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Liban - Trois questions à...

Léa Baroudi : Un plan d’action national ne peut pas aboutir sans une réforme des lois

La jeune femme a représenté le Liban à une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité coorganisée par l’Allemagne, le Pérou et la Grande-Bretagne.

Léa Baroudi lors de sa participation à la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité. Photo DR

Léa Baroudi, directrice de l’ONG March Lebanon, qui axe son action sur la consolidation de la paix, a représenté le Liban aux côtés de Nada Makki, du bureau du ministre d’État aux Droits de la femme et membre de la Commission nationale de la femme libanaise, à la réunion du Conseil de sécurité coorganisée le 25 janvier par l’Allemagne, le Pérou et la Grande-Bretagne sur le thème des femmes, la paix et la sécurité. La réunion était axée sur deux pays : l’Irak, qui a été le premier pays de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) à avoir adopté un plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité conformément à la résolution 1325 des Nations unies et qui développe actuellement son deuxième plan d’action, et le Liban qui est en pleine élaboration de son premier plan d’action national. Léa Baroudi a présenté à la réunion son point de vue concernant le rôle des femmes dans la consolidation de la paix et de la sécurité, en se basant sur son expérience dans le cadre du projet réalisé par March, en 2014, à Tripoli avec des anciens combattants des quartiers rivaux de Bab el-Tebbané et Jabal Mohsen. L’activiste répond aux questions de L’Orient-Le Jour.


(Lire aussi : A Tripoli, les ennemis d'hier redonnent vie, ensemble, à un quartier)


Comment concevez-vous le rôle de la femme dans la consolidation de la paix ?
Il est primordial. C’est ce que m’a prouvé mon expérience à Tripoli. Au départ, personne ne m’a encouragée à mener ce projet de théâtre pour réconcilier les jeunes des deux quartiers rivaux. On m’avait dit que j’étais folle de vouloir faire un travail inadapté à ma condition de femme. Avec le temps, j’ai réalisé que ce n’était pas vrai. Au contraire, le fait d’être une femme était un avantage. J’ai pu constater – et ce sont là mes impressions – qu’à Tripoli, on ne posait pas sur la femme un regard de rivale. Du coup, elle inspire confiance. Les hommes sont ainsi plus aptes à montrer leur faiblesse devant elle.

Donc, il est nécessaire que la femme soit présente à des postes-clés et à tous les niveaux. Dans la consolidation de la paix plus particulièrement, son rôle ne doit pas être confiné à des rencontres et des conférences. Elle doit pouvoir intervenir sur le terrain et il ne faut pas avoir peur de lui confier un tel rôle, parce qu’elle peut réussir. C’est ce que mon expérience à Tripoli m’a enseigné.

Quelles sont vos recommandations concernant le plan d’action national ?

N’importe quel plan d’action national, qu’il soit pour la consolidation de la paix ou pour la capacitation de la femme, ne peut pas aboutir ni réaliser son potentiel s’il n’est pas accompagné de législations qui soient équitables envers la femme. Il n’est pas normal que nous continuions à faire l’objet de discrimination dans les textes de loi et que nous ne soyons pas égaux devant la loi. C’est un point crucial sur lequel le plan d’action doit insister.

Par ailleurs, dans la consolidation de la paix, il faut que la femme ait un rôle sur le terrain et dans les postes de conflit à tous les niveaux, même militaire. L’expérience a prouvé que leur présence est d’une grande aide pour atteindre les objectifs souhaités.

Sur un autre plan, les associations de la société civile ont une grande expérience sur le terrain et elles ont développé des mécanismes et des initiatives innovatrices en termes de consolidation de la paix. Il serait important que le plan d’action national et le gouvernement en profitent, quitte à les améliorer, pour les appliquer dans d’autres régions ou même les utiliser dans leurs projets. Aujourd’hui, la coopération entre les ONG et le gouvernement n’est pas une idée nouvelle, mais elle reste limitée à des réunions consultatives assez superficielles. Il faut profiter de l’expertise des ONG et trouver les moyens de l’intégrer dans les plans du gouvernement.

Comment percevez-vous cette coopération entre la société civile et les institutions publiques ?

Aujourd’hui, elle n’est pas très opérationnelle. À Tripoli, nous avons eu une expérience très positive avec l’institution militaire tant au niveau de la coordination au quotidien qu’au niveau de certaines activités communes que nous avons organisées, comme un match de foot entre des anciens combattants et des soldats. C’était une expérience très réussie qui me fait réaliser à quel point il est important d’avoir une synergie et une vraie coordination entre la société civile et les différentes institutions publiques et ne pas se contenter de réunions consultatives.


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