Le rêve de la boxeuse iranienne Sadaf Khadem semble mal tourner

Le rêve de Sadaf Khadem tourne-t-il mal? La boxeuse iranienne qui a gagné en short et débardeur samedi à Royan, dans l'ouest de la France, son premier "combat officiel", ne rentrera pas en Iran car elle affirme être sous le coup d'un mandat d'arrêt, ainsi que son entraîneur.

La Fédération iranienne de boxe a "vivement démenti" mercredi toute sanction pesant sur elle dans un communiqué publié par le ministère des Sports et de la Jeunesse. Quant à l'Autorité judiciaire, de laquelle relèverait un éventuel mandat d'arrêt, elle n'a fait aucun commentaire sur l'affaire.

Selon leur attachée de presse, les deux sportifs auraient dû prendre l'avion mardi mais sont restés en France et séjournent actuellement à Poitiers (centre).
Sadaf Khadem devait rentrer à Téhéran, où elle est professeure de fitness. Son coach Mahyar Monshipour, six fois champion du monde poids super-coqs WBA entre 2003 et 2006, détenteur de la double nationalité française et iranienne, devait l'accompagner. L'ancien champion de 44 ans, qui réside à Poitiers, devait effectuer une tournée en Iran pour animer des stages de boxe et se rendre à Bam (sud), où il a fondé une école, selon la même source.

La boxeuse de 24 ans serait accusée d'avoir enfreint la loi de la République islamique qui impose à ses sportives de porter le hijab, même à l'étranger. Son entraîneur serait soupçonné de complicité.

Monshipour, coach et organisateur du match, affirme avoir été prévenu de l'existence de ce mandat d'arrêt par un SMS dont il refuse de révéler l'expéditeur, a expliqué l'attachée de presse, qui a assuré que le ministère français des Sports était au courant du dossier et que les deux Iraniens ne souhaitaient pas s'exprimer pour le moment.

Combat symbolique
La ministre des Sports Roxana Maracineanu a évoqué mercredi devant des journalistes un "beau combat, symbolique pour la cause des femmes". Sadaf Khadem "a eu son visa pour venir en France de façon tout à fait légale, elle a combattu selon la loi de notre République", a ajouté la ministre. "Sans pouvoir (se) prononcer plus en avant sur la suite des événements et ce qui s'est dit aujourd'hui", elle assure garder un "oeil attentif sur la question".

Hossein Soori, patron de la Fédération iranienne de boxe, a précisé que la boxeuse ne faisait pas "partie des athlètes enregistrés" et que "pour la fédération, toutes ses activités relèvent du domaine privé et sont un combat-exhibition". "Toutes les informations selon lesquelles elle serait sanctionnée à son retour en Iran sont vivement démenties", a-t-il ajouté dans un communiqué.

La jeune femme, qui s'entraînait à la boxe depuis trois ans en marge de son travail, était engagée pour un événement qualifié d'"historique" par Monshipour : le "premier combat d'une Iranienne validé, enregistré avec de vrais arbitres par une fédération nationale", soit le premier "combat officiel" d'une Iranienne en boxe anglaise, avait-il dit à l'AFP avant le match. L'idée du combat lui était venue, expliquait-il, quand le Comité international olympique avait obligé les pays qui résistaient à rendre tous les sports mixtes sous peine d'exclusion des équipes masculines.

Selon Maziar Nazemi, porte-parole du ministère iranien des Sports, si des sports comme le MMA (arts martiaux mixtes) sont totalement interdits pour les hommes comme pour les femmes, "des Iraniens vont à l'étranger pour le pratiquer et reviennent en Iran. Personne ne leur dit rien". Aucun "n'affirme représenter l'Iran et aucun n'a mené de campagne de presse", a-t-il dit à l'AFP. Selon lui Sadaf Khadem (qui portait le mot +Iran+ sur son débardeur, NDLR) "a dit qu'elle représentait l'Iran, ce qui n'était pas le cas".

La boxe féminine n'est pas organisée en Iran mais il existe un projet de création d'une branche féminine au sein de la fédération. Les femmes peuvent participer à d'autres sports de combats comme le judo, le tae-kwondo, le karaté ou le kung-fu.

Samedi, sous les vivats de près de 1.500 spectateurs, Sadaf Khadem a remporté face à la Française Anne Chauvin une victoire qu'elle a dédiée "à tous les hommes et femmes qui ont donné leurs vies pour défendre (son) pays, 1 million de morts. Les femmes peuvent franchir les montagnes si elles le veulent", avait-elle ajouté.