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Culture - Événement

Le sultanat d'Oman, maison de la musique dans le Golfe

À l’initiative du sultan Qabous ben Saïd, féru d’art lyrique, Oman a été le premier des émirats du Golfe à se doter d’un opéra en 2011. Huit ans plus tard, avec l’inauguration de la House of Musical Arts, Mascate est en passe de devenir la grande maison des arts musicaux dans la région.


Le complexe de l’opéra et de la Maison des arts musicaux de Mascate.

« Placido Domingo s’est déjà produit trois fois sur cette scène. Et il y revient une quatrième fois en février dans La Traviata », indique fièrement à un groupe de touristes et de journalistes étrangers la jeune guide omanaise chargée de leur faire faire le tour de la « maison ». En l’occurrence le somptueux opéra, tout en marbre, boiseries, incrustation de feuilles d’or et lustres en cristaux Swarovski, joyaux centraux de l’immense complexe architectural dédié aux arts musicaux et rassemblant sur un espace de 80 000 m2, en plein cœur de Mascate, plusieurs bâtiments blancs à l’architecture contemporaine élégamment respectueuse de l’identité omanaise.

En 2011, c’est en grande pompe avec une mise en scène de Turandot de Puccini signée Franco Zeffirelli (et avec…Placido Domingo dans le rôle central) qu’avait été célébrée l’ouverture de l’Opéra royal de Mascate (Royal Opera House of Muscat). S’y sont succédé, depuis, d’autres grandes œuvres du répertoire, d’autres grands interprètes et musiciens, à l’instar de la cantatrice américaine Renée Fleming ou encore du violoncelliste Yo-Yo Ma.

Huit ans plus tard, en janvier 2019, c’est son extension, la Maison des arts musicaux (House of Musical Arts) qui vient d’être inaugurée avec un concert, réunissant sous la houlette du frétillant chef d’orchestre italien Giuseppe Finzi l’Orchestre symphonique royal d'Oman (accompagné par la chorale de l’Opéra royal d'Oman et celle de la garde militaire omanaise) et l’Orchestre national symphonique tchèque. Au menu de la soirée inaugurale : une première partie déroulant des pièces de compositeurs omanais suivie d’un bouquet d’arias parmi les plus populaires du répertoire opératique (La donna e mobile de Rigoletto, Nessun Dorma de Turandot, E Lucevan le stelle de Tosca ou encore Brindisi de La Traviata), remarquablement interprétés par deux belles voix de La Scala : la soprano géorgienne Nino Machaidze et le très applaudi ténor mexicain Ramón Vargas.


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Renforcement du dialogue interculturel

Un choix qui illustrait, subtilement, le but même de l’édification de ce riche complexe dédié « à la renaissance des arts musicaux au sein du sultanat, à travers notamment le renforcement du dialogue culturel avec les pays qui possèdent un riche patrimoine artistique », comme le signale le vice-Premier ministre omanais et président du comité suprême de l’Opéra royal de Mascate, Fahd ben Mahmoud al-Saïd.

À raison de deux à trois performances par semaine, la saison des arts et de la musique, qui se déroule de septembre à mai (mois à la température modérée) dans la capitale omanaise, présente des spectacles d’art lyrique et de ballet classique, mais aussi du jazz, du tango, des musiques du monde, des récitals baroques et de la danse moderne… Une programmation éclectique incluant des performances qui s’accommodent d’une scène moins grandiose que celle de l’Opéra royal (à la capacité de 1 100 sièges sous une impressionnante hauteur sous plafond) et d’une ambiance plus intimiste, que leur offre désormais la salle de concerts de la House of Musical Arts. Aussi luxueusement aménagé que son grand frère, et également équipé de la technologie (allemande) la plus performante, ce nouveau bâtiment, relié à celui de l’opéra par un magnifique pont tubulaire en verre et moucharabieh de métal, est également destiné à héberger, d’ici à 2020, une bibliothèque musicale, un centre culturel ainsi que des espaces de conférences et d’expositions. Sans compter le maïdan, vaste cour bordée d’une enfilade de galeries en arcs brisés d’une éblouissante blancheur, typique de l’architecture locale, qui pourrait accueillir des concerts à ciel ouvert.


