comment expliquer à des gens qui n’ont pas connu de système laïc de leur vie que le mariage doit être officialisé par un État qui impose des lois civiles équitables sur toutes et tous ? Pourquoi est-il si difficile de convaincre que ce genre de lois est une garantie d’équilibre et de justice pour les deux partenaires ainsi que pour les enfants ? Pire encore, comment convaincre un État qui a progressé, historiquement, côte à côte avec les institutions religieuses qu’un mariage civil est l’une de ses obligations envers le peuple ? Ce n’est pas gagné.

De manière générale, la volonté d’un peuple est le début de l’étincelle. Un peuple déterminé qui réclame un changement de lois laisse la place à l’espoir. Mais jamais un État non déterminé n’imposera des lois favorables à un peuple non décidé. Par conséquent, si les Libanais mêmes ne sont pas prêts à accepter un mariage civil, l’État ne le fera aucunement pour eux.

Toutefois, ce qui m’a marquée dans cette vague de réactions de pour et de contre, c’est la position du patriarche. Comme je l’ai comprise, sa réaction peut être divisée en deux idées : l’une est pour le mariage civil obligatoire (super !) et l’autre anéantit la première en stipulant qu’un chrétien marié civilement est en état de péché (et voilà qu’on a perdu 90 % des maronites libanais dans notre bataille pour le mariage civil : bien joué !). Il y a dans cette annonce, pour le moins, une contradiction étonnante. La première déclaration semble faire office d’apparence, tout en étant réconforté et rassuré que, sur l’autre rive, un certain mufti de la République est et restera catégorique dans sa position contre le mariage civil. Si je tombe dans l’exagération et que cette déclaration est effectivement honnête et innocente, alors le patriarche voudrait-il réellement imposer une loi civile qui entraînerait les chrétiens, selon lui, au péché ?

En outre, à part l’argument – logique – du péché, le patriarche craint principalement la marginalisation des institutions religieuses. Mais pourquoi le patriarche craignerait-il cette marginalisation si le mariage religieux fonctionnait proprement ? Croit-il secrètement qu’actuellement les gens se marient religieusement contre leur propre gré ? Un mariage civil obligatoire ne devrait point empêcher les personnes convaincues de compléter leur union par un mariage religieux. Par contre, les personnes non convaincues auront simplement le choix de ne pas le faire. J’insiste sur le terme de « conviction » et non de « croyance », sachant qu’une personne peut avoir une multitude de raisons pour lesquelles elle refuse de se marier religieusement tout en étant croyante !

Enfin, je suis pour ma part mariée civilement avec l’homme de ma vie. Notre mariage est basé sur l’amour et le respect depuis maintes années. Je suis également, figurez-vous, croyante et je puise toute ma force de ma foi.

Désolée de vous contrer, Monseigneur, mais l’on ne peut hocher sa tête et applaudir lorsqu’on nous qualifie de pécheurs...

Désolée, je serai, malgré vous, toujours chrétienne.

Désolée encore, je le serai toujours, que vous l’avouiez ou pas.

Enfin, ce n’est pas un mariage personnel et des croyances officielles qu’il nous faut, mais un mariage officiel et des croyances personnelles !


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

La question du mariage civil au Liban est l’une des plus complexes. Comment expliquer à des gens qui n’ont pas connu de système laïc de leur vie que le mariage doit être officialisé par un État qui impose des lois civiles équitables sur toutes et tous ? Pourquoi est-il si difficile de convaincre que ce genre de lois est une garantie d’équilibre et de justice pour les deux...

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