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Immersion sensorielle dans 400 ans d’opéra

C’est d’ailleurs une très belle exposition immersive et multisensorielle directement importée du Victoria & Albert Museum (V&A) de Londres qui marque (jusqu’au 14 mars) l’ouverture de cette extension. Intitulée Opera 400 Years of Passion, elle déroule l’histoire de l’évolution de l’opéra, à travers un parcours en six étapes, consacrée chacune à une première d’opéra dans une ville. Depuis le Couronnement de Poppée de Monteverdi, la toute première œuvre interprétée, non plus dans un théâtre princier mais sur une scène publique à Venise, en 1642, jusqu’au Turandot de Puccini, mis en scène par Franco Zeffirelli pour l’inauguration de l’opéra royal de Mascate. En passant par Londres avec Haendel et son Rinaldo (créé en 1711), Vienne avec Mozart et Les Noces de Figaro (1786), Milan et le Nabucco de Verdi (1842), Paris et le Tannhäuser de Wagner (1861)… Le tour proposé aux visiteurs munis de casques audio les transporte, extraits musicaux à l’appui, dans les contextes de création et les atmosphères des grandes capitales musicales d’Europe dans lesquelles étaient présentés ces opéras. Et cela à travers des costumes et objets d’époque, peintures, lithographies, livrets et documents d’archives.


Un sultan mélomane et impliqué

Une autre intéressante exposition à signaler, celle permanente qui présente dans des vitrines au premier étage de l’immense hall de l’opéra quelques-uns des trésors de la collection d’instruments anciens du sultan Qabous : guitare de Mirecourt de 1825, violon baroque de 1761, cor français de 1840 ou encore flûte en cristal… Elle témoigne de la réelle passion pour la musique de ce sultan mélomane, que l’on dit d’ailleurs lui-même luthiste et… organiste. D’ailleurs, il a personnellement supervisé la création au milieu des années 80 d’un orchestre symphonique – purement – omanais, en envoyant se former, une décennie plus tôt, de jeunes musiciens et… musiciennes du sultanat aux quatre coins de l’Europe. L’orchestre, qui a entamé ses premiers concerts publics au début des années 90, participe aujourd’hui à des programmations internationales.

Par ailleurs, si jusqu’à présent la programmation de l’Opéra royal de Mascate est essentiellement importée des grandes scènes musicales comme La Scala de Milan, l’Opéra du Rhin (à l’instar de Madame Butterfly de Puccini présenté en janvier, avec dans les rôles titres, la soprano Maria-José Siri et le ténor Roberto Aronica), le théâtre Massimo de Palerme (La Traviata de Verdi programmée ces 7, 9 et 10 février) ou même, exception qui confirme la règle, du… Liban (avec Antar et Abla les 3 et 4 février), en septembre 2019, pour débuter la prochaine saison, il étrennera sa toute première production, un Lakmé de Delibes, coproduit par diverses compagnies d’opéra venues des cinq continents : Los Angeles, Le Caire, Astana, Rome…


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commentaires (3)

Si la musique adoucit les moeurs, l'argent rend fou. L'astuce consiste à trouver le bon équilibre entre les deux. Visiblement le sultanat à trouvé la clef de son équilibre. Bravo

Sarkis Serge Tateossian

12 h 50, le 28 janvier 2019

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Commentaires (3)

  • Si la musique adoucit les moeurs, l'argent rend fou. L'astuce consiste à trouver le bon équilibre entre les deux. Visiblement le sultanat à trouvé la clef de son équilibre. Bravo

    Sarkis Serge Tateossian

    12 h 50, le 28 janvier 2019

  • Et dire qu'à l'époque de son père, on fermait encore les portails de Mascate au coucher du soleil, et on était tenu de porter une lanterne en se déplaçant la nuit! Ah si nos hommes politiques suivaient l'exemple de ce sultan éclairé! Je crois que la plupart de nos problèmes seraient résolus beaucoup plus rapidement...Mais que voulez-vous, nos politicaillons ont des choses plus sérieuses à régler, à commencer par la libération de la Palestine(en entier, oui, pas seulement la partie occupée en 1967...)

    Georges MELKI

    12 h 26, le 28 janvier 2019

  • Ne dit-on pas que la musique adoucit les moeurs?

    Tina Chamoun

    08 h 22, le 28 janvier 2019

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